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HISTOIRES D'EN ....... SIMS 3

21 avril 2016

A la recherche de Jane Eyre - Partie 6 -

Le lendemain matin, au sortir de mon lit, je me demandais si tout ce qui s'était passé n'avait pas été finalement qu'un rêve.

Le coup de feu, Richard Mason, Monsieur Rochester. Et je me demandais encore la raison de tous ses mystères.

Tout en me rendant au rez-de-chaussée, je jetais un coup d’œil vers le corridor "interdit" me demandant si il y avait bel et bien là un jeune métis blessé dans la chambre de Monsieur Rochester.

Mais je passais seulement mon chemin incapable de forcer la porte pour me rendre compte par moi-même si je n'avais pas rêvé.  

Je descendais seulement prendre mon petit déjeuner comme d'habitude.

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Madame Pierce me fit une curieuse remarque, elle trouvait qu'une couleur inhabituelle rosissaient mes joues qu'elles trouvaient étrangement "colorées" moi qui était de coutume "plutôt pâle".

Je ne comprenais pas ce qu'elle voulait dire par là mais je ressentais effectivement une intense chaleur sur ma peau comme si j'avais le feu aux joues et tout mon corps était irradié d'une douce chaleur. J'étais même d'une excellente humeur comparé aux autres jours, et cela se remarquait parce que j'avais une toute nouvelle attitude : un grand sourire sur mon visage, des pas légers, et un tas de gestes maladroits. 

"- Monsieur Rochester est parti tôt ce matin" m'avertit Madame Pierce sans me quitter du regard tandis que je faillis renverser ma tasse de thé.

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L'évidente déception qui voila immédiatement la pétillance de mes yeux sembla l'informer d'une chose que j'ignorais.

Elle se mit à sourire.

"- Le Maître a laissé néanmoins un message." continua-t'elle d'un ton lent.

Je manquais de m'étouffer maintenant et je me sentis devenir rouge écarlate sous son regard inquisiteur. Je plongeais mes lèvres sur le rebord de ma tasse en porcelaine tentant de me donner une contenance tandis qu'elle poursuivait :

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"-  Il sera là comme convenu à treize heures pour vous voir vous et Adèle."

Je soupirais d'aise. Monsieur Rochester avait le chic de savoir m'inviter sans en avoir l'air.

Comme la cuisinière semblait attendre des informations supplémentaires, je m'empressais d'ajouter le plus naturellement possible une phrase de circonstance :

"- Merci, Madame Pierce. Je vais  prévenir Adèle de ce pas."

Ne voulant tarder davantage, j'engloutissais une part de brioche et terminais mon thé à la hâte, tout en me mettant debout.

"- Je suis sûre qu'Adèle va vouloir apprendre une nouvelle poésie pour l'occasion, je n'ai donc pas de temps à perdre. Merci beaucoup pour ce succulent petit déjeuner Madame Pierce."

La cuisinière me rattrapa :

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"- Attendez, Mademoiselle. Il y a autre chose..."

J'étais surprise. Avait-elle entendu quelque chose la nuit dernière ? Mon coeur s'emballa à l'idée de devoir parler du "secret" de Monsieur Rochester. 

"- Monsieur Rochester veut simplement que vous sâchiez qu'une nouvelle personne est arrivée cette nuit au château, une certaine Grâce Pool. Elle loge dans l'aile arrière du domaine mais il se peut que vous l'a croisiez de temps en temps."

J'étais sidérée par cette autre nouvelle. Madame Pierce continua naturellement :

"- Madame Pool est une ancienne domestique qui vivait avec le Maître quant il était installé aux Iles. Depuis peu elle a manifesté l'envie de retrourner en Angleterre et Monsieur Rochester a accepté de l'accueillir à Thornfield."

Encore !

Se pouvait-il que tous les malheurs de Monsieur Rochester soient liés à son extrême bonté ! Après Adèle, moi, Richard, voilà qu'une certaine Madame Pool bénéficiait elle-aussi de ses généreuses attentions !

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"- Monsieur recommande de ne pas déranger Madame Pool sous aucun prétexte et de ne jamais rien lui demander." poursuivit Madame Pierce. "C'est l'information que je devais vous faire passer. Voilà qui est fait. Je n'ai moi-même pas vue cette personne."

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Mon esprit était en ébullition. Nul doute alors que l'ancienne domestique était arrivée hier soir avec le jeune métis.

Etait-ce le fin mot de l'énigme de la nuit dernière ? Une banale rixte entre deux personnes qui ne pouvaient pas se supporter et que Monsieur Rochester s'était résolu à séparer en la logeant chez lui ? Mais qu'est-ce que Richard aurait-il pu donc faire à Madame Pool pour qu'elle lui en veuille au point de vouloir le tuer ?

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J'étais presque soulagée et rassurée, Monsieur Rochester était finalement en dehors de toute cette histoire. Finalement c'était le problème de Richard et il était sûrement parti maintenant emportant ce secret avec lui.

Sans attendre et après avoir remercié une nouvelle fois Madame Pierce, je m'éclipsais hors de la cuisine rapidement, remontant vers la salle d'étude. Je n'avais qu'une idée en tête à présent : trouver une belle poésie à faire dire à Adèle. 

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Adèle explosa de joie quand elle apprit l'invitation de Monsieur Rochester, et elle fut particulièrement ravie d'avoir ce rendez-vous avec son père. Elle eut du mal à se concentrer sur son travail tant la nouvelle était rare et inespérée.

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Je préparais carnet de croquis, pastels et graphites pour qu'elle puisse montrer ses talents d'artiste, nous prîmes même une guitare, elle avait envie de lui montrer à quel point elle avait bien travaillé. J’espérais que Monsieur Rochester apprécierait tous ses efforts. 

Il fut d'une extrême courtoisie et ce fut un après-midi, charmant. Il prit le temps d'écouter Adèle jusqu'à ce que la petite décide d'elle-même de jouer seule. Puis il partagea une délicieuse conversation avec moi sur tout et rien. Je voyais bien dans ses yeux qu'il me taquinait en évitant tous les sujets qui pourraient avoir un rapport avec l'éducation de sa fille. Mais j'appréciais ses efforts pour tenir sa promesse de respecter à la fois mon temps de travail et mon temps de détente.

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La journée toucha à sa fin et je pus constater qu'elle avait fait deux heureux : Adèle dont les yeux pétillaient de bonne humeur et Monsieur Rochester qui n'avait jamais été aussi détendu ni aussi jovial. Modestement, je savais que j'avais participé à cette journée et j'en tirais une grande satisfaction. 

Au moment de rentrer, Monsieur Rochester m'attrapa doucement par le bras pour me glisser à l'oreille que Monsieur Mason était tiré d'affaire et qu'il avait quitté Thornfield le matin même dans la plus totale discrétion pour loger dans une chambre en ville. 

Ce fut la seule ombre au tableau.

Je ne revis pas Monsieur Rochester de la soirée, il s'était retiré dans son bureau pour "tenir les comptes du domaine" et il ne souhaitait être "dérangé sous aucun prétexte" m'avait dit tranquillement Madame Fairfax qui cousait dans le grand salon.

Inutile donc que je pense à partager la fin de cette aventure avec lui, pensais-je en remontant dans mes quartiers.

J'avais donc décidé de me coucher de bonne heure pour rattraper mes heures de sommeil perdues laissant Adèle aux soins de la fidèle Nancy.

Bien calée sous les couvertures, cherchant le sommeil à la douceur d'un feu léger qui brûlait tranquillement dans ma cheminée, je ne cessais de me demander ce qui avait poussée Grâce Pool à être aussi violente avec Monsieur Mason et j'échaffaudais tous un tas de théories rocambolesques pour m'expliquer comment un jeune homme d'apparence tranquille avait bien pu contrariée une simple domestique comme Grâce Pool.

Ma nuit fut une nouvelle fois très agitée.

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Je me réveillais au beau milieu de la soirée glacée. Le feu de ma cheminée s'était éteint et ma porte de chambre était grande ouverte. 

Je me hâtais de me lever pour la refermer consciente que c'était du couloir qu'arrivait le courant d'air. J'avais à peine atteint la porte qu'un grincement se fit entendre. Je pensais immédiatement au chien du domaine. Nancy l'avait peut-être laissé entrer dans la maison et il se promenait à sa guise ? Je devais peut-être m'assurer qu'il ne réveille pas tout le monde. Je regardais à droite puis à gauche. Au fond du couloir, la chambre de Monsieur Rochester semblait fermée et calme, inutile donc d'aller traîner par là. Par contre j'entendis un léger craquement venant de l'aile arrière, c'était là que Monsieur Rochester avait installé sa nouvelle invitée.

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Madame Fairfax m'avait dit que personne n'allait jamais par là, c'était une aile  qui conduisait de l'autre côté du château vers la plus grande des tours, celle que j'avais aperçue la première fois à mon arrivée et où j'avais cru voir des lumières. Peut-être que le chien était allé par là ?

Je m'avançais dans le couloir quand soudain une masse sombre apparue au détour. C'était Monsieur Rochester ! Et il n'était manifestement pas content de me savoir debout et particulièrement dans cette partie du domaine.

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 "- Que faîtes-vous ici" me dit-il d'un ton sévère en cherchant derrière moi. "- J'espère que vous êtes seule !"

Il paraissait nerveux et inquiet.

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"- Je suivais Pilote." répliquais-je pour justifier ma présence. "- Il est entré dans ma chambre et à laisser tout ouvert, je me disais que je devais le ramener en bas dans la cuisine au lieu qu'il s'échappe plus loin." tentais-je en guise d'explication.

Monsieur Rochester était manifestement furieux :

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"- Vous dîtes qu'il est venu dans votre chambre et qu'en savez-vous ! "maugréa-t'il de très mauvaise humeur.

"- Parce que ma porte était grande ouverte et que le froid m'a réveillé" continuais-je un peu agacé qu'il mette ma parole en doute.

De nouveau, il me jucha de la tête au pied, avec une moue réprobatrice, il était loin du gentilhomme de l'après-midi.

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"- Encore à moitié couverte ! Vous vous voulez attraper la mort ou quoi ! Les pierres de ce château sont si anciennes que toutes les cheminées du domaine ne suffirait pas à le chauffer. Vous êtes une jeune écervelée ! Qu'est-ce qui vous a pris de quitter votre chambre pour suivre un idiot d'animal !"

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Et envers et contre tout, il se jeta sur moi et m'attrapa dans ses bras. J'étais rouge de honte.

"- Mais que faîtes-vous ! je peux marcher ! Posez-moi par terre !" osais-je en essayant de me dégager de ses bras.

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"- Taratata ! Mademoiselle Prince, vous êtes encore pieds nus et je ne veux pas que vous attrapiez froid chez moi ! Si vous voulez éviter que je vous couche comme une enfant. Comportez vous comme une adulte ! Arrêtez d'aller fouiner partout au plein milieu de la nuit."

Il me lança un regard noir qui ne souffrait pas de réponse mais furieuse d'être traitée comme une enfant, je me rebellais :

"- Fouiner ! Mais certainement pas ! Je vous dis que j'ai suivi Pilote..."

Il s'arrêta en plein milieu du couloir me tenant toujours serrée dans ses bras :

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"- Pilote est sagement dans sa niche en bas dans la cuisine. Nancy y veille tous les soirs."

"- Je vous dis que j'ai entendu du bruit comme si quelqu'un était entré dans ma chambre. Qui aurait ouvert la porte sinon ?"

Il me regarda un regard sombre et sa mâchoire se serra.

"- C'est un vieux château, voilà tout. Avez-vous toujours besoin d'avoir une explication à tout !"

Il me posa brutalement à terre sans cérémonie, je m'accrochais à ses épaules surprise de sa brusquerie.

Il me regardait avec cette étrange flamme dans les yeux, fixant tour à tour mes yeux et ma bouche tandis que je restais collée à lui.

Je sentais sa chaleur m'envahir toute entière.

"- Gardez-vous de tomber amoureuse de moi" me dit-il soudain en me regardant droit dans les yeux.

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J'étais tellement soufflée par cette remarque que je n'eus même pas le temps de répliquer.

Il continua sans s'éloigner de moi. Je sentais son souffle sur mon oreille :

"- De toute façon, j'ai bien vu que j'étais bien trop vieux pour vous, n'est-ce pas Elisabeth ?"

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Confuse je tentais de détourner mon visage.

Lisait-il dans mes pensées ?

Combien de fois m'étais-je dit qu'il était en effet bien trop vieux pour moi... Une bonne dizaine de fois, comment l'avait-il deviné ?

Il continuait toujours collé à moi.

"- Et pas particulièrement beau, n'est-ce pas ?"

Il me dévisagea et répéta :

"- N'est-ce pas ?"

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Serrée dans ces bras, je ne pouvais pas m'échapper, il me forçait même à répondre avec son regard insistant. Jamais je n'avais pensé qu'il était bel homme et depuis le début... 

"- Bien, vous avez un certain charme, Monsieur. Mais à vrai dire je ne sais pas si cela suffit..." commençais-je maladroitement.

Il éclata d'un rire tonitruant :

"- Ah Elisabeth ! Personne n'a osé me dire cela ! Attendez donc que je vous surprenne un jour à me regarder différemment ! Je vous attraperais bien ! Ne connaissez-vous pas ce vieil adage : Fontaine, je ne boirais pas de ton eau. Gardez vous bien ne pas le dire trop vite. Je suis plein de ressources..."

"Je n'en doutais pas" pensais-je en moi-même.

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Ma franchise l'avait emporté sur sa mauvaise humeur :

"- Venez ici, vous n'allez pas pouvoir marcher pieds nus jusqu'à votre chambre. J'ai bien le coeur trop attendri avec vous pour vous faire endurer ce supplice. Voyez comment vous me rendez !"

Je lui obéissais le laissant m'enlacer et me soulever dans ses bras une nouvelle fois. J'étais transie.

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"comment aurais-je pu longtemps résister au lunatique Monsieur Rochester ?" me disais-je encore serrée tout contre ses bras puissants.

Tandis qu'il marchait à grand pas vers ma chambre s'amusant encore de ma maladresse, il me lançait des oeillades sous-entendues tout en poussant la porte du pied et me déposant sur mon lit.

"- Vous voilà de retour, Mademoiselle Prince, telle une reine portée par son roi." cérémonia-t'il grandiloquent.

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J'avais presque l'impression que ses fanfaronnades voulaient cacher ses propres sentiments à mon égard mais que sa tête baissée, ses épaules courbées trahissaient sa déception de m'avoir entendu lui dire qu'il n'était à mon goût.

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Je le suivais faire le tour du lit pour vérifier la cheminée tandis que je me couchais frigorifiée.

Il resta un moment à attiser les braises pour que la chambre s'emplisse d'une chaleur agréable, il avait l'air sombre et tourmenté.

Je cherchais alors dans l'ombre de ses sourcils épais, la courbe de son menton trop carré, son profil coupé au couteau, la masse de ses cheveux sombres en pagaille, une quelconque attirance mais il n'y en avait pas, ni même dans sa haute stature impressionnante, dans la largeur de ses épaules, sa musculature de marin et de cavalier habitué à barouder. Il était aux antipodes de ce que pouvait être un vrai lord anglais, soigné, délicat dans sa mise, courtois et civilisé mais était plutôt tout le contraire, dissipé, bien souvent débraillé, la mine défaite, rustre et sauvage.

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Je le détaillais si intensément que je ne m'aperçus même pas qu'il me regardait avec la même intensité.

Il avait cette fois un regard d'un air triomphant qui semblait dire "Je savais bien que je réussirais à ouvrir votre coeur Elisabeth Prince".

Je crois que c'est à cet instant prècis où lui-même avait osé prétendre à une place dans mon coeur que je regardais différemment l'homme extraordinaire qu'il était. Il m'apparut unique dans sa façon brutale de se révèler à moi ; sans aucune hypocrisie, violemment entier, brutal et passionné. J'avais été émerveillé par chacun de ses actes, sa façon de se comporter, de gérer sa vie, j'avais admirée sa sensibilité, ses failles mais aussi ces moments de profondes certitudes. Jamais homme ne m'avait parut si entier.

Alors que je le dévisageais encore silencieuse, le regard perdu dans sa contemplation, il eut alors  une phrase étrange qu'il murmura gravement :

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"- J'espère être là le jour où vous me verrez autrement que sur un piédestal, Elisabeth."

Je baissais juste le regard, rouge d'avoir été découverte, mais mon admiration ne semblait pas lui suffire.  

Il resta un moment silencieux à gratter les braises rougeoyantes tandis que je commençais à fermer les yeux, épuisée. 

"- Bonne nuit, Elisabeth" me dit-il soudain d'une voix chaude tout en quittant la pièce à reculons. "Je crois être resté avec vous trop longtemps..."

Je n'eus même pas le temps de lui répondre qu'il était déjà sorti en murmurant cette sempiternelle autre phrase énigmatique dont il avait le secret.

J'eus dû mal à m'endormir agitée par cette nouvelle nuit particulière, sa présence, et l'impact qu'il commençait à prendre dans ma vie.

La pièce était étrangement vide maintenant qu'il était parti.

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Je me disais que succomber aux tentatives de charmes de Monsieur Rochester n'était sans doute pas la bonne solution, surtout dans ma situation et je devais me méfier pour ne pas tomber amoureuse de lui et garder mes distances.

J'appréciais finalement mon rôle de subalterne qui me forçait à rester à ma place, notre différence d'âge, et le fait aussi qu'il ne soit pas mon idéal. Fortes de tout cela, je me disais que finalement Monsieur Rochester n'avait aucune chance que je le vois autrement que comme le Maître de Thornfield si je restais fidélement accrochée à ses principes.

Et c'est ce que je comptais bien faire.

En fin de compte, trouvant un accord avec moi-même, je n'accordais plus aucune importance à la présence de Richard Mason ni à cette mystérieuse Grâce pool, les bruits que j'avais entendu dans l'aile abandonnée du château provenait sans doute de Monsieur Rochester qui avait dû effectuer une ronde. Rien de plus. Le vent avait dû pousser ma porte même si je n'avais pas cru entendre de tempête et, à force de suppositions, je trouvai enfin le sommeil...

 

Le matin ne ressembla à aucun autre, simplement parce que Madame Fairfax vînt m'annoncer que Monsieur Rochester était parti.

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Je me remémorais malgré moi sa dernière phrase "Je suis restée trop longtemps avec vous" avait-il dit au bord de la cheminée la veille. Jamais je n'aurais pensé qu'il me faisait à sa façon ses adieux.

Malgré moi, je ne pus empêcher une certaine morosité de s'installer dans mon coeur et aucun de mes efforts n'arriva à la chasser.

 

 

Les mois défilèrent les uns après les autres emmenant l'hiver puis le printemps sans que Monsieur Rochester ne décide de réapparaître.

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Je m'étais presque habituée à son absence quand soudain Madame Fairfax arriva dans le grand salon, elle avait un grand sourire sur le visage. 

"- Monsieur Rochester arrive dans une semaine" claironna-t'elle "- Et il ne sera pas seul, il annonce l'arrivée d'une belle compagnie. Mademoiselle Ingram en fera partie."

Je levais le nez de mon ouvrage.

"- Mademoiselle Ingram ?" demandais-je sans me rendre compte.

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"- Oh, Mademoiselle Prince. C'est la future fiançée du Maître certainement, cela fait plusieurs mois qu'il m'en parle et c'est pour elle qu'il est resté si longtemps absent. Il souhaite lui faire connaître Thornfield, c'est tellement évident... Ils ne devraient pas tarder à la demander en mariage. Quelle joie ! J'ai hâte que Monsieur Rochester s'installe définitivement à Thornfield, il nous manque tellement, n'est-ce pas ?"

Je me raidis malgré moi, je ne comprenais pas pourquoi mes doigts se mirent à soudain à trembler, même ma voix avait changé :

"- Se marier ?" répétais-je d'une voix monocorde.

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Madame Fairfax rassemblait son ouvrage rapidement :

"- Oui, il est temps ! le Maître n'est plus tout jeune maintenant ! J'ai tellement hâte de voir des enfants courir ici..."

Elle ne s'occupait pas de me regarder et j'en éprouvais un immense soulagement, j'avais l'impression que mon visage portait sur lui le choc de cette nouvelle, certainement inapproprié. 

"-Je vais tout de suite donner les ordres qui conviennent. Nous n'avons pas de temps à perdre. Mon dieu, une semaine ! Ce ne sera jamais suffisant pour que tout soit parfait..."

Elle partit en marmonnant :

"- Combien de fois ais-je demandé à Monsieur Rochester de me laisser plus de temps pour organiser une visite ! Cet homme n'en fait décidément qu'à sa tête..."

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Seule, j'accusais le choc, commençant naturellement à m'interroger sur le bien-fondé de ma place si Monsieur Rochester trouvait à se marier. Il était évident que la future madame Rochester prendrait en charge l'éducation d'Adèle et de leurs futurs enfants et que ma présence ne serait plus utile.

Je me mis à trembler comme une feuille. Qu'allais-je devenir ?

Je me fis violence pour me concentrer, trouver une solution de repli, je n'avais jamais eu besoin de personne, c'était évident, je trouverais un emploi ailleurs tout simplement. Je me levais, nerveuse, rangeant dix fois mon ouvrage. Malgré moi, j'en voulais à Monsieur Rochester, pourquoi ne m'avait-il rien dit ?

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J'entendais Madame Fairfax donner ses ordres : il fallait ré-ouvrir toutes les chambres dans l'aile principale, faire des commandes de nourritures, engager du personnel, nettoyer les cuivres, rendre la grande salle agréable, réaccorder le grand piano - J'appris que Monsieur Rochester avait une voix agréable et qu'il aimait chanter pour plaire à ses invités comme tout un tas de choses que j'ignorais de lui et qui me mit dans une position de retrait. Finalement, je ne savais rien de Monsieur Rochester, rien de ses habitudes ni de ses distractions favorites, si ce n'est ce qu'il avait bien voulu dire à sa simple gouvernante.

Je ne compris pas cette nouvelle pression qui me serra la poitrine et qui m'empêcha presque de respirer.

La semaine s'était écoulée à une vitesse incroyable, toutes les minutes avait été consacrées au futur accueil des invités de Monsieur Rochester et ils étaient apparemment nombreux...

Leur arrivée était imminente lorsque je pris la décision de ne pas me présenter aux invités et de me retirer dans ma chambre. "Ma qualité de simple gouvernante ne rendait pas ma présence obligatoire" m'avait  répondu Madame Fairfax. Je pus donc au même titre qu'Adèle rester dans mes quartiers pour laisser la "haute société" prendre ses aises au grand salon.

Mon autorisation de retrait ne fut que de courte durée. Au troisième jour, Monsieur Rochester me fit appeler et comme je n'avais pas l'intention de lui obéir, il me débusqua dans la salle d'étude, le nez dans un livre. D'un ton ferme, Adèle fut priée d'aller jouer avec ses nouvelles poupées et de rejoindre Nancy qui l'attendait dans le jardin. Et même si je profitais du départ de la fillette pour tenter de m'échapper avec elle, il me bloqua l'accès à la sortie.

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"- Je ne crois pas vous avoir vu au salon" commença-t'il d'une voix pincée.

Il y eut un long silence avant que je ne puisse répliquer simplement :

"- Oui en effet."

Ma réponse brève le déstabilisa une fraction de seconde mais il insista :

"- Pourquoi ?"

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J'étais surprise, il le nota immédiatement.

"- Je crois avoir compris que ma présence n'était pas obligatoire." expliquais-je simplement fuyant son regard.

"- C'est ce que j'ai cru comprendre..." murmura-t'il en faisant certainement allusion à ce que Madame Fairfax avait dû lui donner comme explication. 

Il chercha mon regard :

"- Vous ne semblez pas être à l'aise, il y a t-il un problème ? Mademoiselle Prince?"

Je sursautais, mon visage avait-il trahi mes émotions ?

"- Aucun problème" mentis-je sans le regarder prise  d'une soudaine envie de pleurer.

Il se pencha jusqu'à moi descendant ses larges épaules à ma hauteur.

"- Hum, on ne dirait pas, j'ai comme l'impression que vous avez envie de pleurer. Avez-vous envie de pleurer, Elisabeth ?"

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"- N..Non. Pas du tout. Vous vous trompez, Monsieur."

Il resta silencieux une longue minute à détailler ma tête basse et mes mains derrière le dos, puis il claqua des talons :

"- Dans ce cas, vous n'avez donc aucune raison véritable pour ne pas être avec nous au grand salon." fanfaronna-t'il.

Voyant que je restais sans réaction, il continua d'une voix séche :

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"- Je veux que vous et Adèle y soyiez présentes, et ce dés que ses cours seront terminés et jusqu'à son heure de coucher et, aussi longtemps que mes invités resteront. Est-ce bien compris ?"

Il ne me regardait plus. 

"- Je ferais comme vous voudrez, Monsieur" m'entendis-je dire d'une voix blanche.

"- Trés bien. C'est tout ce que j'attends de vous."

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Je restais un moment seule à fixer le chambranle où il avait disparu, je ne comprenais pas du tout, la froideur dont il faisait preuve avec moi ni son indifférence, je fus subitement glacée jusqu'aux os. Vidée, je regagnais ma chambre, pour la première fois ravie de ne pas à avoir à m'occuper d'Adèle, j'aurais été incapable de supporter ses babillages.

J'accélérais le pas pour ne rencontrer personne, jamais le corridor ne m'avait parut aussi long, enfin je trouvais refuge dans ma chambre.

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Un immense chagrin me gagna tout à coup et j'explosais subitement en sanglot. Incapable de trouver la raison de ces larmes, je me focalisais sur ma peur de devoir bientôt quitter Thornfield.

Après deux heures de solitude et de retranchement, j'entendis frapper légérement à ma porte. C'était Madame Fairfax.

"- Je vous ai apporté une robe." me dit-elle simplement "- Il est temps de vous préparer. Les invités de Monsieur Rochester ne devraient pas tarder."

Elle déposa une robe sobre de couleur grise réhaussée d'une dentelle de calais sur le coin du lit où je me trouvais encore assise. 

"- Si vous êtes déjà dans le grand salon, personne ne fera attention à vous" me dit-elle doucement. "Il a un coin discret où vous pourrez même vous installer avant tout le monde."

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Je secouais la tête avec un faible sourire et remerciait la bonne dame.

Je me déshabillais à contre-coeur pour enfiler la nouvelle robe et refis ma coiffure. Mes cheveux avaient énormément poussés depuis et je pouvais maintenant me faire un chignon, je réajustais ma coiffure mes gestes tremblants.

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Je renversais un peu d'eau dans la vasque de porcelaine pour m'arroser le visage et tenter de redonner un peu de couleur à mes joues. 

Je me hâtais ensuite d'aller chercher Adèle pour lui laisser le temps de prendre un jouet afin de s'occuper, nous gagnâmes ensuite ensemble le grand salon.

Je soupirais d'aise de voir que personne n'était arrivé encore. Comme me l'avait suggéré Madame Fairfax, je choisis le coin de la pièce le plus éloigné, tandis qu'Adèle s'était assise aux côtés de Madame Fairfax tout sourire son carnet de dessins à la main.

Stoïque, je me mis silencieusement à attendre.

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La compagnie n'arriva qu'une heure après à grand renfort de rires et de cris qui inondèrent la cour. Les chevaux hennirent comme si ils avaient été poussés à bout. Une clameur monta pour confirmer qu'une course folle avait bien eu lieu et chacun félicitait la gagnante bruyamment. C'était Mademoiselle Ingram qui avait été la première à franchir Thornfield et tous la félicitaient.

Les dames roucoulaient en entrant dans le hall tandis que les hommes parlaient forts. Je reconnus la voix de Monsieur Rochester, différente, courtoise, il proposait à ses amis d'aller dans le fumoir pour un petit "moment de détente" entre hommes et avertissait les dames qu'elles pouvaient visiter leurs chambres à l'étage pour commencer à prendre leurs aises.

Après un brouhaha de portes ouvertes et fermées, de pas dans l'escalier, Thornfield fut de nouveau plongé dans un calme absolu.

Ce fut encore une longue heure à patienter pour moi puis, tous apparurent dans le grand salon où ils prirent place bruyamment sans prêter attention à aucune de nous.

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J'avais loisir de regarder leurs tenues sobres, élégantes et soignées, leurs manières raffinées et d'entendre leur langage extrêmement recherché.

Monsieur Rochester était parmi eux, méconnaissable par son élégance.

Il avait troqué sa triste redingote par un ensemble racé qui affirmait la stature de ses épaules et indéniablement son charme, son sourire était aussi sa plus grande arme et il ne manquait pas d'en avoir pour cette magnifique blonde qui n'avaient d'yeux que pour lui d'où elle était installée.

Tout le monde voulait capter son attention. Blanche par-ci, Blanche par là. Les conversations ne tournaient qu'autour d'elle.

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Je saisissais ma broderie et tentait de m'intéresser à reconstituer un abécédaire d'animaux qu'Adèle avait choisi pour orner sa chambre. Je me piquais maladroitement à force de regarder l'horloge du salon, mon dieu, le temps semblait s'être suspendu ! Jamais minutes m'avaient parues aussi longues... Puis enfin ce fut l'heure du dîner d'Adèle, la fillette s'échappa avec Nancy tandis que je restais tétanisée sur mon fauteuil.

Dans une demie-heure environ mon service prendrait fin, la petite serait de retour à mes côtés et ma clé de sortie de cet enfer aussi...

Je continuais à détailler les invités et Monsieur Rochester qui se tenait auprès de la cheminée avec l'un d'entre eux : Lord Dent, un vieil aristocrate qui ne tarda pas à s'éclipser pour aller se reposer.

Du coin de l'oeil, j'admirais la tenue d'apparat et les coiffures ouvragées de toutes ses belles dames, surprise par leurs étranges manières.

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L'une d'entre elle était une dame d'une soixantaine d'année qui se faisait un malin plaisir d'accaparer un jeune jouvenceau à renfort d'oeillades et de flatteries.

J'appris plus tard qu'il s'agissait de Lady Ingram, elle était venue avec sa fille Blanche et quelques amis, les Eahston et les Dent.

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Les deux plus jeunes femmes portaient encore leurs tenues de cheval sobres mais élégantes mais c'était manifestement recoiffées car leurs coiffures étaient impeccables.

Elles ne cessaient de s'esclaffer entre elles repassant en détail le long voyage qui les avaient conduites jusqu'ici. le Nom de Monsieur Rochester revenait fréquemment, c'était grâce à lui que ses demoiselles avaient pu apprécier ce long et fatiguant voyage qui aurait été "selon leurs dires" un véritable "cauchemar" si il n'avait pas été là.

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Les conversations tournaient toutes autour du maître de maison et de son superbe domaine, chacun débattait sur le nombre "exact" d'hectares qu'il faisait, du nombre d'employés qui y travaillaient et de sa renommée dans le Comté.

Banalement, le sujet de conversation passa sur les personnes de charge de domaine. Madame Fairfax fut présentée à ses dames et messieurs, puis ce fut le tour d'Adèle, et de "sa gouvernante".

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J'avais cru entendre Blanche dire "- Voilà donc la triste Nounou" lorsqu'elle s'adressait à sa mère à mon sujet. Et de l'entendre ajouter "- Comme je suis bien aise de ne plus avoir affaire avec ses gens-là, Maman." Tandis que sa mère avait eu juste un unique gloussement en guise de réponse.

Ce fut le moment pour les autres convives de s'amuser à raconter les souvenirs qu'ils avaient eu avec leur propre nourrice, et de débattre sur leur utilité. 

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Puis lasse du sujet de conversation, Blanche s'était indignée et avait tempesté qu'elle s'ennuyait.

"- Des ennuyeuses personnes restent ennuyeuses jusqu'au bout, n'est-ce pas, Edward" avait-elle claironné à Monsieur Rochester tout en me jetant un regard snob.

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"- Au nom du ciel, proposez-nous autre chose et laissons ses sombres personnes à leurs livres et cahiers !"

C'est alors que Monsieur Rochester s'était incliné devant elle à l'image d'un jouvenceau pour lui dire :

"- Que diriez-vous d'unir nos voix sur une chanson, Blanche. Le piano n'attend que vous et je suis prêt à vous divertir avec une ou deux balades."

Et J'avais vu Blanche sautiller et battre des mains devant son chevalier servant.

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La gorge nouée, j'entendis la voix de Monsieur Rochester s'élever et s'unir à la voix légère de Blanche, le duo était un merveilleux mélange de grave et d'aigu que je fus incapable de critiquer. Le coeur lourd devant ce tableau idyllique qu'ils formaient ensemble, je me piquais une nouvelle fois. 

Enfin Adèle fut de retour. Tandis qu'elle saluait tout le monde, j'effectuais une révérence de convenance pour quitter la pièce à mon tour dans la plus totale indifférence.

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A SUIVRE

 

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1 mars 2016

A la Recherche de Jane Eyre - Partie 5 -

Voulait-il dire rester à son service comme l'avait fait la dévouée Madame Fairfax ?

Je baissais la tête pour cacher mon visage de peur qu'il surprenne mon expression de consternation.

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Si j'avais été Jane Eyre, la proposition aurait été alléchante, un poste ad vitam eternam, payée, nourrie, logée, quelle proposition inespérée ! Seulement j'étais Elisabeth Prince, une jeune new-yorkaise prisonnière des affres du temps et je n'avais certainement pas envie de rester bloquée à cette époque même pour les beaux yeux de son propriétaire !

Seulement Monsieur Rochester ignorait ce détail. Devais-je le lui dire ?

"- Vous ne pouvez pas, n'est-ce pas" me dit-il soudain.

Je sursautais. Combien de temps s'était-il donc passé ?

Son regard était sur moi et cette fois c'était lui qui avait ce petit pli de contrariété sur le front.

"- Vous ne pouvez pas" répéta-t'il en me détaillant longuement.

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"- Votre silence en dit long."

Il se détourna le regard sombre en claquant les talons comme si il était de plus en plus irrité par mon silence. Il bougonna.

"- Je m'en doutais. Vous n'êtes pas libre de vos décisions, n'est-ce pas ?"

J'étais incapable de lui répondre tiraillée entre mensonge et vérité.

Je voyais bien qu'il semblait torturé par le mystère que je mettais malgré moi dans mes hésitations.

"- Je peux rester" dis-je simplement en optant pour la franchise."- Un certain temps."

Il se retourna comme si il était furieux, je ne comprenais pas qu'il soit aussi si bouleversé par ma réponse.

"- Un certain temps ? Qu'est-ce que cela veut-dire ?" marmonna-t'il. "- Le temps qu'Adèle et moi apprenions à ne plus nous passer de vous, le temps que nous nous habituions à votre présence puis que vous vous décidiez à partir ?"

"- Je ne sais pas Monsieur, le temps que vous voudrez, je suppose."

Il me regarda fixement, surpris par ma réponse.

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"- Avez-vous un cœur, Mademoiselle Prince ?" me dit-il soudain en accrochant mon regard au sien.

"- Oui comme vous Monsieur" dis-je seulement.

"- C'est étrange. Vous ne semblez pas en avoir."

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 J'affrontais son regard pensif tout en cherchant à me justifier :

"- C'est seulement que je ne mélange pas devoirs et sentiments, Monsieur. Je pense que je ne ferais pas bien mon travail si je me laissais aller à la sensiblerie. Toutefois je peux vous affirmer que j'ai déjà beaucoup d'affection pour votre fille et si un jour je dois partir et exercer un autre travail ailleurs, je ne manquerais pas de prendre toutes les précautions nécessaires pour qu'elle n'en souffre pas. Mais je regrette, je ne présume jamais de mon destin, Monsieur, c'est tout. Personne ne sait à l'avance de quoi demain sera fait."

"- Tiens donc !" me dit-il agacé tout en levant les yeux au ciel comme si il ne croyait absolument pas à ce que je disais.

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Il eut un long silence, pendant lequel il fit quelques pas dans la pièce jusqu'à ce qu'il revienne vers moi avec un air triomphant.

"- Puis-je comprendre alors que si rien ne vous oblige à partir, vous resterez ?"

"- Oui, Monsieur, effectivement. Si rien ne m'oblige à partir, je resterais."

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Jamais regard et yeux ne furent alors si expressifs : la lueur d'espoir, de bonheur que je lus à cet instant dans les yeux de Monsieur Rochester fut indescriptible. C'était comme si j'avais ôté de ses épaules le poids de toute sa solitude en deux secondes, comme si je lui avais dit, oui, pour rester à ses côtés, pour toute ma vie. C'était une impression étrange de s'être promis l'un à l'autre sans l'avoir fait. Je venais de lui assurer qu'il pouvait compter sur ma présence et rien ne semblait  lui faire plus plaisir que cela.

Tel un enfant il énuméra alors les avantages de ce nouvel engagement.

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"- Vous serez donc à Thornfield à chaque fois que je reviendrais de mes voyages ! Nous pourrons discuter ensemble de l'éducation d'Adèle, vous me parlerez de ces progrès ou de ses difficultés. J'aimerais aussi vous entendre me raconter votre vie de tous les jours, tout simplement et, ce que vous avez fait aussi. Je suis sûre que vous tenez un journal, n'est-ce pas ?"

Je rougissais. Comment un inconnu pouvait-il aussi bien me cerner ?

"- Et bien oui, Monsieur, j'ai pris l'habitude de prendre quelques notes sur mes journées et celle d'Adèle, j'y ajoute aussi les rituels de la maison, quelques croquis, une éphéméride serait le juste mot ..."

Son visage s'éclaira d'un sourire éclatant :

"- Il y a tant de choses à partager avec vous, Mademoiselle Prince. Je m'en réjouis d'avance, vous êtes un rayon de soleil dans cette maison. Mon rayon de soleil, en tout cas."

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J'eus un nouveau pincement au cœur, ses compliments étaient si touchants, si simples, si irrésistibles. Comment ne pas tomber sous le charme de cet homme si attendrissant avec tous ces changements d'humeur.

Je me laissais aller à le regarder. Il n'avait rien de l'homme idéal, il était trop vieux, trop grincheux, trop lunatique. Bien bâti, d'une haute stature, sa carrure était bien trop large, ses mains bien trop grandes, son visage carré bien trop sévère, seuls ses yeux me fascinaient, ils avaient l'allure d'une mer grise tantôt battus et agités par la tempête, et tantôt d'un calme absolu.

Étrangement je m'apercevais que les secondes avec lui semblaient s'être suspendues au rythme de ses paroles comme si le temps s'était arrêté.

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Je ne comptais plus mes heures, je l'écoutais, je le regardais, j'étais bien avec lui, et je voulais que ce sentiment d'éternité ne prenne jamais fin. 

Je ne me souviens plus quand nous avions passé du bureau, au couloir, et du couloir au pas de ma porte de chambre, il m'avait accompagné en me tirant par le bras comme un enfant bavard.

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"- J'ai hâte que vous me parliez des progrès d'Adèle, Mademoiselle Prince mais aussi de vous. Je suis sûr que votre histoire est passionnante et je me réjouis d'avance de l'entendre, vous m'avez l'air d'avoir naturellement des talents de narratrice."

Je m'adossais au chambranle de la porte de ma chambre consciente que Monsieur Rochester m'avait amené jusque là.

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J'avais l'impression qu'il me volait des cours moments d'intimité comme pour chercher à se rapprocher de moi mais avec la plus grande courtoisie du monde, mine de rien. Dans ses yeux, c'était comme si, il voulait me voir partout ailleurs sauf à ma place de gouvernante.

Là à l'instant même, il était bien trop proche de moi.

Jamais un homme de cette époque aurait pu avoir l'audace de suivre une dame jusqu'au pas de sa chambre et pourtant il l'avait fait, comme un mari. Je frissonnais.

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C'était cela que je voyais dans ces yeux, dans la façon qu'il avait de me regarder : j'étais la femme et la compagne qu'il voulait pour lui, et par je ne sais quel mystère, qu'il se refusait d'avoir. Je ressentais cette barrière entre nous, qui l'empêchait de m'avouer ses sentiments, mais j'étais sûre qu'il avait de l'attirance pour moi. Cela se voyait dans chacun de ses regards qu'il portait sur moi : Ses yeux étaient comme de savantes caresses délicates et attentionnées, ses gestes, des multitudes marques de bienveillance, ses sourires, des déclarations et sa voix douce et chaude était comme une brûlante proclamation de son amour naissant.

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Mon cœur battait au rythme de sa danse et me faisait fondre doucement, tout doucement, j'aimais cette séduction simple, respectueuse, excessivement maniérée. Il me semblait que Monsieur Rochester en jouait aussi. Peut-être avais-je le regard illuminé comme lui, les joues rosies par ses compliments, sa présence et mon relâchement soudain l'emmenait lui aussi à se laisser aller à une certaine douceur. Peut-être aussi que l'obscurité qui envahissait le corridor, le silence, le fait que nous n'aurions pas dû être là ensemble, privilégiait ce moment. Et ni lui ni moi n'avions envie de mettre un terme à cette harmonie.

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"- Demain promettez-moi que nous irons ensemble, Vous, Adèle et moi, faire un tour dans le jardin, vous me parlerez de ce que vous comptez lui enseigner."

"- Comme vous voudrez, Monsieur. Ses cours pratiques se terminent vers midi mais Adèle dispose de toute ses après-midis."

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"- Parfait." se contenta de dire Monsieur Rochester avec un grand sourire. 

Comme il ne partait pas, je me risquais une nouvelle fois à lui demander :

"- Dois-je comprendre cette fois que vous m'employez, Monsieur ?" lui demandais-je d'une voix légèrement nouée.

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"- Oui, cette fois vous pouvez, Mademoiselle Prince. Vous pouvez."

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Et comme un tigre, il se faufila dans l'ombre me laissant seule. J'entrais dans ma chambre le coeur encore battant.

Il devait être tard car je n'avais pas entendu un seul bruit venant des chambres attenantes.

Seule la lumière de la cheminée éclairait la pièce et l'ombre des meubles semblaient danser autour de moi.

Je me hâtais de me déshabiller, de faire ma toilette et d'enfiler ma grossière chemise de nuit en lin.

Le froid était maintenant saisissant, j'avais hâte de me mettre au lit. Au moment où je tirais les couvertures, je fus soudain alertée par un bruit venant de l'extérieur. Manifestement un équipage arrivait dans la cour.

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C'était étonnant, ni Monsieur Rochester ni Madame Fairfax n'avait mentionné des visiteurs. Je haussais les épaules, j'aurais certainement l'information demain. Il était trop tard pour jouer les curieuses.

Je me glissais dans mon grand lit froid et m'endormais assez vite d'un sommeil lourd.

Mes rêves étaient toujours agités et il m'arrivait de me réveiller en plein milieu de la nuit à cause d'un cauchemar mais cette fois-ci, je savais que ce n'était pas la même chose.

Je me redressais d'un bond tremblante.

Le bruit d'une déflagration brève suivi d'une autre me fit comprendre qu'il se passait quelque chose de grave. Je n'avais jamais entendu un coup de feu de ma vie mais le son était suffisamment caractéristique pour le reconnaître.

Je m'étais à peine interrogée sur cette détonation que quelqu'un frappait doucement à ma porte. J'eus à peine le temps de sortir de mon lit que je reconnus la haute silhouette de Monsieur Rochester qui pénétrait dans ma chambre.

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"- Elisabeth..." commença-t'il d'une voix étouffée. "- J'ai besoin de savoir si je peux avoir toute votre confiance."

"- Mon Dieu, oui Monsieur. Que s'est-il passé ?"

Ses yeux avaient de nouveau pris cette teinte grise sombre qui montrait combien il était préoccupé.

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"- Venez, je vous en prie, et ne me posez aucune question, s'il vous plait."

La suite se passa dans un silence lourd et pesant. Monsieur Rochester m'avait précédé tout le long de l'immense corridor puis il avait pris l'escalier et était entré dans la grande salle à grandes enjambées. Je m'efforçais de courir pour ne pas le retarder. 

Immédiatement mes yeux se posèrent sur le corps à l'apparence humaine qui gisait sur l'un des divans du grand salon.

Je frissonnais à l'idée qu'il pouvait être mort.

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Sans vraiment me laisser le temps de faire marche arrière, je suivais Monsieur Rochester jusqu'au canapé.

"- Richard. Richard vous m'entendez."  commença le châtelain en posant une large main sur l'épaule de l'homme.

Je fus heureuse de voir que le dénommé Richard bougeât encore, il remuait légèrement la tête en guise de réponse. 

"- Elisabeth et moi allons vous aider à vous amener à l'étage, les chambres sont là-haut. Cela sera un peu douloureux mais nous allons faire le plus doucement possible."

Monsieur Rochester me dévisagea conscient que cette singulière situation m'affectait.

"- N'est-ce pas Elisabeth ?" me demanda-t'il doucement.

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Je lui répondais juste par un hochement de tête et un faible sourire un peu émue par la situation.

A notre approche le jeune homme avait tenté de se redresser, chancelant, il essayait même de se lever, le visage grimaçante de douleur. J'étais tétanisée par la situation, ne sachant pas exactement, quel rôle je devais jouer.

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Monsieur Rochester me fit un petit sourire puis il chercha à ce que je me concentre uniquement sur l'aide que je devais apporter au jeune homme : il avait vu que je tremblais malgré moi comme une feuille.

"- Allons-y, Elisabeth." me stimula-t'il vivement. "Je vais soutenir Richard par la taille tandis qu'il s'accrochera à votre épaule, d'accord ?"

Je lui fis un nouveau signe de tête, incapable de parler.

"- Vous entendez Richard. Agrippez-vous à Elisabeth autant que vous pouvez."

Le jeune homme eut un grognement en guise de réponse.

"- Je vais essayer de me débrouiller" tenta-t'il de dire avec un fort accent.

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"- C'est de la folie, Richard. Un geste de trop et vous ne passerez pas la nuit !"

En moins de deux secondes, Monsieur Rochester l'avait saisit par la taille tandis que que je m'approchais de lui pour qu'il entoure mes épaules. Tremblante, je constatais qu'une énorme tâche de sang brunissait son torse.

"Richard avait été touché par une balle !" constatais-je en moi-même réprimant toute surprise sur mon visage. Mais qui avait pu donc tirer au beau milieu de la nuit ? Et pourquoi Monsieur Rochester m'avait-il demandé de ne pas lui poser de questions ? Quel secret cachait-il donc ?

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Un flot d'interrogations bombardait mon cerveau à une vitesse insoutenable mais je n'eus pas le loisir d'essayer d'y répondre ou même d'avoir une quelconque théorie car déjà Monsieur Rochester m'indiquait la porte d'un regard assombri.

Avec toute la délicatesse possible, nous montâmes l'escalier jusqu'à la chambre la plus proche, c'était celle de Monsieur Rochester ! Le manoir comptait une dizaine de chambres inoccupées, elles s'étendaient tout le long du couloir les unes à la suite des autres dans l'aile gauche, et il y séjournait seul.

Personne n'avait le droit de traverser cette aile sans sa permission. Je ne comptais plus le nombre de fois où Madame Fairfax m'avait prévenu.

Malgré moi, je regardais la chambre spacieuse du Maître de maison décorée sobrement et j'appréciais le choix de la grande armoire à deux battants de chêne sombre, le coffre de bois ouvragé, et la haute cheminée.

Monsieur Rochester déposa Le dénommé Richard sur son lit, et je l'aidais en soulevant les jambes du jeune homme.

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Une fois assuré que le jeune Richard soit installé au mieux, il se tourna vers moi :

"- J'ai besoin de vous pour que vous restiez avec lui, Elisabeth, le temps que j'aille chercher le médecin. Veillez sur lui, parlez lui, veillez à ce qu'il ne s'endorme pas."

Il chercha quelque chose dans sa table de chevet et me le présenta:

"Ce sont des sels, tenez-le éveillé avec cela, en les passant sous son nez si vous voyez qu'il flanche. C'est un mixture qui a fait ces preuves, elle réveillerait un mort" osa-t'il plaisanter.

Il m'envoya un regard appuyé plein de gratitude malgré sa raideur, je reconnaissais entre mille les marques de la contrariété juste en détaillant les traits de son visage et sa mâchoire serrée.

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Pouvait-il être responsable ?

Richard ne manifestait pas d'animosité à son égard, bien au contraire, il était calme et docile avec Monsieur Rochester ce qui écartait donc immédiatement le châtelain de la liste des suspects.

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Sans cérémonie, Monsieur Rochester tira un pantalon bien rangé sur sa chaise qu'il enfila rapidement sur son sous-vêtement, se munit d'une lourde redingote grise, puis chaussa ses hautes bottes.

"Je n'en ai pas pour longtemps. Eclair est un puissant cheval, j'aurais rejoint la ville aussi rapidement qu'il soit possible. Tenez bon."

Monsieur Rochester devait voir que je cherchais à comprendre ces singulières circonstances car je restais pensive. Il prit un court instant pour revenir vers moi et me saisir les bras, il avait un léger sourire :

"- Merci Elisabeth. Merci énormément." 

Je sentis la pression de ses doigts dans ma chair.

"- Je sais que je vous en demande beaucoup mais votre rôle est indispensable. Personne ne viendra ici jusqu'à mon retour. Restez silencieuse, je vous en prie.  Ni Madame Fairfax ni qui que ce soit d'autre ne doit être au courant de cet incident. Si toutefois quelqu'un passe dans le couloir restez discrète. C'est entendu ?"

Je ne pus qu'hocher la tête positivement car déjà il était parti.

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Les heures furent longues. Je m'efforçais de maintenir le blessé éveillé comme me l'avait demandé Monsieur Rochester. Je pus noter qu'il avait un fort accent étranger et une couleur de peau plus marquée, il m'informa qu'il venait de la Jamaïque et qu'il était là pour affaires.

 Je n'en sus pas davantage, il avait manifestement lui aussi reçu des consignes de Monsieur Rochester et il ne voulait trahir aucun secret.

Tout se bousculait dans ma tête.

Peut-être que c'était un échange qui avait mal tourné ?

Peut-être que Richard et Monsieur Rochester faisait de la contrebande de rhum ou de café ?

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A part savoir que Richard s'appelait Mason et qu'il possédait une plantation là-bas au même titre que Monsieur Rochester et qu'il l'avait connu là-bàs, je n'en sus pas davantage.

Pas plus non plus quand le médecin arriva.

Monsieur Rochester s'empressa de me prendre la main et de me conduire hors de la pièce m'entrainant vers ma chambre.

Nous longeâmes en silence le long corridor vers l'aile droite du château. Puis sans faire de bruit, il ouvrit la porte de ma chambre avec d'infimes précautions puis me poussa gentillement à l'intérieur, tout restant sur le pas de la porte

Il me dominait de toute sa taille et je pouvais presque sentir les battements de son cœur tant il était proche.

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"- Le médecin va s'occuper de lui maintenant, vous n'avez plus rien à craindre. Richard quittera Thornfield dès qu'il ira mieux et poursuivra sa convalescence dans une chambre en ville, loin de toutes inquiètudes." commença-t'il pour me rassurer d'une voix douce.

Je baissais juste la tête en guise d'acquiescement. 

A l'extérieur, le chant du coq  nous ramena soudain à la froide réalité, à l'heure matinale qu'il devait être, à cette terrifiante nuit qui nous avaient maintenus tous les deux éveillés. Ses yeux prirent l'aspect d'un ciel tourmenté, et je pris conscience qu'il était encore au coeur d'une de ses tempêtes intérieures.

Il trembla, pinça la bouche, serra la machoire, bougonna :

" - Sa présence n'est aucunement désiré ici et elle ne fait qu'envenimer les choses. J'ai beau lui dire... mais il est aussi têtu qu'une mule. Cette fois, il en sera convaincu... Il ne peut en être autrement... Il ne reviendra plus... Elle va le tuer sinon..." marmonnait-il encore avec le regard d'un fou. 

Je pus voir un instant son regard gris se teindre d'un profond désespoir et discerner même les affres d'une profonde douleur qui semblait vouloir emporter sa raison. Mais l'instant fut de brève durée, aussi subitement qu'il était parti à l'intérieur de lui-même, il revint à l'instant présent, à moi, et son empathie reprit le dessus.

"- Je suis désolé d'avoir interrompu votre sommeil. Je suis désolé de vous avoir fait participé à tout cela, mais sans vous, qu'aurais-je pu faire, ma fidèle amie. Je sais que je peux au moins compter sur vous, n'est-ce pas ? Il est temps de reprendre le court normal de cette nuit. Il vous reste si peu de temps à vous reposer. Recouchez-vous maintenant."

Mais de qui avait-il parlé ? Qui aurait pu vouloir tuer Richard Mason ?

Je le fixais essayant de l'interroger mais il semblait avoir oublié ses propres mots et rien ne comptait plus que ses marques de bienveillance à mon encontre.

Je frissonnais m'appercevant que ma lourde chemise de nuit en lin n'avait pas suffit à vaincre le froid. J'éternuais.

"- Venez-là" me dit soudainement Monsieur Rochester en me prenant contre toute attente dans ces bras.

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Il me tint serrée contre lui pendant cinq bonnes minutes jusqu'à ce que sa chaleur m'innonde toute entière.

"- Vous voilà un peu réchauffée. Je m'en voudrais si vous tombiez malade à cause de moi."

Il me détailla et s’aperçut que j'étais sortie pieds nus.

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"- Qu'ais-je fait Elisabeth..." râla-t'il soudain.

"- Pourquoi vous avoir mis dans une situation comme celle là..."

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De nouveau sans que je puisse dire quoique que ce soit, il me souleva dans ses bras .

"- Je vous emmène jusqu'à votre lit." me dit-il doucement. "- Soyez tranquille, c'est fini."

Je me pressais contre lui appréciant l'intimité de cet instant, le froid m'avait glacé sans que je m'en rende compte, je grelottais, malgré moi. Le contre coup de toute cette histoire sans doute.

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"- Là. Réchauffez-vous et ne bougez plus maintenant." me dit-il d'un ton quasi paternel en me tenant dans ses bras. "- Tout va bien, vous avez été très courageuse."

Avec délicatesse il me déposa sur le lit et me recouvrit immédiatement cherchant même à me réchauffer à s'asseyant près de moi.

L'instant ne dura pourtant que quelques minutes déjà il se levait.

"- Bonne nuit, Elisabeth." me dit-il doucement. "- Merci de ne rien dire à Madame Fairfax."

Il baissait la tête et son dos était courbé sous le poids d'un secret qu'il ne souhaitait pas encore partager.

Je le rattrapais par la main.

"- Edward... Vous pouvez me parler, vous le savez. Vous avez l'air d'être si malheureux. Dîtes moi comment je peux vous aider."

Il plongea ses yeux dans les miens tout en reprenant ma main dans les siennes, il était manifestement touché par mon geste. Ses yeux avaient pris un éclat ardent, comme une fièvre soudaine qui venait de s'éveiller. J'eus un instant, le souffle court.

"- Elisabeth." murmura-t'il intensément. "-  Je ne peux pas décemment partager  mes ennuis avec vous. A quoi cela servirait-il que nous soyons deux à nous ronger les sangs.  Votre présence est déjà pour moi une réelle bénédiction, une planche de salut, un sauf-conduit. Soyez assurée que vous faites déjà beaucoup."

J'avais senti la pression de ses doigts dans les miens jusqu'à ce que ses larges mains les enveloppent entièrement.

Son regard soutenu me traversa toute entière.

 

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"- A demain" me dit-il simplement avant de quitter ma chambre.

Le silence envahit la pièce et je me surpris à suivre le bruit de ses pas jusqu'à ce que je ne les entendissent plus.

Cette nuit avait été particulière. Cela avait été le théâtre d'un nouveau huis clos. Un moment étrange où Monsieur Rochester s'était encore une nouvelle fois montré sans aucun artifice. Il s'était livré tout entier offrant sa fragilité et ses craintes sans penser à donner la meilleure image de lui et je me surprenais à apprécier son intégrité. J'esquivais consciemment l'extrême délicatesse qu'il avait eu pour moi, sa sollicitude, sa douceur et ses touchantes attentions comme l'ardente flamme que j'avais vu briller dans ces yeux lorsqu'il avait prononcer mon prénom.  

Cette nuit là, je trouvais le sommeil difficilement.

 

A SUIVRE...

26 février 2016

A le Recherche de Jane Eyre - Partie 4 -

Le bureau de Monsieur Rochester était au bout de l'escalier.

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Je me présentais devant lui vêtue la même robe sobre, prêtée par Madame Fairfax. Une robe "convenable" avec un bustier de dentelle blanche bien serré au col et aux manches et une longue jupe en velours mauve foncé qui avait appartenu à une de ses nièces trop tôt disparue.

Monsieur Rochester portait une longue redingote noire sur laquelle ressortait une belle cravate de soie bleue-nuit nouée avec élégance, il m'attendait bien calé dans son fauteuil de velours sombre. Je lui trouvais juste les traits tirés et contrariés.

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"- Voilà donc, ma jeune inconnue." commença-t'il par m'accueillir d'une voix posée et basse alors que j'avançais à petit pas vers lui.

"- Je croyais que vous aviez décidé de nous quitter... depuis tout ce temps. Non ?" 

Il marqua une pause tandis que je choisissais de m'arrêter à plus d'un mètre de lui et de rester silencieuse.

"- Madame Fairfax m'a dit que vous avez accepté d'être l'institutrice de ma fille Adèle. Voilà une surprise bien étrange..." continuait-il d'une voix piquante. 

Il avait même une moue dubitative et les yeux plissés comme si il n'en croyait pas un mot.

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Il brisa le silence après m'avoir juchée des pieds à la tête, méfiant, le regard toujours interrogateur devant mon mutisme.

"- Présentez-vous et annoncez-moi ce à quoi je suis sensé avoir dit Oui en vous acceptant sous mon toit." dit-il d'un ton soudain péremptoire.

Je restais un moment saisie par le scepticisme du ton puis je me décidais enfin à lui répondre :

"- Je suis Mademoiselle Prince, Elisabeth Prince, et vous m'employez depuis deux mois maintenant pour être la préceptrice de votre fille, Monsieur." dis-je le plus simplement possible.

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Il tempêta en me faisant sursauter :

"- En voilà une belle affaire !"

Il bougonnait :

"- Et qui a décidé de cela ? Madame Fairfax, forcément !"

J'étais estomaqué par sa réaction lui, qui semblait toujours apprécier les choix de Madame Fairfax. Pourquoi pas celui-là ? Son hostilité à mon égard me fit frisonner malgré moi.

"- Revenons aux tâches pour laquelle vous avez été employées, Mademoiselle." dit-il d'un ton sec et de nouveau distant. 

"- Parlez-moi de l'enseignement que vous prodiguez à ma fille afin que je juge si vous êtes la personne qualifiée pour Adèle. Madame Fairfax m'a laissé entendre qu'elle apprenait le Français avec vous. C'est exact ?"

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"- Oui, Monsieur, c'est exact."

J'essayais tant bien que mal de ne pas me laisser intimider par son ton autoritaire.

"C'est bien." dit-il d'un ton dégagé. "La mère d'Adèle était française et je ne vois aucun mal à ce qu'elle apprenne sa langue maternelle."

J'avais à peine pris une respiration de soulagement qu'il continuait caustique :

"- Néanmoins, je n'approuve pas les manières françaises..." s'empressa-t'il d'ajouter, mordant.

"- Je les trouve pour ma part subversives. Et je ne souhaite pas qu'Adèle soit éduquée sur ce modèle. Est-ce clair ?"

Il m'affronta du regard comme si il s'attendait à ce que je réplique mais de nouveau ma bouche resta scellée et je gardais la tête basse.

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"- Avez-vous des références ?" continua-t'il soudain.

"- Ma mère est française, Monsieur." dis-je en bravant sa réaction. 

Il me dévisagea, le visage agité par le soubresaut nerveux de sa lèvre supérieure :

"- Et vous pensez que parce que votre mère est française, vos références sont suffisantes ?" me dit-il avec une moue encore désapprobatrice.

Il se cala au fond de son fauteuil tout en dépliant les jambes et me força par son attitude désinvolte à le regarder.

"Je ne crois pas, Ma chère." osa-t'il répliquer moqueur avec un bon accent français.

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Il continuait d'un ton dégagé :

"- J'ai besoin de m'assurer que vous ferez d'Adèle une jeune fille comme il faut, c'est cela qui m'importe."

Je tentais de me redresser encore plus serrant mes mains les unes contre les autres, le menton droit et fier :

"- Je me suis appliquée à enseigner à Adèle les rudiments qui conviennent, Monsieur, la lecture, l'écriture, le calcul, j'espère pouvoir lui enseigner aussi la géographie, l'histoire et la littérature. Adèle a un réel engouement pour la France, en plus de lui apprendre cette langue, j'avais à cœur de lui faire connaître plus largement les Lettres et les Arts qui font la fierté de ce pays."

Sceptique, il se leva de son fauteuil, les mains placées derrière le dos, et le visage pensif.

Il continua d'une voix sèche, le front ridé par la contrariété.

"- Vous m'en direz tant ! Mademoiselle." continuait-il en français.

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"- Hum... Quel âge avez-vous au fait ? 20... 21 ans... ? Et vous prétendez être capable d’éduquer une fillette de 8 huit ans qui est tout juste à peine moins âgé que vous ?

Il continuait d'un ton catégorique sans même m'accorder d'attention ni attendre de réponse :

"-  Comment Madame Fairfax a t'elle bien pu penser que vous seriez qualifiée pour pour prendre en charge l'éducation de ma fille !" monologua t'il entre ses dents.

Il s'approcha de moi de toute sa taille comme pour m'impressionner. 

"- Vous semblez vous même encore avoir besoin d'une préceptrice..." lança t-il en me toisant. "Tout juste sortie des jupons de sa mère..."

Il haussa les épaules me détaillant encore de la tête au pied. Jamais homme ne m'avait humilier à ce point là en me rappelant si pesamment notre différence d'âge. Je blêmissais.

 "- Et combien me coûtez-vous par jour, Mademoiselle Prince ?" continua-t'il d'une voix sévère.

J'eus un moment le souffle coupé par cette réplique cinglante et j'en restais littéralement bouche-bée et sans réaction.

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Il continuait arrogant et théâtral :

 "- Bien sûr c'est le cadet de vos soucis, n'est-ce pas !"

Il ne me laissa pas le temps de répliquer accaparant de nouveau la conversation, bien décidé à la monopoliser par tous les moyens. Il poursuivait d'un ton cassant :

"- Combien je vous paye, Mademoiselle Prince ?" recommença-t'il à demander encore d'une voix rauque.

"- 15 livres Monsieur, pour le mois." répliquais-je la voix mal assurée.

Il eut un silence où il me regarda avec insistance.

"- Et alors. Ce n'est pas assez ?"

Il feignait soudain l’inquiétude ce qui me fit réagir malgré moi :

"- Bien sûr que si, Monsieur ! Je vous remercie. J'ai tout ce qu'il me faut ici." affirmais-je la tête basse.

"- Ah..." soupira-t'il "Je préfère çà. J'ai cru que vous cherchiez vous aussi à me ruiner."

Il me regarda amusé par sa propre plaisanterie puis il chercha mon regard.

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Il continuait d'un ton inquisiteur :

"- Madame Fairfax m'a dit que vous êtes américaine, journaliste en plus, une femme indépendante, n'est-ce pas ?" continua-t'il après une longue minute de silence.

"- Qu'est-ce qui vous retient donc, ici ? Pourquoi ne pas avoir regagné Londres immédiatement ?"

Il se tenait maintenant debout face à moi avec la même volonté de ne pas lâcher mon regard. 

Ses yeux aciers brillaient avec intensité examinant les traits de mon visage un à un comme pour y chercher les signes d'une quelconque forfaiture.

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Il accrocha mon regard malgré lui :

"- J'avais besoin d'un salaire, Monsieur. C'est pour cela que je suis restée." rétorquais-je naturellement.

"- Tiens donc ! Ce qui veut dire que dès que vous aurez suffisamment d'argent, vous nous laisserez tomber moi et Adèle !" l'entendis-je marmonner alors qu'il s'était tourné un instant pour tisonner le feu.

Je sursautais, surprise par cette réplique étrange. Je doutais même l'avoir bien entendue.

"- N'est-ce pas ?" insista-t'-il  en se plantant de nouveau vers moi.

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Prise au dépourvue, je répliquais avec franchise :

"- A vrai dire, je ne sais pas, Monsieur."

Il glissa vers moi comme un serpent sur sa proie susurrant de nouveaux mes propres mots :

"- Vous ne savez pas ?" répéta-t'il comme pour lui-même. "- Comme c'est étrange."

J'étais de plus en plus intriguée par sa façon de conduire notre entretien. 

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Me voyant de nouveau silencieuse, il poursuivit d'une voix basse :

"- Je suis surpris à vrai dire. Je pensais que vous seriez partie pour Londres ou Baltimore comme tous les jeunes gens de votre âge. Vraiment. Encore plus quand j'ai su par Madame Fairfax que vous étiez journaliste... Je n'ai véritablement pas cru que vous ne seriez pas intéressée pour demeurer ici à Thornfield et encore moins que vous envisageriez d'être la future préceptrice d'Adèle..."

 

Il me lança un long regard appuyé comme dans l'attente d'une réponse.

 

"- Je n'y avais pas songé non plus pour être franche" répondis-je enfin.

"- Cette offre d'emploi a été une aubaine pour moi. Je vous l'ai dit, j'avais besoin de m'installer quelque part, d'avoir un salaire. Ce travail me plait beaucoup et croyez bien que je veux m'y investir pleinement."

Il me scrutait encore fixement cherchant encore à savoir si je lui cachais quelque chose, je me décidais de continuer à parler pour le convaincre :

"- J'aime l'atmosphère de Thornfield, sa sérénité. Je sais que je ne trouverais pas cela à Londres ni à Baltimore d'ailleurs et, j'ai besoin de cela pour me sentir bien et pour écrire."

Il me fixait intrigué puis eut un moment de profonde réflexion avant de répliquer :

"- Ah bon  ! Vous sentir bien  ? Pour écrire ! Et qu'écrivez-vous donc ! Des articles ? Les journaux sont des ramassis de bêtises qui ne servent qu'à monter les gens les uns contre les autres."

Je tempérais la discussion en usant d'un ton plus doux :

"- C'est une façon de voir les choses Monsieur. Mais peut-être servent-ils seulement à mettre en lumière les conditions différentes des gens entre eux. Et c'est utile de ne pas les ignorer à mon humble avis."

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 "- Tiens donc ! Vous avez même une opinion à ce sujet. La condition humaine ! Je ne crois pas qu'en Amérique les gens soient mieux traités qu'ailleurs, pourquoi venir ici pour le dire ?"

"Ce n'est pas dans mon intention de créer des polémiques, Monsieur, mais seulement de mettre en évidence des différences sur lesquelles nous pouvons réfléchir..."

"Des différences ! Quelles différences ? Que souhaitez-vous donc revendiquer, Mademoiselle Prince !"

Il me regardait le regard accusateur mais paradoxalement attentif :

"- Il y a tant de choses à dire, Monsieur. Il suffit de regarder. Les riches, les pauvres, les femmes, les hommes, la société dans laquelle nous vivons... Vous-même semblez avoir des idées bien arrêtées sur ce sujet...."

"- Qu'en savez-vous donc, petite insolente !" gronda-t'il d'une voix faussement fâché.

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"- Je n'ai pas distribué les rôles comme vous semblez m'en faire le procès. La nature s'impose d'elle-même : les femmes au foyer et les hommes au labeur. C'est vieux comme le monde ! Et je n'y suis pour rien ! Le reste est une question de naissance, pourquoi discuter ?"

Il leva les épaules et continua curieux :

"- Parce que j'ai mis en cause votre capacité à pouvoir enseigner, vous pensez que je n'autorise pas une femme à avoir de l'ambition ? Que je ne suis pas capable d'empathie vis à vis de mes compatriotes ?"

Je souriais malgré moi :

"- Je crois bien que oui, Monsieur."

Il sembla soufflé par mon insolence mais me laissa poursuivre soudain intéressé par la suite de mon raisonnement.

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"- Vous accordez à mon âge, une forme d'immaturité que vous ne m'auriez pas donné si j'avais été un garçon. Vous pensez que je serais incapable d'enseigner parce que vous doutez de ma bonne moralité, et cela depuis que vous m'avez trouvé au beau milieu des bois. N'est-ce pas ?" 

Il fut surpris par mon discernement mais ne me contredis pas.

"- Peut-être. Et alors ?"

"- Vous avez donc des préjugés ! lui dis-je seulement. Je peux vous assurer que mes vingt-quatre ans me rendent tout-à-fait apte à prendre en charge l'éducation d'Adèle et bien que nous nous sommes rencontrés dans des circonstances peu avantageuses pour moi, ma réputation est sans tâche."

Il semblait se raidir, percé à jour. Ses yeux croisèrent de nouveau les miens. Je soutenais son regard :

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"- Deux mois n'ont-ils pas suffit à vous donner la preuve de ma totale bonne foi ?" continuais-je.

De nouveau, il me fixa longuement surpris par mon discernement mais encore incapable de m'offrir sa confiance.

"- C'est possible mais les nouvelles ne vont pas si vite que çà..." ajouta t'il un peu las.

Je me raidissais abattue par sa méfiance. Il parut s'en rendre compte.

"- Je suis désolé, Mademoiselle Prince mais mon passé ne m'a pas vraiment encouragé à faire confiance aux femmes. Ne vous sentez pas coupable, c'est juste un fait. Rien de personnel."

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Il avait pour la première fois détourné le regard, conscient qu'il était à l'origine de cette suspicion qu'il avait à mon encontre.

J'avais tout à loisir de contempler son regard gris maintenant perdu dans le vague, son visage décomposé, sa mâchoire serrée, son sourire figé, son corps tout raidi comme une statue de marbre, visiblement prisonnier de démons invisibles. 

"- C'est simplement une question de survie..." marmonna-t'il seulement brisant le silence.

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Il fit volte face apparemment bouleversé.

Maintenant il avait la tête basse comme si il était las du nombre de ses années ; même sa haute stature était voûtée à l'image du poids qu'il semblait avoir sur les épaules.

Je fixais l'unique mèche de ses cheveux noirs qui avait glissé vers l'avant. Il ne prenait plus soin de la rabattre en arrière.

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Il dût sentir que je le fixais car il détourna légèrement la tête vers moi. Il avait un petit rictus sur les lèvres et le regard vide, perdu. Son air tragique me paralysa.

Son passé semblait le rattraper et l'écraser de plus en plus. Il avait la mine assombrie et le cœur chaviré par une tempête intérieure qui semblait vouloir se déchaîner. 

"- Souhaitez-vous que je vous laisse seul, Monsieur ?" demandais-je d'une voix mal assurée.

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"- Non." répondit-il seulement d'une voix basse.

J'étais intriguée par ses yeux tourmentés et cette flamme étrange qui y dansait, j'avais presque envie d'entendre son histoire, entendre les causes du malheur qui emprisonnait cet homme, l'empêchant d'offrir spontanément sa confiance mais il n'en fut rien.

Il n'avait pas décidé d'en dire plus. Son regard s'était assombri et toute fragilité avait maintenant disparu de son regard, seule sa voix basse et quasi inaudible témoignait encore de son émotion.

"- Si vous quittez cette pièce de votre propre chef, vous me manquerez ouvertement de respect." continuait-il dans un souffle.

Il y eut un court moment de silence puis las, il continua :

"- Et je ne vois pas alors comment je pourrais vous confier l'éducation de ma fille si vous ne savez pas respecter nos usages."

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Je voyais bien qu'il cherchait encore quelques raisons désespérées pour me prendre en faute et éviter de m'embaucher.

Je décidais simplement de m'excuser :

"- Je regrette, Monsieur, je voulais pas vous manquer de respect. Je l'ignorais."

Il eut un petit éclat de rire comme pour lui-même, peut-être encore déstabilisé par mon attitude.

"- Savez-vous combien coûtent les enfants, Mademoiselle Prince ? Entre leur entretien et leur éducation ? Un bras ! Dieu me bénisse que je n'ai pas de femme à ajouter à l'addition, je serais ruiné !"

"- Je le sais, Monsieur. J'en suis parfaitement consciente." continuais-je d'une voix posée et compatissante.

Il me tournait toujours le dos comme si il était incapable de me faire face et il s'entêtait :

"- Ce sont les filles qui coûtent le plus cher" marmonnait-il encore la mâchoire serrée et le regard aigri. "Entre les robes, les chapeaux, les bas, les cahiers, les peintures, les toiles, les broderies, les fils en or ou en argent, ma bourse ressemble à un puits sans fond que jamais aucune heure de travail ne pourra combler !"

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"- C'est pour cela que je garde Adèle à la maison, ma rente ne suffit même pas à lui trouver une bonne place dans un pensionnat... encore moins à la présenter tous les mois dans le monde. Et c'est pour cela que je cherche une préceptrice... vous comprenez ?"

Je n'osais rien dire devant son réel désarroi.

"- Dans à peine dix ans, je veux qu'elle soit prête à se marier et qu'elle quitte ma maison. C'est tout."

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"- Vous devez me trouver bien insensible, n'est-ce pas ? Mais je n'ai pas le choix, je n'ai pas voulu garder cette enfant. Je le fais seulement par devoir et parce que j'en suis responsable."

Il poursuivit d'une voix monocorde dénué de tout sentiment :

"- Voilà ce que j'attend de vous, Mademoiselle Prince, que vous fassiez d'elle une parfaite épouse. Rien de plus. Si j'apprends d'une quelconque manière qu'elle se refuse à ce destin et que vous en êtes la cause, je devrais vous renvoyer."

 

Il mit sa phrase en suspens pour faire bien peser les termes du contrat sur lesquels il s'engageait avec moi.

 

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"-  Je ne vous le cache pas que j'aurais préféré une préceptrice plus âgée," marmonna t-il sans aucune expression . "Pas une toute jeune personne comme vous... et encore moins une américaine indépendante avec je ne sais quelles idées dans la tête !"

Ses paroles claquèrent comme un nouveau coup de semonce.

Mes mains serrèrent le taffetas de ma robe jusqu'à faire blanchir la jointure de mes mains paralysée par sa froideur.

Je frémissais sous son regard perdu redoutant encore ce qu'il allait dire, il était clair qu'il restait manifestement méfiant à mon sujet et clairement opposé au choix de Madame Fairfax, il continua d'une voix ferme :

" - Je ne tolérerais pas que vous montriez le mauvais exemple sous mon toit ou que vous apportez un regard nouveau sur la société à ma fille, Mademoiselle Prince. Laissez vos observations de côté où pour moi si vous avez envie d'en débattre, je serais toujours prêt à vous écouter si vous le souhaitez. En ce qui concerne Adèle, j'attend de vous une conduite exemplaire et irréprochable... Et ce point n'est pas négociable."

Il s'était, cette fois, retourné vers moi, donnant à sa phrase une profonde et intransigeante intensité plongeant ses yeux gris aciers dans les miens :

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"Avez-vous envisagé de sortir, Mademoiselle Prince avec des gens de votre âge ?" susurra-t'il d'une voix étrange tout en accrochant mon regard.

J'étais si surprise que je ne pouvais répondre, quasi tétanisée par son étrange question.

"- Avez-vous l'intention de sortir avec des gens de votre âge" répéta-t'il les dents serrés.

J'avais presque l'impression de sentir l'étau de ses mains sur me poignets tant il me barricadait de tout son corps.

Était-il question de ma liberté ou celle d'Adèle ?

Je me sentais soudain devenue prisonnière de mon rôle, mais à la fois incapable d'avoir la patience et la dévotion de Jane Eyre.

Devais-je crier haut et fort que j'étais une femme libre et qu'il n'avait pas à décider de mes faits et gestes et mettre un terme à toute cette farce ?

Mon esprit se concentra sur Monsieur Rochester. Ma recherche sur Jane Eyre.

1836. 

1836 ! me répétais-je en moi-même.

Il l'avait dit : tout cela n'avait rien de personnel... C'était une place pour laquelle il était tout bonnement extrêmement exigeant. Rien de plus.

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Mais Monsieur Rochester continuait sa litanie anxieuse, le visage livide :

"- Que ferais-je si vous avez des besoins, des dépenses et si vous envisagez de sortir comme toutes les jeunes filles de votre âge ? Croyez-vous que je pourrais subvenir à tout cela ?"

Mon long silence commençait par lui donner raison, et il était blême comme si il s'attendait à ce que je lui tienne tête et que je confirme ses craintes à mon sujet.

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 "- Je suis bien consciente de tous vos efforts, Monsieur. Mais n'ayez aucune inquiètude, je n'ai pas l'intention de vous demander quoique ce soit de plus." dis-je d'une voix blanche.

Avais-je vraiment dit cela ?

Même lui ni croyait pas. Je dus insister :

"J'ai à cœur de respecter toutes les règles de conduite que vous m'imposerez, Monsieur. Quant au salaire que vous me donnez, il suffit amplement à mes dépenses, rassurez-vous, je ne vous demanderais pas davantage d'argent sans que cela soit pleinement justifié."

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Il haussa un sourcil, et parut soudain amusé par mon effronterie malgré cette discussion plus que tendue :

"- Tiens donc et qu'est-ce qui justifierait que je vous paye plus s'il vous plait ?"

En un instant, il était devenu une autre personne et son visage taciturne était marqué maintenant d'un élégant sourire. Il me regardait avec curiosité et intérêt.

J'osais le regarder à mon tour, heureuse d'avoir capturé son attention.

"- Et bien, le compte de nouvelles heures de service, par exemple, si vous prolongez nos entretiens comme celui-ci, Monsieur." 

"- Comment !" dit-il en feignant d'être outré. "- Ses heures là ! Vous les compteriez à ma charge !"

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"- Et comment, Monsieur ! Où est donc mon temps de repos dans tout cela ?"

"- Vous ais-je laissé penser que vous étiez en service, là, Mademoiselle ?" continuait-il gouailleur.

"- Un peu, Monsieur. A force de me tenir droite, debout, les mains derrière le dos à vous écouter, j'en attrape des crampes. Je suppose que c'est bien signe que je suis en service, non ?"

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Il éclata d'un rire franc dégagé soudain de toutes ses préoccupations. Il me dévisageait d'un air narquois rejetant la tête en arrière, le visage rajeuni de dix ans, son air ténébreux et soucieux avait fait place à un faciès souriant et serein.

"- Relâchez-vous que diable." osa-t'il taquin.

Je lui souriais simplement en tentant une pose moins solennelle.

"- Voilà qui est mieux !" se lâcha-t'il à dire. 

Il me fixa un long moment silencieux, surpris par le grand sourire que je lui renvoyais.

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"C'est bien convenu entre nous, Mademoiselle Prince. Comme il n'est pas question que je vous paye des heures de service en plus, nos entretiens auront à l'avenir un caractère plus privé..."

Il me fixa de ses yeux gris acier comme si il attendait mon approbation.

"- Je crois qu'il sera plus raisonnable d'écourter nos conversations et d'aller seulement à l'essentiel, Monsieur." dis-je embarrassée.

Il me regarda fixement, presque flatté d'avoir réussi à me faire rougir.

"- Écourter nos conversations ! Allez à  l'essentiel !" reprenait-il avec emphase. "Non. Décidément. Non. J'aime beaucoup trop discuter avec vous, Mademoiselle. Vous êtes si... différente." 

Il eut un air entendu et rasséréné, il poursuivit comme si il établissait une liste :

"- Nous nous verrons dans le jardin, dans la Salle d'Apparat" dit-il soudain comme pour lui même. "Partout sauf dans le bureau, quand dîtes-vous ?"

J'étais si surprise par sa réaction enfantine que j'acquiesçais simplement.

"Comme vous voudrez, Monsieur."

Il me regarda fixement. 

"- Y a t'il quelque chose qui ne va pas ?" me dit-il soudain en me regardant attentivement. "- Vous avez une une petite ride qui se forme au-dessus de votre front... juste là ..."

Il se rapprochait de moi en l'indiquant du doigt.

"- Je crois déjà l'avoir aperçue la dernière fois quand vous étiez dans les bois... "

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Cette imprévisible candeur, cette  marque d'attention inattendue et sa soudaine proximité me déstabilisèrent d'un coup.

Il répéta :

"- Quelque chose ne va pas ?"

Je dus une nouvelle fois baisser la tête, fuir son regard avec de me lancer :

"- Et bien, je crois que nous n'avions pas fini notre conversation, Monsieur. Vous parlez de nos futurs entretiens mais je ne sais toujours pas si vous acceptez de m'engager comme préceptrice."

Il haussa les épaules :

"- Comment ça ?"

"- Et bien, oui, vous aviez l'air contrarié par cette nouvelle, et je ne sais plus du tout si vous voulez vraiment que je reste..."

 

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Il me dévisagea plongeant son regard dans le mien :

"- Et vous ? Avez-vous envie de rester ?"

Mon cœur fit un bond dans ma poitrine. J'avais encore cette impression étrange qu'il mettait un double-sens derrière ses paroles.

Rouge, je bafouillais :

"- Je vous l'ai dit, Monsieur, je serais ravie d'obtenir un...."

"- Salaire.... Oui. Oui, vous l'avez déjà dit." me coupa-t'il soudain.

De nouveau, il chercha mon regard me forçant à lever la tête vers lui et à le regarder.

"- Je vous demande autre chose, Elisabeth. Je vous demande si vous voulez rester ici à Thornfield avec Adèle et moi."

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 A suivre...

 

25 février 2016

A la recherche de Jane Eyre - Partie 3 -

Je me réveillais groggy.

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Madame Fairfax était juste à côté de moi et je sursautais de la voir encore vêtue dans sa longue robe victorienne. 

"- N'ayez pas peur, mon enfant" me dit-elle d'une voix douce en prenant ma main. "Tout va bien."

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Je n'en étais pas vraiment sûre.

Je jetais un regard circulaire à la pièce où je me trouvais. C'était une chambre de style moyenâgeux, si j'en jugeais le tableau accroché au mur, l'imposante cheminée et le spacieux coffre de bois posé au sol.

Les murs bruts de la chambre en vieilles pierres renseignaient de l'ancienneté du manoir qui dataient certainement de l'époque médiévale. 

J'étais allongée sur un lit rehaussé de plusieurs matelas épais et entouré de grosses tentures épaisses pendues sur ses quatre côtés comme cela se faisait à cette époque.

Seuls la commode, l'agencement d'un petit cabinet de toilette, d'un paravent, la facture des vases et des différents objets qui ornaient la pièce montraient que nous étions dans une époque plus contemporaine.

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Mon cœur se serra une nouvelle fois à la vue de ma chemise de nuit sobre en lin beige et de mes pieds nus.

J'avais beau sonder la pièce, je ne voyais toujours pas un seul signe de modernité, pas de lustre au plafond ni de lampe halogène, d'interrupteurs ou de prises électriques, de téléphone... 

Moi qui pensait avoir été la victime d'un mauvais rêve, le cauchemar semblait continuer.

Inutile de penser aussi que Madame Fairfax jouait un rôle, son front était marqué par l’inquiétude et elle semblait réellement bouleversée.

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"- Maintenant que vous êtes réveillée, je vais appeler le Docteur Evans pour qu'il vous examine" susurra doucement Madame Fairfax. "Vous m'avez fait très peur vous savez..."

Dans un bruissement de soie, elle glissa jusqu'à la porte et s’éclipsa l'instant d'une minute ou deux.

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Je sentis les larmes me monter aux yeux. Je dus prendre une grande respiration pour garder mon calme et ne pas me mettre à pleurer. Cette farce prendrait fin certainement d'un moment à l'autre, je devais être patiente c'est tout et, surtout ne pas montrer mon désarroi à mes hôtes.

J'appuyais ma tête contre l'oreiller douillet et tentais d'apprécier la mollesse du matelas sur lequel je me tenais, essayant de trouver un peu de réconfort matériel avant d'affronter les questions du médecin.

Madame Fairfax était sortie quelques secondes et déjà la porte s'ouvrait sur un homme d'une quarantaine d’année au visage sympathique.

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"- Voilà notre jeune étourdie" commença le médecin d'une voix aimable, tandis que je m'asseyais au bord du lit sous le regard toujours anxieux de Madame Fairfax. 

Le médecin saisit mon poignet avec délicatesse tandis qu'il sortait de l'autre une magnifique montre en or à gousset pour prendre mon pouls.

"- Vous semblez un peu nerveuse..." dit-il simplement. Il ajouta avec un sourire "mais c'est bien normal avec cette mésaventure..."

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Je ne savais pas quoi dire, je le regardais poser une large trousse de cuir marron au sol et sortir méticuleusement ses instruments pour son auscultation.

J'aimais je n'avais vu d'instruments médicaux si anciens ! Il saisit un stéthoscope long en bois clair et blanc parmi une poire en caoutchouc, un masque filaire et plusieurs instruments en argent.

Tremblante, je me  laissais observer et palper.

Après un examen général, il demanda à voir ma cheville toujours avec une voix douce et rassurante. Manifestement Madame Fairfax lui avait déjà tout raconté.

Après une courte observation de l’œdème, il sortit un carnet sur lequel il inscrivit quelques mots :

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"- Je vais vous faire préparer une pommade par mon assistant, cela soulagera l'inflammation. A appliquer matin et soir. C'est un cataplasme de graisse de porc, de pâquerettes, de cire d'abeille et d'huiles essentielles, un savant mélange qui a fait ses preuves pour les entorses. Il sera prêt demain, je vous le ferais porter par mon assistant. Jusque là vous avez ordre de rester au lit. Attendez que votre cheville soit guérie pour remarcher vous en aurez pour trois ou quatre jours, plus si vous insistez à marcher comme vous l'avez déjà fait."

Je pinçais de la bouche en réalisant que le médecin n'avait pas été dupe de la marche forcée que je m'étais imposée par orgueil vis à vis de Monsieur Rochester.

Madame Fairfax s'approchait de nouveau :

"- Je veillerais à ce que cette jeune femme fasse bien attention, Docteur. Vous avez ma parole." assura la vieille dame.

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Il eut un petit rire tandis que Madame Fairfax me glissait un regard entendu.

Le docteur serra la main de la vieille gouvernante avec un large sourire :

"- J'ai toute confiance en vous Madame Fairfax moins en cette intrépide jeune enfant..."

Déjà le médecin s'engouffrait à l'extérieur de la chambre.

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"- Je viendrais prendre des nouvelles de votre jeune égarée dans une semaine" continuait-il sur le chambranle de la porte de ma chambre.

"- Au revoir, Jeune Femme. Soignez-vous bien."

Je n'eus même pas le temps de répondre qu'il avait filer à l'anglaise suivi de près par Madame Fairfax.

Les minutes me parurent longues avant que la vieille femme ne reviennent.

Elle me surprit alors que j'essayais de me lever :

"- Oh là ! Malheureuse" gronda-t'elle gentillement "Recouchez-vous. Vous devez suivre à la lettre les ordres du médecin et ne pas bouger. Je vais vous apporter tout ce que vous avez besoin. Vous n'avez qu'à me le demander."

Je m'affaissais sur le lit. Qu'aurais-je pu faire d'autre ?

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"- C'est bien" déclara Madame Fairfax satisfaite. "Monsieur Rochester ne serait pas content de savoir que vous ne souhaitez pas guérir au plus vite..."

Cette phrase était encore pleine d'ambiguïté : qu'est-ce qu'elle voulait dire par là ?

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J'étais tellement prise au dépourvue de me retrouver dans cette situation incompréhensible que je ne trouvais rien à dire. De toutes les façons aucune de mes questions n'auraient pu obtenir de réponses. Je soupirais.

"- Je sais que ce n'est pas facile" commença Madame Fairfax "mais vous savez que vous pouvez me parler..."

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De nouveau, je ne comprenais pas ce début de phrase, Madame Fairfax semblait persuadée d'une chose que j'ignorais moi-même. Mon expression d'étonnement devait être si explicite qu'elle prit la peine de poursuivre.

"- Monsieur Rochester est allé voir du côté de la route, ce matin.... là où il vous a trouvé" commença-t'elle en prenant la main doucement "Il n'y avait pas aucune voiture accidentée... Avez-vous menti ?"

Je restais bouche-bée incapable de répondre. Je me demandais réellement si je disposais des bonnes réponses ne sachant plus du tout où je me trouvais ni avec qui j'étais.

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"- Je suis inquiète pour la réputation de Monsieur Rochester" continuait sa femme d'une voix amicale et posée "Il ne pourra se permettre de vous venir en aide plus du temps de votre guérison si vous avez fui votre domicile ou votre mari... Vous comprenez ?"

J'hochais de la tête, signe que je comprenais ce qu'elle me disait. 

"- Il a suffisamment d'ennuis comme çà..." marmonna-t'elle comme pour elle-même.

Je répétais sa phrase dans ma tête tout en me demandant comment Monsieur Rochester pouvait-il bien avoir des ennuis ?

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Comme elle restait silencieuse, je m'empressais de dire :

"Je suis désolée de vous causer de l'embarras à vous et à votre mari Madame Fairfax mais rassurez-vous je ne suis pas mariée et je n'ai pas non plus fugué du domicile de mes parents."

Madame Fairfax poussa un soupir de soulagement

"- Dieu soit Loué, Jeune demoiselle ! Dieu soit loué." répéta la vieille femme en posant une main sur son cœur.

J'eus un instant d'hésitation avant de lui dire  :

"- Je suis américaine, je m'appelle Elisabeth Prince, je suis journaliste. Je devais rencontrer le propriétaire d'un manoir non loin d'ici et je me suis perdue."

C'était la vérité pure et simple édulcorée seulement de son repère temporel.

"Une journaliste américaine !" remarqua Madame Fairfax ébahie. "Vous êtes bien loin de chez vous, Mademoiselle Prince."

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C'était une évidence mais lui entendre dire me fit du bien.

Il y eut un moment de silence où je percevais l'immense soulagement de Madame Fairfax. 

"- Voulez-vous prévenir quelqu'un, Mademoiselle ? Je peux vous chercher du papier et une plume si vous voulez préparer une lettre."

Je tressaillais à cette question mais j'essayais de donner une réponse assurée pour qu'elle ne ressente pas ma gêne :

"- J'ai choisi librement de me rendre ici, Madame Fairfax. Aucun journal ne m'emploie et je n'ai pas de famille. Vous n'avez rien à craindre de moi. Personne ne vous causera d'histoires."

Les Sims™ 3 Île de Rêve

Madame Fairfax prit une expression pensive :

"- C'est tout ce que je voulais entendre, mon enfant. Et sachez que pour moi votre parole suffit."

N'en était-il pas de même de Monsieur Rochester ?

La vieille dame ne me laissa pas le temps de lui poser de question, elle fit un pas sur le côté pour rejoindre la sortie rapidement.

"Je vais vous chercher quelques livres à lire pour vous occuper, et une collation aussi, je pense que vous devez avoir faim n'est-ce pas ?"

Je secouais la tête positivement :

"- Ce serait avec un grand plaisir, Madame Fairfax, merci beaucoup."

"- De rien, Ma Chère Petite... c'est bien normal."

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Madame Fairfax s'arrêta soudain net, elle fit volte face.

"Au fait. J'ai cru entendre que vous pensiez que Moi et Monsieur Rochester étions mariés, n'est-ce pas ?"

Je rougissais jusqu'aux oreilles.

"- Nous sommes d'une lointaine parenté seulement. Je suis l'intendante du domaine de Thornfield depuis qu'il est petit et je suis toujours fidèle à mon poste comme vous pouvez le constater."

Elle me lança un grand sourire :

"- Quant à Monsieur Edward Fairfax Rochester, il n'est pas marié mais il a la charge d'une petite Adèle. Vous la connaîtrez bien vite, elle brûle de faire votre connaissance. Si cela ne vous ennuie pas, bien sûr, elle viendra vous rendre visite."

Les Sims™ 3 Île de Rêve

Encore bouche-bée d'entendre toutes ses incroyables informations je répliquais enfin :

"- J'en serais ravie au contraire Madame Fairfax, j'ai bien peur de m'ennuyer à force de rester au lit."

Madame Fairfax eut un autre petit sourire.

"- C'est bien ce que je pensais !!! Ne vous inquiétez pas quand vous connaîtrez Adèle vous demanderez grâce et ne regretterez aucun de vos moments de repos."

Son rire cristallin s'évanouit derrière la porte et elle me laissa seule.

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Comme l'histoire était surprenante : Monsieur Rochester, Adèle, Madame Fairfax. Toutes ses personnes en chair et en os devant moi alors qu'ils étaient les personnages d'un livre. Étais-je entrain de rêver ? Peut-être que Jane Eyre allait surgir de derrière la porte...

Vivais-je un rêve éveillé ?

J'essayais de retrouver mon calme en m'allongeant et en fermant les yeux prise d'une nouvelle panique mais c'était peine perdue : trop de questions se bousculaient dans ma tête.

Incapable de maîtriser ce désir de réponses, j'eus soudain envie de me lever, pour chercher à voir dehors, chercher un journal, tout qui pourrait me renseigner sur la date du jour.

Ce fut Madame Fairfax qui me surprit une nouvelle fois en frappant à la porte et en entrant :

"- Voilà, Mademoiselle Prince, une collation pour vous remettre un peu de couleurs sur les joues."

Elle posa un magnifique service de porcelaine sur un guéridon placé à côté du lit.

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Tout en regardant de droite à gauche, elle sortit un journal roulé dans sa manche.

"- Je vous ai apporté le journal du jour. Je l'ai volé à Monsieur Rochester" s'amusa-t'elle "mais je suis sûre que vous apprécierez de le lire... Monsieur Rochester ne supporte rien de ce qui y est écrit, mais il aime bien y découvrir les dernières nouveautés, et cela le distrait. Je le remettrais dans son bureau d'ici ce soir, il n'y verra rien. Il s'est absenté pour la journée."

Je fus presque déçue d'apprendre que Monsieur Rochester n'était pas au manoir. Bizarrement sa compagnie me manquait. Lui et sa mauvaise humeur et j'en avais un violent pincement au cœur.

Madame Fairfax crut noter chez moi un changement d'humeur par mon regard car sa voix se radoucit encore plus :

 elsie28

"- A chacun de ses retours, Monsieur Rochester demande de vos nouvelles. Il sera heureux d'apprendre que vous êtes réveillée."

"- Vraiment ?" lui dis-je avec un petit sourire. "C'est vraiment gentil de sa part. Puis-je le remercier pour cette attention ?"

Madame Fairfax sembla apprécier que je lui dise cela :

"- Vous pouvez, à travers moi, Mademoiselle Prince. Monsieur Rochester est un homme célibataire, il ne sera pas convenable qu'il vous voit seul... tant que votre présence n'est pas justifiée."

 elsie29

Je baissais la tête, terrifiée par toutes ses convenances, et restait bien songeuse.

Je compris pour les jours suivants ce que voulait dire cette phrase car pas une seule fois il me fut permis de voir Monsieur Rochester. J'appris entre un soin et une collation qu'il était souvent parti pour affaires : deux jours, puis pour une semaine, et ensuite pour le mois, puis un autre.

 elsie30

Je fis pendant ce long moment connaissance d'Adèle, sa pupille. J'appris par Madame Fairfax qu'il s'agissait de la fille qu'il avait eue avec une ancienne maîtresse. Je comprenais pourquoi Madame Fairfax gardait jalousement Monsieur Rochester loin de ses congénères féminines. Elle avait trop peur que le pauvre se retrouve avec un autre enfant à charge. Je n'imaginais pas un homme tel que Monsieur Rochester capable de tomber dans un tel guet-apens mais peut-être qu'il devait son actuel cynisme à cette ancienne histoire ?  

Le journal m'avait renseigné de la date du jour : nous étions le 7 juin 1836. J'avais eu un tel coup au cœur que j'avais bien cru mourir sur le choc puis je m'y étais faite. Je n'avais pas le choix. J'essayais seulement de ne pas céder à la panique en me concentrant sur le présent. Et ce fut en premier : guérir et pouvoir remarcher.

 elsie31

Madame Fairfax me proposa ensuite un poste de préceptrice auprès d'Adèle afin de "justifier ma présence au manoir" comme elle aimait à me dire d'une voix maternelle. N'ayant rien d'autre à espérer et totalement prise dans ce tourbillon, j'avais accepté ce travail. 

Depuis j'avais le droit d'errer dans le domaine entre le jardin,  la salle d'étude, ma chambre où la cuisine, mais je n'étais pas convié dans la grande salle d'apparat, ni dans le bureau tant que le maître ne m'y avait pas convié.

 elsie37

Adèle était une petite fille d'une huitaine d'années pleine de vie et d’exubérance comme les enfants pouvait l'être  à son âge. J'adorais lui donner des leçons. Par chance j'avais été moi-même une élève assez douée et je pus lui servir d'institutrice sans problème pour l'apprentissage de la lecture, de l'écriture et du calcul. Madame Fairfax m'avait demandé quelques références supplémentaires avant de m'employer - "Il était impératif que la jeune pupille de Monsieur Rochester puisse se distinguer par plusieurs talents d'agrément afin de faire honneur à son père et plus tard à son mari" m'avait-elle dit avec rigueur. Je dispensais donc à la jeune enfant des cours de Français, de chant, et de dessin mais nous parlions aussi de poésie, de théâtre et de broderie. Je remerciais muettement ma petite enfance dans le sud de la France dans la famille de maman sur laquelle j'appuyais toutes mes connaissances.

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Je m'étonnais de pouvoir montrer à cette toute petite fille, moi femme des années 2000, comment accepter sa future servitude de bonne épouse et de bonne mère à renfort de bonnes manières et de bons usages. Je pus constater finalement que j'étais moi-aussi formatée à devenir implicitement "la même chose" si je me mariais. 

C'est au début du mois de Septembre que Monsieur Rochester se présenta de nouveau chez lui. A peine avait-il franchi les portes du domaine qu'il créa à lui tout seul une révolution dans le manoir.

Cela commença par la voix grave et forte de Lazarus l'homme à tout faire qui prévint toute la maisonnée que le maître arrivait.

"- Voilà, Maître Rochester !" héla t'il de ses deux mains jointes " - Le Maître est de retour !"

Ce fut un court moment de silence, une fraction de secondes où chacun s'assura qu'ils avaient bien entendu. Une attente où toute la maisonnée sembla se figer, juste pour entendre les pas du vieil homme qui claqueraient sur les dalles en pierre et le grincement de la lourde porte qui annoncerait et confirmerait la "bonne nouvelle" !

"- Oui ! Dieu soit Loué ! Le Maître était de retour ! "- Ces mots étaient sur toutes les lèvres créant le début d'un remue-ménage extraordinaire.

 elsie33

J'avais lâché mon livre, Adèle sa plume et son encre, quand la petite, le visage barré d'un grand sourire m'avait attrapée la main pour que nous nous précipitions dans le grand escalier à l'annonce de la nouvelle.

"- Avez-vous entendu, Mademoiselle Prince ! Papa est de retour" avait-elle dit simplement en tapotant ses mains et en m'attirant hors de la salle d'études.

La cuisinière, Madame Fairfax et moi-même tirée par la main d'Adèle, étions déjà dans la grande salle d'apparat, juste devant la porte, prêtes à l'accueillir, silencieuses et droites formant un rang bien serré d'employés et d'enfant modèle.

Je regardais leurs yeux pétiller de bonne humeur, leurs visages radieux qui racontaient encore la joie de revoir Monsieur Rochester et tout ces longs mois d'attente qui s'étaient soudain envolés au plaisir de le savoir de retour. J'étais finalement la seule à être anxieuse à l'idée de son arrivée.

Monsieur Rochester apprécierait-il de me voir ? Se souviendrait-il même de moi ? Serait-il d'accord avec Madame Fairfax pour que je sois toujours la préceptrice d'Adèle ? 

Mon cerveau n'arrêtait pas d'émettre des signaux d’inquiétude...

Je préférais penser à la course de la cuisinière qui à la vue de son tablier couverts de duvets blancs, avait dû lâcher la volaille qu'elle était entrain de plumer, pour courir de la cuisine et traverser les dépendances d'un bon train, juste pour nous rejoindre à temps tant elle était rouge et encore toute essoufflée...

Je voulais imaginer le pas lent mais tonique de Madame Fairfax, bien digne dans sa robe noire, qui s'était levée de son fauteuil quittant son ouvrage et son aiguille pour glisser avec élégance vers l'entrée.

Je préférais encore suivre Léah, la plus jeune servante du Manoir, le plumeau au poing, qui à peine descendue des chambres, s'était précipitée aussi pour nous rejoindre que de focaliser mes pensées sur lui. 

Lui. Pourquoi mon cœur battait si fort à l'idée de le revoir. J'imaginais son regard sombre et insolent posé sur moi, son dédain et puis soudain cette marque d'intérêt bref mais si flatteuse... Moi aussi je succombais finalement au charme de son retour.

 elsie41

Tandis que le cuisinière mettait une main sur sa poitrine comme pour contenir les battements de son cœur, que Madame Fairfax lissait le taffetas sombre de sa robe, qu'Adèle tirait sur ma main soudain incapable de retenir quelques sautillements, tandis que Léah ôtait à une vitesse impressionnante tous les draps blancs des meubles et fauteuils qui recouvraient la salle d'apparat, le cheval de Monsieur Rochester approchait dans la cour...

elsie35

Mon cœur se mit à battre la chamade quand j'entendis la voix du Maître saluer son fidèle serviteur.

Je frissonnais en entendant les bruits des pas du cheval puis ceux du Maître s'approcher. La haute silhouette noire enroulée dans un grande redingote en laine pénétra enfin dans le hall d'entrée emportant avec elle la fraîcheur de l'extérieur. Il claqua des talons et se secoua comme si il avait neigé, il avait froid sans doute...

elsie40

"- Ah !" s'exclama-t'il en nous voyant bien en rang devant lui. "- Quelle belle surprise ! Quel agréable accueil ! Moi aussi je suis ravi de vous revoir tous et toutes en bonne santé..."

Son regard sombre et appuyé fit rougir la cuisinière, Madame Fairfax et même Adèle. L'attention de Monsieur Rochester émoustillait toute la gente féminine du manoir même Léah qui était déjà revenue prendre sa place dans le rang.

"- J'ai hâte de me restaurer, Madame Pierce" lança-t'il à la cuisinière encore plus rougissante "- Votre bon ragoût m'a manqué. C'est encore possible ?"

"- Bien sûr, Monsieur Rochester, vous savez bien que j'ai toujours un ragoût sur le feu rien que pour vous." 

"- Léah" lançait déjà Madame Pierce "- Suivez moi nous allons servir le repas de Monsieur Rochester."

"- C'est cela même, Madame Pierce. Je serais dans mon bureau, tout près de la cheminée. J'ai grand hâte de me détendre un peu et de me réchauffer."

"- Vous viendrez quelques minutes avec moi Madame  Fairfax, j'ai quelques instructions à vous transmettre et des nouvelles en plus à vous donner, nous en parlerons ensemble voulez-vous..."

Il s'arrêta net comme si il avait senti mon regard sur lui mais il ne me regarda pas.

 

elsie45

 

"- Adèle... nous nous verrons demain mon enfant, je n'ai pas la tête à écouter vos babillages ce soir, vous m'en excuserez... De toute les façons, le soleil ne va pas tarder à se coucher, et je ne voudrais pas perturber vos habitudes et celle de votre nouvelle préceptrice... Bonsoir, mon Enfant..."

Sa main longue caressa d'un geste rapide les cheveux noirs de sa jeune enfant dont la tête baissée cachait la déception.

elsie44

"- Comme vous voudrez Papa. Bonne nuit. A demain, Papa" murmurait la fillette d'une voix chevrotante.

Ma gorge se serra sous ce manque évident de compassion et d'intérêt pour sa jeune enfant et tout ce qui la concernait car Monsieur Rochester claqua des talons pour se détourner vers le petit salon attenant sans un mot ni un regard de plus, ni pour Adèle, ni pour moi.

elsie47

Ce fut très tard et après ma journée de "travail" que je fus conviée à le rejoindre dans son antre car "il" avait demandé à me voir.

  A SUIVRE

22 janvier 2015

Comment s'enregistrer sur MOD THE SIMS ?

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1- Cliquez sur ce lien

http://www.modthesims.info/browse.php?tag=no+mosaic&go=Go&gs=2&f=38&gs=2

pour vous trouver sur le site MOD THE SIMS

 

 

2 - Cliquez sur SIGN IN en haut à droite

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3 - Vous ouvrez la fenêtre suivante, cliquez sur REGISTER NOW (s'enregistrez maintenant)

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3 - Ici, vous devez entrer votre date de naissance :

MOIS (Month) DAY (jour) Année (Year) ensuite vous validez en cliquant sur PROCEED

(Cliquez sur les flèches pour sélectionner votre mois de naissance, en anglais) 

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mod2

 

4 - Acceptez les règles du site en cochant "I have read, and agree to abide the MOd The sims Rules"

(«J'ai lu et j'accepte de respecter les règles du site Mod the Sims"

mod3

Copiez/collez le texte et placez dans un traducteur de texte si vous voulez savoir ce à quoi cela vous engage

Validez en cliquant sur PROCEED

 

5 - Remplissez le formulaire suivant :

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USER NAME :

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(si oui username ok continuez ; si non vous aurez  Username already taken ! Nom d'utilisateur déjà pris, choisissez-en un autre !)

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Email adress :

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- Confirmez-la une nouvelle fois dans la case blanche suivante (confirm Email address)

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- HUMAN VERIFICATION

ici, on vous demande de donner une réponse à une question précise afin de vérifier si vous êtes bien une personne (et d'éviter ainsi tout enregistrement illicite)

La question change à chaque fois : ici sur l'exemple... 

Quel est le nom de la première extension des SIMS 2, vous pouvez trouvez la réponse sur le wikipédia en cliquant sur le lien Wikipédia has the answer

UNIVERSITY, la réponse doit être donné en anglais, inscrivez-la dans la case blanche suivante.

Vous pouvez avoir d'autre question comme ....

In what year did the Sims 2 come out? En quelle année les sims 2 sont-ils sortis ? 2004

Comment faire ?

Copiez votre question et insérez-la dans google traduction par exemple, (c'est pas la meilleure des traductions mais cela devrait vous aider)

Cliquez sur le wikipedia (has the answer), si vous lisez sims 2 dans la question cliquez sur THE SIMS 2

sims1

 

 

Cherchez votre réponse dans le texte, la première date donnée est 2004.

Vous devez soit donner le nom de la première ou de la seconde extension des sims 2, ou 3. Cherchez par exemple ces mots dans le texte  (eights expansion packs - ici huit packs d'extension pour les sims 2), cliquez dessus et trouvez dans la liste celui que l'on vous demande. 

- Confirmez une nouvelle fois votre date de naissance MOIS, JOUR, ANNEE

mod6

- Ici vous devez selectionner votre fuseau horaire (time zone), il est déjà mis correctement fuseau horaire européen, ne touchez rien, DST automatique aussi, ne touchez rien,

- Cochez ou décochez pour recevoir les Emails des administrateurs (vous pouvez laisser comme çà)

- Cochez ou décochez pour recevoir les Emails des autres membres du site (vous pouvez laisser comme çà)

 

mod7

ICI cochez les jeux sims que vous possédez

- Cliquez surtout sur le jeu de base sims 2 et sims 3 et les extensions que vous avez achetées

- Cliquez enfin sur COMPLETE REGISTRATION, terminer l'enregistrement.

mod8

 

Vous obtenez ceci !

 

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28 août 2014

A la Recherche de Jane Eyre - Partie 1 -

Les Sims™ 3 Île de Rêve-001

Le réveil me tira d'un sommeil lourd.

6 heures du matin.

Je m'étirais sans bouger d'un pouce.

Peut-être que cette histoire me permettrait de grimper les échelons du magazine féminin "Girls Time" où je travaillais, qui sait ?

Partir sur les traces de Jane Eyre dans cette campagne anglaise du Derbyshire, c'est la mission que Joanna Lewis m'avait confié il y avait à peine quelques heures.  

Les Sims™ 3 Île de Rêve 

"- Il y a un renouveau en ce moment pour la littérature anglaise" m'avait-elle seriné tout en écrasant sa dixième cigarette "- Nos lectrices seraient ravies de découvrir un reportage traitant sur ce sujet. Alors, puisque tu es la seule journaliste de disponible, l'honneur te revient..."

Elle avait jeté une grosse enveloppe sur le bureau avec son dédain habituel. Et pendant de longues secondes, je m'étais demandée où pouvait bien être le piège.

Mais Joanna continuait sans sourciller, déterminée : 

Les Sims™ 3 Île de Rêve

"- Il y a un château du nom de Haddon Hall, près d'une ville qui s'appelle Bakewell dans le Derbyshire" avait-elle détaillée à mon intention tandis que je découvrais le contenu de l'enveloppe.

"- J'ai pris contact avec le maître des lieux, il s'agit de Lord Edward Manners, il a accepté de te recevoir pour une interview. C'est dans son château qu'on été tournées les scènes du film de Jane Eyre, tu auras donc de belles photos à faire là-bas."

 Les Sims™ 3 Île de Rêve-008

J'étais abasourdie. 

"- Je te dispense du retour sur l'orphelinat de Lowood, mais je veux que tu suives ses traces jusqu'à la lande si il le faut. Tu connais l'histoire au moins, Elsie ?"

Je sursautais.

Le contenu de l'enveloppe était comme une malle aux trésors pour moi : billets d'avion, billets de train, Pension, réservation d'une voiture, 100 livres en argent liquide, une manne pour une journaliste débutante comme moi.  

Les Sims™ 3 Île de Rêve-013

Je bégayais :

"- L'histoire ? Quelle histoire." Je rougissais jusqu'aux oreilles de ma maladresse."- Euh, pardon. Oui. Non. Enfin, j'ai vu le film, bien sûr, comme tout le monde."

Joanna me sondait silencieusement. 

La sueur commença à me couler dans le dos. Ma bourde allait-elle me coûter cette aubaine ?

"- Arf..." ragea Joanna "- Je n'ai vraiment que toi sous le coude alors ne me déçois pas."

Elle bondit de son luxueux siège de directrice, se tourna vers la bibliothèque attenante, saisit un vieil ouvrage en cuir usé, et le jeta sur le bureau jusqu'à moi.

 Les Sims™ 3 Île de Rêve

"- Tiens, prends-le. C'est la vraie histoire de Jane Eyre écrite par Charlotte Brontë, lis-la au moins. Comme cela tu n'auras pas l'air à côté de la plaque pour ton article."

Je me raidissais, la voilà qui se voulait désagréable, même si je l'avais méritée, je n'aimais pas du tout son ton piquant.

Elle le sentit immédiatement et comme toute bonne journaliste, elle se radoucit. 

Les Sims™ 3 Île de Rêve

"- Allez, mon intuition me dit que tu es la bonne personne pour cet article. Fais-moi honneur. Pense au Magazine."

Je m'étirais une nouvelle fois.

Elle avait passé plus d'une heure à me rappeler la charte journalistique du Girls Time : coincé mais pas trop, provoquant juste ce qu'il faut, dans le coup forcément, etc... etc... 

Les Sims™ 3 Île de Rêve -002

Je me levais enfin.

Pour une fois, j'allais être maître de mon article !

Je sautillais prise d'un élan de joie. Quelle chance pour une jeune femme d'à peine vingt-quatre ans. 

 Les Sims™ 3 Île de Rêve-003

Je rassemblais toutes mes affaires après avoir pris un copieux petit-déjeuner et une douche bien chaude. 

Mon périple commençait par rejoindre l'aéroport pour prendre un avion pour Londres.

Ensuite le train m’emmènerait de Londres à Nottingham et de Nottingham à Matlock. Là, après une nuit à l'hôtel, Joanna avait autorisé la réservation d'une voiture pour que je me rende directement à Haddon Hall.

Tout avait été savamment orchestrée par Norah, l'assistante du Magazine et chronométré à la seconde près. Je n'avais plus qu'à me lancer dans l'aventure !

 Les Sims™ 3 Île de Rêve-004

Je poussais la porte de mon appartement en ayant un soupir à la fois triste et enjoué, j'avais un petit pincement inexplicable au fond du cœur en tournant la clef dans la serrure et je ne savais pas pourquoi.

L'appréhension ?

Peut-être.

Je serrais mes bagages et descendait l'escalier.

Je sentais mon smartphone sous les doigts.

Personne à contacter ? Mes amies ? toutes des journalistes. Elles étaient déjà au courant de mon départ, inutile de les déranger. Mes parents ? De vieilles personnes bien trop fragiles qui s'épouvanteraient de me savoir partir seule à l'étranger. Si je voulais la paix, un silence total s'imposait. Un petit ami ? Mon mauvais caractère venait juste de m'en faire quitter un, et je n'avais pas le moins du monde envie de l'appeler même par courtoisie.

Les Sims™ 3 Île de Rêve-005

J'haussais les épaules enfouissant mon téléphone bien au fond de ma poche tout en resserrant mon manteau sur moi. 

Les Sims™ 3 Île de Rêve-006

Le taxi m'attendait déjà. Il avait été commandé la veille par la secrétaire du journal. 

J'étais à peine une demie-heure de l'aéroport et c'était tout à fait appréciable.

A cette heure les taxis roulaient bien, et je n'avais aucune inquiétude : je ne raterais pas le départ de mon avion.

Les Sims™ 3 Île de Rêve

Je restais silencieuse le long du trajet en taxi, répondant succinctement au chauffeur quand il m'interrogeait.

J'avais toujours cette incompréhensible et étrange impression qui me serrait la poitrine et, j'en ignorais toujours la raison.

Les Sims™ 3 Île de Rêve

Je laissais le taxi new-yorkais derrière moi en payant un bon pourboire comme pour me faire pardonner de mon attitude taciturne.

Cette mission me prendrait une quinzaine de jours pas plus, et je serais de retour avant même de me rendre compte que j'étais partie ! m'encourageais-je muettement.

Les Sims™ 3 Île de Rêve

Je levais les yeux vers le hall de l'aéroport, le tumulte n'allait pas tarder à m'happer à mon tour entre folle poursuite et répit. L'Angleterre !

Beaucoup de mes collègues auraient enviés ma place ! 

Je resserrais mes mains sur mes bagages que le chauffeur de taxi m'avaient gentillement posés sur le trottoir, il était temps de partir et de disparaitre dans la foule disparate des voyageurs.

Les Sims™ 3 Île de Rêve

Le voyage se passa sans encombre, chronométré comme sur du papier à musique, je pouvais remercier Norah et sa légendaire efficacité.

J'arrivais vers une heure de l’après-midi à l'aéroport de Londres pour prendre immédiatement un taxi en direction de la gare. A peine une heure après, je m'installais dans le train de la compagnie East Midlands qui m’emmènerait rapidement à la ville de Nottingham.

En milieu de journée, après avoir pris un taxi pour rejoindre Beeston, je prenais le dernier train qui m'emmenait pour mon ultime destination : la ville de Matlock, où enfin, je pourrais me reposer de mon périple.

La gare était un bijou traditionnel de vieux wagons et de vieilles locomotives que seuls l'Angleterre ou la France pouvaient avoir encore. 

Après une minute d'effarement, je saisissais mes bagages et prenait la route.

Les Sims™ 3 Île de Rêve

Je fus ravie de constater que la maison d'hôtes que Norah avait  choisi à Matlock, était à cinq minutes à pied de la gare. 

Les Sims™ 3 Île de Rêve

C'était une haute bâtisse de pierres à deux étages qui trônait dans une rue montante. Un escalier interminable conduisait à l'entrée. 

Les Sims™ 3 Île de Rêve

La pension semblait sortir d'un film d'époque de part son architecture victorienne incontestée. J'avais pu remarquer en descendant la rue que le petit village de Matlock semblait sortie d'une carte postale. Un plongeon dans le passé atypique certainement voulu par ma directrice de journal afin de m'immerger dans le livre de Jane Eyre.

Les Sims™ 3 Île de Rêve

Je fus immédiatement accueillie par la propriétaire et son fils qui étaient ravis de me compter parmi leur client privilégié. 

Je crus comprendre que la pension recevait peu de personnes et que Madame Leprestre ne disposait que de trois chambres qu'elle préparait elle-même. J'appris rapidement que le petit déjeuner et le dîner était compris sauf le repas du midi, nous laissant une liberté appréciable.

La pension possédait tout le confort nécessaire comme une connexion wi-fi qui me permettrait de commencer à envoyer mes premiers comptes-rendus à Joanna aussitôt que j'aurais visité Haddon Hall.

J'entrais dans une maison spacieuse décorée avec goût et transformée pour l'occasion en chambres d'hôtes.

Madame Leprestre s'était installée à son bureau pour faire l'enregistrement de mon arrivée tandis que son fils montait mes bagages à l'étage.  

Les Sims™ 3 Île de Rêve

Je pris connaissance des horaires des repas (sept heures et dix-neuf heures précises) comme de l'heures d'ouverture et de fermeture de la pension (sept heures et vingt-deux heures précises) horaire je ne devais manquer sous aucun prétexte sous peine de trouver les portes closes.

 

Madame leprestre semblait diriger sa maison d'une main de fer mais malgré ses attitudes sévères, car elle attendait que ses clients respectent les consignes à la lettre, elle usait de beaucoup de douceur un peu à la manière d'une grand-mère bien attentionnée mais intransigeante. 

Je me disais que cela devait être l'esprit de la maison et que j'y trouverais finalement mon compte.

Je profitais de la complaisance de Madame Leprestre pour m'indiquer les lieux intéressants à visiter en ville et dans les environs ce qu'elle fit sans se prier.

Au retour de son fils, elle fut heureuse de me donner les clefs de la voiture que Norah avait louer pour moi.

"C'est Morgan qui a été la chercher hier à Lancester" commença-t'elle d'une voix fière.

Les Sims™ 3 Île de Rêve

"Elle est garée dans la cour derrière la pension, vous pouvez la prendre quand vous voudrez..." Elle me remit les clefs avec un grand sourire. 

Je remerciais chaleureusement mes deux anges gardiens tout en prenant congé et gagnait la chambre qui m'avait été réservée.

La pièce était spacieuse, décorée à l'ancienne mode, un lit deux places, une grande commode, une psyché. L'ensemble était noyé dans une avalanche de lourdes tentures en velours qui bordaient toutes les fenêtres jusqu'au couvre-lit. Pas de doute, Madame Leprestre prenait soin de ses clients.

Je prenais mon courage à deux mains pour commencer à déballer mes affaires afin de me sentir plus à l'aise.

Les Sims™ 3 Île de Rêve

Je tombais, en sortant mes vêtements de la valise, sur le livre "Jane Eyre" que Joanna m'avait confié et que j'avais coincé entre deux de mes tenues préférées.

Peut-être serait-il bon que j'y jette un coup d’œil après le dîner, histoire de ne pas avoir l'air trop inculte devant le propriétaire d'Haddon-Hall lorsque je le rencontrerai. 

Les Sims™ 3 Île de Rêve

Je m’apercevais que Joanna avait partagé le livre en plusieurs partie : la première s'intitulait "Internat de Lowood", la seconde "Arrivée à Thornfield-Hall", la troisième "Monsieur Rochester", la quatrième "Famille Rivers" et la dernière partie "le retour de Jane". 

Les Sims™ 3 Île de Rêve

Joanna m'avait dispensé de lire la première partie qu'elle avait intitulée "Internat de Lowood".

Je me remémorais le rapide résumé qu'elle en avait fait.

Les premiers chapitres racontaient les débuts difficiles de la jeune héroïne qui avait été placée par une tante peu aimante dans un pensionnat aux conditions rudes et drastiques à la suite d'une injustice familiale.  

Bien que cet épisode avait façonné l'intégrité de Jane Eyre qui dès l'âge de dix ans avait été rebelle aux injustes traitements de sa tante et de ses cousins, ainsi que sa rigueur au travail et son attirance pour toutes les formes d'éducation, inspirant ainsi le caractère noble et entier de la jeune femme ; Joanna voulait que j'aille directement au but : je devais capturer l'admiration de Jane Eyre pour son "maître" Monsieur Rochester ainsi que celle de sa demeure Thornfield et comprendre comment au fil du temps, l'adoration de la jeune préceptrice, c'était transformé en un profond et sincère amour pour le maître des lieux.

Les Sims™ 3 Île de Rêve

Ma rédactrice en chef souhaitait que j'aborde directement l'arrivée de la jeune femme à Thornfield en m'inspirant du manoir d'Haddon-Hall pour donner à mon article toute sa dimension idéaliste car m'avait-elle expliqué la littérature romantique du dix-neuvième siècle rendait indissociable les lieux d'avec ses héroïnes et je devais m'imprégner de cet état d'esprit afin de transmettre à nos jeunes lectrices la nouvelle image romantique que Joanna voulait donner au magazine "Girls Time".

Les Sims™ 3 Île de Rêve

Comment une jeune femme de l'époque moderne pouvait prétendre à comprendre cela ?

Je ne comprenais pas qu'un lieu ou même un homme, aussi extraordinaires fussent-t'ils, puissent être capable d'inspirer de l'admiration, voire même de la passion jusqu'à insuffler en finalité le sentiment ultime.

En vérité, je n'étais même pas certaine que nos jeunes lectrices d'aujourd'hui puissent se sentir touchées par cette idéalisation de l'amour qui semblait surgir d'une époque révolue et correspondre à un mythe carrément dépassé et loin des préoccupations des jeunes filles actuelles.

Mais peut-être avais-je trop d'aprioris moi-même pour être impartiale. J'étais incapable de voir chez un homme autre chose qu'une source de tracas et de conflit permanent car mes relations avec eux se transformaient rapidement en pugilat.

Qui m'en voudrait de préférer ma liberté à une inévitable future servitude soit de ma personne ou de mes sentiments ?

Les Sims™ 3 Île de Rêve

L'amour semblait être comme un conte pour enfants que j'avais rangé et oublié au profit d'un accord d'entente commun où plutôt d'un "Comment bien vivre ensemble" sans trop déborder l'un sur l'autre.

Les Sims™ 3 Île de Rêve

J'haussais les épaules. Je n'étais pas certaine que Joanna ait choisi le meilleur auteur pour son article.

Je refermais le livre en soupirant fortement pour ouvrir en grand mes valises essayant de ne pas penser à comment s'était terminée ma dernière relation sentimentale. 

Les Sims™ 3 Île de Rêve

Je disposais rapidement mes vêtements dans la commode, histoire de défroisser tout cela et rangeais mes bagages vides.

Un petit coup d’œil à ma montre m'indiqua qu'il était à peine dix-huit heures. J'avais envie d'aller marcher dans Matlock afin de m'imprégner de l'atmosphère victorienne de cette ville anglaise. Au moins commencer par çà.

Comme une bonne pensionnaire, j'avertis Madame Leprestre que je dînerais chez elle à sept heures après m'être promenée. 

Les Sims™ 3 Île de Rêve

Je trouvais un agréable endroit ou flâner situé auprès d'une petite rivière, calme et peu bondé.

Les Sims™ 3 Île de Rêve

Je regrettais de ne pas avoir pris un carnet ou j'aurai pu déjà exprimer quelques unes des sensations que m'inspirait ce parc. Mais j'aurais certainement l'occasion d'y retourner.

Je déambulais dans les rues et remontait vers la pension, j'avais finalement hâte de manger, hâte de prendre une bonne douche chaude, et de me reposer au lit avec ce fameux livre.

Les Sims™ 3 Île de Rêve

Le dîner était divinement exquis, cuisiné par une experte qui méritait sa réputation de "Pension gastronomique" que vantait l'établissement. Je me ravissais d'une part de dinde grillée et de coleshaw associés à des pommes frites cuite délicatement au four et j'emportais quelques cookies maison pour "plus tard".

Une bonne douche bien chaude acheva d'accentuer la sensation de bien-être que j'avais déjà pour me débarasser des derniers désagréments dus à mon long voyage assis.

Les Sims™ 3 Île de Rêve

Un dernier coup d’œil dans la glace de la salle de bain me renvoya le reflet d'une jeune femme brune au teint de pêche, les yeux pétillants de malice prête à en découdre avec toute l’Angleterre si il le fallait !

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Je saisis le livre de "Jane Eyre" m'installait sur le lit douillet et commençait la seconde partie comme Joanna me l'avait demandé jusqu'à ce que les noms de Jane Eyre, de Monsieur Rochester, et de Thornfield-Hall se mélangent les uns avec les autres car je m'endormais comme une masse.

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Il était six heures du matin lorsque j'ouvris les yeux de nouveau, j'avais dormi d'une traite.

Une lumière douce baignait la chambre, et j'appréciais le calme qui régnait comparé à mon appartement new-yorkais : pas de voitures ni de circulation intense, pas de klaxons intempestifs ni de crissement de pneus, aucune sirène de police, ni même de pompiers. Juste le sifflotement d'un client dans l'escalier et les pas légers de Madame Leprestre. Je m'étirais appréciant ce moment de calme tout en visualisant mes prochaines heures.

L'odeur du café commençait à effleurer mes narines creusant mon estomac, j'avais faim.

Il était temps de se lever !

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Une bonne douche et un bon petit déjeuner après, je déambulais dans les rues tranquilles de Matlock pour me laisser envahir par le charme typiquement victorien de cette ville anglaise.

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Norah avait prévu mon rendez-vous avec Lord Manners pour la célèbre "heure du thé", j'avais donc le temps de m'imprégner des us et coutumes de mes voisins d'Atlantique. 

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J'achevais de me laisser baigner par ses diverses impressions tout en griffonnant quelques notes sur un carnet tout en rejoignant la terrasse d'un restaurant pour déguster un plat de de beignets de poulet .

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Je quittais le restaurant vers midi passé tant j'avais traîné à regarder autour de moi. J'aimais regarder tous ces gens affairés pour lesquels j'imaginais des vies trépidantes.

Je passais les deux dernières heures à fouiner dans les boutiques du coin, bavardant avec les commerçants pour dégoter des renseignements sur les meilleurs endroits à visiter.

Tout le monde se montrait sympathique et était ravi de discuter avec moi pour m'indiquer le nom d'un musée à visiter, ou d'un parc à absolument voir comme celui de Hall Leys Park.

Vers quatorze heures de l'après-midi, je regagnais mon hôtel.

Madame Leprestre était dans le hall, je profitais de sa présence pour lui demander des indications précises pour me rendre à Haddon-Hall.

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Ainsi je pourrais respecter rigoureusement l'horaire de mon rendez-vous car les anglais appréciaient la ponctualité. D'autant plus, si il s'agissait d'un lord.

Elle fut ravie de m'indiquer les directions à prendre afin que je ne m'égare pas mais à l'entendre c'était facile et rapide.

Rassurée, je remontais dans ma chambre pour prendre un manteau et échanger mon sac à dos contre un élégant sac à main.

Je saisissais mon portable que j'avais pris le temps de recharger pendant mon excursion, mon paquet de cigarettes et un briquet, et m'assurait de bien prendre mon calepin ainsi qu'un crayon et je rassemblais le tout sur le lit prête à partir.

A coup d’œil dans la glace me renvoya l'image d'une jeune femme américaine à la coiffure actuelle, un peu garçon manqué. J'avais maquillé mes yeux bleus pour leur donner un air frondeur et assuré. Ma première interview avec un lord anglais ! J'étais plutôt fière de moi. 

Je saisissais les clefs de ma voiture restées sur la petite table de chevet quand le téléphone sonna.

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La voix de Joanna retentit à mes oreilles :

"- Alors, Elsie, Prête ?"

Je faillis m'étouffer tant ma patronne me prenait au dépourvue. 

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"- Oui, bien sûr, comme toujours" mentais-je pour cacher les traces dans ma voix d'une panique naissante.

"- Euh, Elsie, Lord Manners m'a appelé ce matin, et..."

"- Et..." répétais-je bêtement en me disant que tout à coup mon interview de rêve allait tomber à l'eau.

"- Et, il m'a annoncé que le rendez-vous était décalé à dix-neuf heures ce soir..."

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Je restais sans voix incapable de dire quoique ce soit. Mes clefs de voiture retombèrent bruyamment sur la table. Joanna poursuivait d'une voix anormalement chantante :

"- Comme il se sentait gêné de te demander de venir si tard, il t'a élégamment convier à dîner puis à rester dormir au château ! N'est-ce pas une nouvelle magnifique !"

Joanna semblait plus excitée par la nouvelle que je l'étais moi-même.

"- Dîner et dormir" répétais-je seulement. 

"- Oui ! Franchement Elsie tu as une chance du tonnerre ! Que donnerais-je pas moi-même pour manger et dormir dans un manoir médiéval !"

Elle marqua une pause avant d'ajouter toute excitée :

"Penses à prendre une lampe torche ! On ne sait jamais ! Tu entendras peut-être des bruits étranges dans les couloirs une fois la nuit tombée ! Et Tu verras peut-être des fantômes ! Si tu reviens avec un autre scoop, je te nomme Meilleure Journaliste du mois !"

Des fantômes ? Joanna était-elle sérieuse ?

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Je la laissais continuer à parler toute seule prenant la résolution de saisir une chaise pour m’asseoir et me donner les recommandations d'usage jusqu'à ce que soudain, elle me hurle dans les oreilles :

"- As-tu au moins une tenue décente pour un dîner avec un Lord, Elsie ?" 

"- A vrai dire..." commençais-je.

"- Je m'en doutais." claqua t'elle dans l'appareil.

"- Il en va de la réputation du journal et des femmes américaines ! Je crois que tu as largement le temps d'aller t'acheter une belle robe."

"- Dépense sans compter" continua-t'elle comme une princesse "- Tu m'enverras la note personnellement."

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La conversation dura plus d'une heure ou elle me recommanda une tonne de choses à faire et à ne pas oublier.

J'étouffais un bâillement quant enfin, elle m'annonça qu'elle avait une "autre ligne qui sonnait".

Je raccrochais.

Déjà quatre heures ! Il fallait faire vite !

Je devais me rendre en ville à la recherche d'une boutique ou je pourrais acheter une robe "décente".

Madame Leprestre toujours prête à me rendre service, m'indiqua l'adresse d'une boutique ou je me pourrais dégoter la "perle rare".

J'eus bientôt une élégante petite robe noire bien cintrée avec des escarpins assortis pour une somme honnête. J'ajoutais juste un petit sac à main de cuir discret, histoire d'avoir l'air dans le coup.

Lorsque j'arrivais avec mes paquets sous le bras, madame Leprestre qui avait compris que je me rendais chez Lord Manners, s'offrit immédiatement de me repasser la robe.

"- J'en ai pour dix minutes à peine" me dit-elle "- Je mettrais votre robe dans votre chambre dès que je l'aurais repassée..."

J'eus à peine eu le temps de lui dire merci qu'elle avait déjà disparue dans les escaliers.

"- Ne perdez pas de temps, mon enfant" l'entendais-je dire "- Vous me remercierez plus tard"

Emue, je glissais dans ma chambre prendre des affaires de toilette et des sous-vêtements et profitais du temps qu'elle m'offrait pour prendre une douche.

Lorsque j'entrais dans la chambre une demie-heure plus tard, la robe m'attendait sur un mannequin magnifiquement repassée.

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Je me dépêchais de m'habiller puis de préparer une petite valise ou j'emporterais le minimum pour une nuit : une tenue complète de rechange pour le lendemain matin, mon nécessaire de toilette et mon manteau.

Je glissais la lampe torche suggérée par Joanna dans mon sac à dos là ou j'avais déjà mis une carte de la région, une bouteille d'eau et quelques paquets de fruits secs que je laisserais dans la voiture.

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Juste avant de partir, j'indiquais à Madame Leprestre que je devrais être de retour le lendemain dans la matinée.

J'y laissais donc sans crainte mon ordinateur portable et une grosse valise pleine de vêtements de rechange.

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A six heures précises, je prenais la direction de l'autoroute A6 pour Bakewell, Haddon Hall se situait à mi-chemin entre cette ville et Matlock.

C'était tout droit, je n'avais donc aucune inquiétude à avoir.

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Le paysage se déroulait devant moi en une succession de champs verdoyants bordant la rivière Wye.

Après avoir quitté la route de Bakerwell, je pris la direction de Darley Dale puis Rowsley.

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J'avais roulé plus d'une dizaine de minutes quand soudainement ma voiture se mit à cahoter et à faire des bruits bizarres.

Paniquée, je quittais l'autoroute pour prendre la première petite route qui se trouvait sur le côté afin de me garer sans tarder.

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C'était bien ma veine !

je saisissais mon portable.

Une localisation GPS me permettrait de me situer et de prendre les décisions qui s'imposent. 

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En peu de temps, j'avais contacté l'entreprise de location de la voiture qui s'empressa de prendre tout en charge. Seulement je devais rentrer en ville avec la dépanneuse si je voulais disposer d'une autre voiture. A une demie-heure de mon précieux rendez-vous, je me voyais mal appeler Lord Manners pour lui dire que j'aurais du retard ! A en croire le dépanneur le manoir d'Haddon Hall était à à peine à dix minutes de marche tout droit ! 

Je pris donc la décision de laisser la voiture sur place et de continuer à pied, emportant dans mes poches le strict nécessaire : mon portable.

Le dépanneur me promit de venir déposer la voiture à Haddon-Hall dés qu'il l'aurait réparé. Il en aurait pour une petite heure tout compris.

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Confiante, je prenais juste le temps de changer de chaussures et de troquer mes hautes bottines noires pour mes baskets. 

Le petit chemin que je devais suivre se prolongeait devant moi dans un succession de verts bosquets et de petits bois. Cela devait être Parkside Wood selon les dires du dépanneur.

J'appréciais la tranquillité de ce petit chemin et la douceur de cet fin après-midi et la luminosité extraordinaire qui donnait aux arbres une robe scintillante qui semblaient danser sous le soleil.

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Je poursuivais droit devant moi comme me l'avait indiqué le dépanneur.

Un coup d'oeil à ma montre me fit comprendre que les dix minutes étaient passées depuis longtemps.

Avais-je perdu mon chemin trop attentionnée à la lumière magnifique de ses sous-bois ?

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Je me rendais compte que maintenant les arbres ne ressemblaient plus qu'à d'immenses masses sombres tapies dans une forêt qui semblait moins accueillantes. 

Le ciel s'assombrissait à son tour projetant une ombre noire devant moi et plongeant les bois dans une semie-obscurité. 

Je pris une seconde pour me couvrir et enfilait mon manteau de peur de voir la pluie tomber. Quelle poisse !

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J'avais à peine ajusté mon manteau et fermé mon col sur ma poitrine que je fus surprise par le changement brusque du temps.

Le soleil avait complètement disparu et le ciel clair s'était chargé de gros nuages laiteux qui se transformaient en une immense chape de brume.

L'humidité semblait sortir du sol et des arbres me glaçant jusqu'aux os. Le paysage avait littéralement changé. Les formes colorées des arbres avaient pris une teinte sombre presque noires voilées par une brume blanche lourde et épaisse qui me cachait l'horizon.

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Je me réconfortais en me disant que le manoir ne devait plus être bien loin maintenant, j'avais rigoureusement marché tout droit, tentais-je de me rassurer.

Dans quelques instants, je devrais voir sa haute stature se découper devant moi, malgré cette brume qui commençait à envahir la forêt.

Je tentais de chasser mon inquiétude en resserrant mon manteau et j'avançais droit devant.

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L'angoisse me saisit quand au bout de cinq minutes de marche, je ne voyais toujours pas le manoir d'Haddon Hall. Je paniquais ! Aurais-je pu me perdre à cause du brouillard ?

Je stoppais net faisant un tour sur moi-même.

Aurais-je pris sans me rendre compte la mauvaise route ? Devais-je faire demi-tour ?

Je me mis à chercher fébrilement mon portable. Ou l'avais-je donc mis ! 

Jamais je n'avais perdu pied si vite, mes mains et mes jambes tremblaient, l'obscurité gagnait maintenant du terrain, la nuit semblait vouloir prendre le bois.

Mais quelle heure est-il donc ?

Soudain je crus entendre un martèlement régulier, d'abord lointain, puis plus près. Quelqu'un venait ! Une aubaine ! pensais-je immédiatement en continuant à marcher. Je pourrais enfin demander mon chemin.

Le bruit se rapprochait maintenant et battait clairement le sol à une allure régulière. Mon cœur se mit à bondir dans ma poitrine. Quelqu'un ! Je m'arrêtais net. Ou quelque chose !

Au moment où je me disais que je pouvais me tromper sur ce qui venait vers moi, j'entendis comme un souffle saccadé envahir le bois. Le martèlement continuait de plus belle à espace régulier. Une forme noire fonçait sur moi à vive allure ; une masse noire et luisante enveloppée de vapeur qui courrait droit devant elle sans s'arrêter.

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J'eus à peine le temps de crier que je compris qu'une masse noire fondait sur moi et à grande allure.

 

 

A suivre.... 

13 juillet 2014

A la recherche de Jane Eyre - Partie 2 -

Sûr que quelque chose se précipitait droit sur moi !!! J'étais tétanisée par la surprise.

Une chose noire et rapide avait surgit du sous-bois et fonçait maintenant résolument droit sur moi.

J'eus juste le temps de faire un petit écart brusque sur le côté pour éviter cette masse noire et épaisse qui se précipitait dans ma direction.

J'entendis un hennissement strident mêlé à un juron tandis que je basculais vers l'arrière m'écrasant lourdement au sol, puis le cri terrible d'une bête qui se cabrait.

"- Pardieu ! Quelle folie  !" vociféra la voix d'un homme.

Je me regroupais sur moi-même rentrant mon visage dans ma poitrine sans faire un autre geste.

Le cheval fendait l'air de ses pattes tout au-dessus de ma tête tandis que l'homme luttait avec l'animal pour en reprendre le contrôle.

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"- Ne bougez pas !" ordonna la voix aussi claquante qu'un fouet. "Ou vous risqueriez bien de perdre votre tête de linotte et croyez-bien que je n'en aurais aucun chagrin, sacrebleu !"

"- Diantre de ses satanées bonnes femmes !" rageait-encore la voix à peine couverte par le hennissement sauvage du cheval qui ne cessait de se cabrer au-dessus de moi en balayant l'air de ses pattes.

"- Toujours là quand il ne faut pas, nom de Dieu !" tempestait l'homme aussi furieux que son cheval.

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Je protégeais instinctivement mon visage dans mes bras tandis que l'homme essayait toujours de contenir son animal.

"- Là, Eclair... Là, mon garçon..." recommençait-il d'une voix extrêmement douce qui détonait avec la férocité avec lequel il m'avait parlé.

J'écoutais la voix de l'homme couvrir la respiration bruyante et saccadée de l'animal qui au fil de ses paroles douces semblait revenir au calme.

Les minutes me parurent une éternité.

Pourvu que le cheval se calme... pensais- je priant pour que ses sabots ne m'heurtent ni la tête ni le dos dans sa crise de panique et pour que l'homme réussisse à maîtriser son cheval.

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La bête se cabra une dernière fois puis parut enfin s'apaiser à l'écoute des paroles rassurantes de son maître.

Entre un nouveau piaffement, l'homme m'invita enfin à me mettre debout, mais je pus constater qu'il le fit sans ménagement :

"- Relevez-vous, inconsciente écervelée" maugréa-t'il durement. "Et n'ayez aucun geste brusque où je ne répond plus de rien..."

Je me mordis la lèvre inférieure pour retenir une réplique mordante à l'encontre de cet inconnu que j'imaginais ressembler à un vieil homme revêche au vue du langage ancestral qu'il employait.

Mon instinct de survie me faisait comprendre qu'un seule geste déplacé de ma part pourrait raviver la colère du cheval et qu'il était préférable d'attendre un peu avant de vouloir "régler mes comptes" avec lui.

Je devais bien reconnaître à sa décharge et même si il se montrait extrêmement peu aimable avec moi, qu'il avait été un cavalier émérite pour ne pas être lui même tomber de cheval et pour avoir eu autant de maîtrise sur son destrier.

Je haussais la tête pour découvrir la puissante musculature d'un étalon aussi noir que la nuit et bâti comme un cheval de course si j'en jugeais ses longues jambes robustes et fuselées.

La bête était magnifiquement dressée entre moi et son maître dont je ne voyais que les hautes bottines de cuir noires.

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J'hésitais encore à bouger, fébrile.

Les sabots de l'animal claquèrent au sol, lourds et imposants comme deux nouveaux coups de semonce m'obligeant malgré moi à courber la tête une nouvelle fois.

Manifestement le cheval voulait me faire comprendre qu'il n'avait pas vraiment apprécié d'avoir été stoppé violemment dans sa course effrénée. 

Les Sims™ 3 Île de Rêve

"- Là Eclair..." continua la voix masculine d'un ton d'une douceur infini. "Je crois que cette jeune étourdie a bien compris la leçon et qu'elle n'est plus prête à jouer les suicidaires en se jettant sous tes pattes... Là mon garçon, calme-toi maintenant".

Je percevais les petits tapotements réguliers de la main gantée qui m'informaient que l'homme était entrain de lui flatter doucement l'encolure.

 Les Sims™ 3 Île de Rêve

Après un court instant où il me semblait que le calme était revenu, je décidais de me lever mais sans précipitation.

Une douleur fulgurante me rappela immédiatement à l'ordre. Ma cheville n'avait pas dû apprécier ma chute de tout à l'heure et j'avais certainement dû me faire une entorse en glissant sur le côté. 

"- Qu'avez-vous !" rouspéta la voix me forçant à lever les yeux.

Les Sims™ 3 Île de Rêve

Je pouvais distinguer la silhouette d'un homme de haute carrure bien calé sur son cheval et dressé comme un I, une cravache d'équitation à la main.

"- Quoi ! Que Diable, encore ! Qu'avez-vous !" vociférait-il.

Plutôt me taire que me plaindre à cet individu ! pensais-je en fronçant les sourcils la bouche résolument close.

Quel rustre !  Cet homme était  de toutes les façons incapable de la moindre empathie sinon envers son cheval ! Autant que je me débrouille seule !

Je me redressais tant bien que mal mettant tout mon poids sur mon autre jambe restant muette comme une tombe, le visage serré et fermé par la douleur.

Nous nous dévisageons comme deux chiens de meute près à nous étriper.

Je contemplais malgré moi les traits altiers de son visage qui, après la surprise, affichait une extrême contrariété.

Malgré ma colère, je n'en croyais pas mes yeux, plus je détaillais l'homme, plus je me disais que j'étais en train de rêver, non pas parce qu'il ne semblait pas réel mais seulement parcequ'il semblait surgir d'un autre monde. Il portait une élégante tenue que je pouvais distinguer malgré le soir tombant et la brume environnante mais d'une toute autre époque...

Les Sims™ 3 Île de Rêve

Sans me rendre compte de mon insistance je le détaillais des pieds à la tête :

Il était vêtu d'une longue redingote de laine noire de l'époque victorienne cintrée à la taille qui laissait entrevoir un costume finement ajusté et d'un chapeau haut de forme aux larges bords, le tout marqué par une élégance naturelle et raffinée que seul aurait pu avoir un homme du 19 ème siècle.

1-Les Sims™ 3 Île de Rêve

Sa main battait tranquillement une cravache de cuir souple sur ses hautes et élégantes bottes de cuir noir montantes.

La douleur me rappela à l'ordre et je m'écroulais malgré moi au sol cessant d'un coup le passage en revue de sa tenue vestimentaire.

Les Sims™ 3 Île de Rêve

"- Vous vous êtes blessée !" ragea soudain l'inconnu sur un ton continuel de reproche.

"- Pourquoi n'avoir rien dit, Petite Bécasse."

J'inclinais la tête tandis qu'il mettait pied à terre.

 2-Les Sims™ 3 Île de Rêve

Il me dévisageait le visage toujours marqué par un agacement évident tandis que je massais tant bien que mal ma cheville douloureuse sans lui dire un mot.

"- Qu'est-ce qui vous a pris de rester sur le chemin ! J'aurais pu vous tuer !" continuait-il d'un air menaçant et furieux. "Tout ceci ne serait pas arrivé si vous n'aviez pas quitté la route... Que faisiez-vous donc dans le sous-bois !"

Il ne bougea pas, raide comme un piquet, rouge de colère et il ne cessait de bougonner pour lui même comme si il ignorait même ma présence.

"- Que pourrais-je bien attendre des femmes si ce n'est que l'assurance de leur superficialité" soupira-t'il en haussant les épaules soudain blasé. "Aucune once de réflexion ou de logique dans leur comportement..."

Je décidais de ne rien répondre face à ses piques évidentes, et je rivais mon regard au sien pour rencontrer les yeux de cet homme phallocrate, acarîatre et colérique qui préférait m'houspiller au lieu de m'apporter son aide.

"- N'est-ce pas ?" répéta-t'il surpris par mon mustisme et espérant manifestement un acquiescement de ma part.

Son regard était comme je l'avais imaginé méprisant et glacial. Il avait un visage carré comme marqué au couteau, un nez droit et des sourcils noirs prononcés et épais, deux yeux bleus sombres gris acier qui me toisaient avec dédain.

4-Les Sims™ 3 Île de Rêve

Je pouvais voir le col blanc de sa chemise et une belle cravate de couleur bleue nuit, un veston clair à doubles rangées de boutons dorés et un pantalon crème moulant, le visage était celui d'un homme d'âge mûr la cinquantaine bien passée, pas vraiment beau.

Il leva sa main ganté d'un geste plein de mépris et haussa les épaules las et aussi indifférent à mon mutisme qu'à ma douleur me laissant assise et clouée au sol.

Je ne comprenais pourquoi il continuait à me parler de cette façon étrange et surtout je ne comprenais pas pourquoi il ne faisait aucun geste pour m'aider.

Espérait-il donc ainsi clôre l'incident pour que lui et moi repartions chacun de son côté ? Avais-je à ce point contrarié son "emploi du temps" qu'il n'envisageait même pas de changer ses plans pour me secourir ?

9-Les Sims™ 3 Île de Rêve

Malgré lui, je le sentais inquiet et dans l'impossibilité de me venir en aide comme si j'étais pour lui un animal inconnu avec lequel il ne savait pas se comporter.

La sévérité qu'il usait, était peut-être dû à cette peur que je sentais chez lui, elle était palpable comme cette immense tristesse inexplicable dans son regard d'acier.

Ce fut la première chose qui me toucha chez lui. Ce regard étrange, profond presque en retrait qui ne collait pas avec ses paroles amères et glaciales.  

12-Les Sims™ 3 Île de Rêve

Etrangement, cela eut l'effet de m'adoucir :

"- Si j'avais pu, Monsieur, vous débarrasser de ma présence, croyez-bien que je l'aurais fait tout de suite" commençais-je simplement.

"- Je me suis malheureusement tordue la cheville à cause de vous et de votre cheval et je crois bien que si je ne m'étais pas jetée à terre vous m'auriez piétiné."

Je tentais de me redresser une nouvelle fois mais sans succès et il dût bien constater que je m'étais effectivement blessée dans ma chute pour les éviter.

Aurait-il cru que je feignais m'être blessée ? 

Un silence pesant se fit sentir ajoutant à la lourdeur du lieu.

"- Bien que je n'ai, moi non plus, aucune envie de prolonger cette conversation avec vous" continuais-je de la même voix blasée. "J'ai bien peur que vous ne pouvez pas faire autrement que me porter assistance, Monsieur, ne vous en déplaise."

Je tendais mon bras vers lui pour qu'il m'aide à me relever mais il restait immobile sans un geste. Ma main retomba lourdement. Il restait les bras croisés et fermement décidé à me laisser par terre.

Je scrutais son regard bleu acier résolument déterminé comme sa machoire fermée.

"- Rassurez-vous cela ne sera pas pour longtemps..." dûs-je insister en levant une nouvelle fois ma main vers lui.

Il me regardait étrangement, fixement et sans un mot.

Je m'apercevais que l'expression de son regard avait encore changé : la mer sombre et agitée de ses yeux gris acier s'apaisait soudain sans que je comprenne la raison de ce revirement soudain. 

 5-Les Sims™ 3 Île de Rêve

Un léger soulevement de sa lèvre supérieure m'indiquait qu'il commençait même à sourire.

"- J'ai dû laisser ma voiture à quelques mètres d'ici..." reprenais-je tête baissée "Si vous m'y conduisez... vous serez rapidement débarrassé de moi..."

Ses sombres sourcils se fronçait d'agacement et sa cravache fouetta l'air pour montrer son mécontentement. 

"- Votre voiture !" hurla-t'il soudain d'un ton claquant qui me fit sursauter. "Si vous y étiez resté bien sagement, nous n'en serions pas là !".

Aussi soudainement qu'elle était apparue, son expression d'amusement mourut rapidement dans ses yeux à l'image d'une flamme qui s'éteignait.

Son visage se durcit et un pli ironique tordit sa bouche longue aux lèvres minces dans un rictus qui ne l'avantageait pas.

"- Je suppose que vous aviez envie de vous balader comme toute les étourdies de votre âge ! N'est-ce pas ?" continua-t'il à me dire en me faisant la leçon.

Je restais coite par son continuel ton patriarcal.

Jamais de toute ma vie, je n'avais entendue autant  de reproches sur ma conduite en si peu de temps !

32-Les Sims™ 3 Île de Rêve

"- Encore muette ! " maugréa-t'il soudain la mâchoire basse.

J'aurais presque perçu une teinte de déception dans sa voix.

Il continua d'une voix grave toujours pour lui-même :

"- Forcément. Cela ne pouvait être que cela. Les femmes sont si prévisibles..."

Ses épaules s'affaissèrent comme si il était las de ce constat.

Nous restâmes silencieux une longue minute à nous regarder l'un et l'autre mais je ne me défendais pas.

 33-Les Sims™ 3 Île de Rêve

Je plongeais juste mes yeux dans les siens émue par la tourmente que j'y lisais.  

Pourquoi était-il persuadée que j'étais une femme comme les autres, étourdie, frivole et capable de se mettre elle-même dans une situation inextricable sans réfléchir ?

J'avais l'impression que toutes ses préoccupations étaient d'un autre âge mais que ce constat le rongeait intérieurement. Mais pourquoi ?

Qui était donc cet homme surgit de nul part ? Et est-il bien réel ?

D'un instant à l'autre je me disais que j'allais me réveiller, certainement au creux du lit douillet de ma chambre d'hôte, le livre de Jane Eyre dans mes mains. Mais rien ne changeait.

Cela devait être un guet-apens orchestré par Joanna.

C'était bien sa manière radicale de vouloir m'immerger au coeur de mon article en me propulsant au milieu de cette rocambolesque scène qu'elle avait dû entiérement dirigée depuis son bureau.

Je cherchais dans les yeux de mon compagnon une quelconque forfaiture mais il etait insondable et incroyablement sincère dans son rôle de contemporain tourmenté rétrograde.

Je regardais de droite à gauche cherchant un signe quelque part, quelque chose qui me dirait que tout ceci n'était qu'un grand malentendu. Mais nul personne le rejoignait, ni cameraman, ni preneur de son, ou scénariste en colère à qui j'aurais gâché la scène de son acteur.

"- Qui êtes-vous donc !" me lança-t'il soudain la mâchoire encore serrée. "Et que faîtes-vous ici à cette heure aussi tardive ! Aucune dame de bonne famille n'aurait osé s'aventurer dans les bois à ces heures si proches de la nuit !"

Il restait dressé comme un I, la main serrée sur sa cravache et le visage renfrogné et contrarié, cette fois j'étais persuadé qu'il pensait que je lui mentais, pire que je n'étais pas "une dame" et sa façon de me méjuger me serra la poitrine.

"- Me voilà bien !" parada-t'il soudain "Vous avez perdu votre langue une fois de plus !"

 11-Les Sims™ 3 Île de Rêve

 Il se tourna vers son cheval.

"- Tu vois, Eclair" lança-t'il à son animal "Toutes les mêmes. Bavardes à ne plus finir quand on ne les interroge pas et incapable de dire un mot quand on leur parle !"

Je restais médusée par son monologue machiste et intriguée par cet étrange personnage.

Les anglais étaient-ils si collet monté sur les régles de bonne conduite que devaient avoir les femmes ? 

Un silence morne régnait dans le sous-bois et personne ne semblait vouloir mettre fin à cette farce. Il était résolument sérieux et j'étais bel et bien assise au cœur d'un sous-bois anglais avec une cheville foulée.. 

La terre séchait sur mon manteau et je prenais conscience que je m'étais pas mal salie dans ma chute. Tandis que je tentais de frotter mes vêtements presque machinalement, je sentis le regard gris acier suivre chacun de mes mouvements.

"- Alors, qui êtes-vous et que faîtes-vous ici ?" se contenta-t'il de répéter en me détaillant de haut en bas.

J'eus encore un moment de silence qui l'agaça ou l'amusa, l'étincelle de son regard dansait de nouveau dans ses yeux.

"- Je ne pense pas que mon nom puisse vous dire quelque chose, Monsieur..." murmurais-je d'une voix blanche, les nerfs mis à dur épreuve.

Il parut surpris par mon ton mélodramatique mais intéressé. Il m'engagea à parler en restant silencieux le regard appuyé tout à mon écoute.

"- Je cherche à rejoindre Haddon-Hall. Lord Manners m'attend..." commençais-je presque heureuse de prononcer ces mots.

"- Haddon-Hall ! Lord Manners !" répétait-il "Qui diable sont ces noms et ces gens !"

 21-Les Sims™ 3 Île de Rêve

Je restais estomaqué. Le voilà qu'il était de nouveau en colère et nerveux. J'avais bien un autre nom mais il ne me laissa pas le temps de le citer. Sa cravache claqua sur sa veste.

"- Vous voulez dire Thornfield-Hall, Jeune fille ! N'est-ce pas ?"

"- Thornfield ?" bégayais-je. 

Forcément j'avais reconnu le nom du manoir dans le livre que Joanna m'avait donné et que j'avais vu hier soir sur les post-it de couleur... mais...

"- Le seul Lord à la ronde, c'est moi !" osa dit-il en affichant un grand sourire tout en interrompant le cours confus de mes pensées.  "Je me présente Edward Fairfax Rochester. J'ai grand hâte de savoir ce qui vous amène chez moi."

Ce fut comme un coup de massue que je reçus directement sur la tête.

 24-Les Sims™ 3 Île de Rêve

Monsieur Rochester ! Le personnage du livre que Joanna m'avait prêté "Jane Eyre" !

Maintenant c'était sûr, c'était une caméra cachée. Il était acteur et bientôt le plateau allait s'éclairer et j'allais rire de cette mise en scène extraordinaire.

Mais rien.

Un silence total.

L'ombre avait gagné le sous-bois, le cheval piaffait d'impatience à quelques pas, et Monsieur Rochester était au-dessus de moi en chair et en os.

 20-Les Sims™ 3 Île de Rêve

" - Vous êtes sûre que vous allez bien, Mademoiselle ?"

Je plongeais mon regard dans ces yeux gris, j'y lisais toujours cette étincelle à la fois amusée et insolente qui réveillait son regard sombre lui donnant un charme étrange.

Je succombais malgré moi au plaisir d'éveiller en lui de l'intérêt et même d'attiser ce feu allumé dans ses yeux à chaque fois que je savais le surprendre. Seulement je ne comprenais plus rien à cette histoire. Finalement le cheval avait dû me heurter la tête, et je ne m'en souvenais pas... C'était cela... Je ne m'en souvenais pas. 

"- A vrai dire, je ne sais plus, Monsieur..." dis-je soudain voulant me moquer de moi-même, ce qui déclencha chez lui un petit rire hilare. "Je crois que ma tête ne répond plus à rien... j'ai dû me blesser plus que je ne le pensais..."

Il se cala devant moi et je perçus encore cet attendrissant air inquiet.

"- Voilà enfin des paroles censées et raisonnables" constata-t'il apaisé. "Nul doute ! Le choc a été rude." 

Il tendit une main vers moi.

Enfin, pensais-je.

Je saisissais sa main tout en prenant appui sur mon pied valide afin de me tenir debout mais malgré moi, je trébuchais tout contre lui.

22-Les Sims™ 3 Île de Rêve

"- Vous semblez ne pas pouvoir marcher, Mademoiselle" me dit-il d'un ton amusé tandis que j'essayais d'échapper à son contact.

Elégamment il m'aida à retrouver mon équilibre et à respecter une distance convenable entre nous en s'écartant légèrement vers l'arrière.

14-Les Sims™ 3 Île de Rêve

Je tentais de tenir sur mon unique pied et j'usais de son bras pour garder ma position tout en claudiquant.

"- Je crois que je ne peux pas vous dire le contraire cette fois, Monsieur." lui dis-je tout en le remerciant pour son aide.

Il me regardait cette fois d'une façon étrange, silencieuse, presque comme si il était en train de m'étudier.

26-Les Sims™ 3 Île de Rêve

"- Je vois bien que vous ne semblez pas Créature de Dieu à vouloir obéir à vos aînés, Mademoiselle." dit-il enfin après ce court instant d'observation.

Il ajouta d'une voix basse pointé d'humour :

"- Quoique je n'ai pas à me plaindre de votre sens de la répartie, je pense que vous avez plutôt intérêt à accepter de m'accompagner jusqu'à Thornfield pour ce soir, n'est-ce pas ?"

29-Les Sims™ 3 Île de Rêve

J'ouvrais des grands yeux ronds qui le fit éclater d'un rire franc.

"- Ne vous inquiétez pas, Mademoiselle, ma proposition se veut tout à fait honnête. Ne prenez pas cet air apeuré, malgré mes manières quelques fois rustres, je reste malgré tout un gentleman. Vous verrez..."

L'ajout de ce petit mot me troubla. Aurait-il vraiment envie que je le considère autrement que comme il s'était décrit lui-même : comme un rustre ?

Le silence fut soudain rompu par des bruits sourds.

"- La nuit tombe et les animaux sauvages vont sortir du bois, je pense qu'il ne serait pas prudent de s'attarder plus longtemps ici..." ajouta-t'il soudain. "Il est temps de partir..."

13-Les Sims™ 3 Île de Rêve

"- Cherchez-vous à me faire peur, Monsieur ?" dis-je d'une voix sans timbre. "Ce ne serait pas très élégant de votre part..."

Il eut un moment d'hésitation :

"- Au diable l'élégance !" dit-il en haussant les épaules presque amusé parce qu'il avait dit puis il chercha mon regard en se baissant pour se mettre à ma hauteur.  Il était d'un mètre plus grand que moi.

"- Je crois lire dans vos yeux que vous semblez être plus capable d'apprécier la franchise que les fausses bonnes manières, n'est-ce-pas ?" 

Ses yeux gris acier me sondait avec une étrange perspicacité et ne quittait pas mes yeux comme pour me forcer à dire la vérité.

17-Les Sims™ 3 Île de Rêve

"- C'est vrai, Monsieur, je n'apprécierais pas que vous me cachiez la vérité. C'est mieux ainsi, vous avez parfaitement raison..."

Il fit claquer sa cravache au creux de sa main et exhiba un sourire satisfait.

"Voilà qui est convenu entre nous, Mademoiselle, nous sommes bien d'accord ? Promettez-moi d'être toujours aussi directe avec moi, et j'en ferais de même..."

Ces grands yeux acier brillaient d'un drôle d'éclat qui me fit frisonner, il ajouta étrangement :

"Mais seulement quand nous serons seuls, cela va de soit...."

Sa phrase me parut soudainement blessante

S'était-il rendu compte que je n'étais pas "une dame" ?

Je baissais la tête ne sachant comment réagir à sa phrase. 

18-Les Sims™ 3 Île de Rêve

Mon silence le fit soudain réfléchir. Il me dévisagea de cette même façon étrange cherchant malgré moi mon regard fuyant.

"- Que se passe-t'il donc dans ce crâne et qu'êtes-vous donc en train de vous dire ?" 

 23-Les Sims™ 3 Île de Rêve

Je baissais encore la tête incapable de relever le visage manifestement touchée.

"- Je ne me disais rien, Monsieur." mentis-je tout en tentant de m'échapper. "Nous devrions nous hâter comme vous l'avez suggéré..."

Son regard cherchait le mien et il ne semblait pas vouloir abandonner :

"- Je sais par expérience que c'est lorsque les femmes ne disent rien, qu'elles ont des choses à dire, n'est-ce pas ?"

Il me fit rougir jusqu'aux oreilles.

"- N'avions-nous pas convenu de tout nous dire ?" commença-t'il comme si il était le maître d'un jeu de vérité.

"- Vous voilà fuyante... Vous aurais-je blessé par une maladroite parole  ?"

Je relevais la tête sondant ses yeux. Jamais homme n'avait insisté pour savoir ce que je pensais, encore bien moins savoir ce que je ressentais. Cette idée me troublait au plus profond du coeur. Monsieur Rochester semblait réellement bel et bien intéressé pour percer le secret de mon nouveau silence.

Je secouais la tête, incapable de m'expliquer.

"- Allons... vous baissez déjà les bras, Mademoiselle, et vous rompez votre promesse ? J'avais pensé pourtant avoir trouvé "l'oiseau rare"... Vous m'envoyez désolé..."

Malgré moi je sursautais à ces mots, et il sentit que tout mon corps s'était raidi. Le timbre de déception que je perçus dans sa voix m'invita à parler.

"- J'ai eu comme l'impression que vous vous moquiez de ma condition, Monsieur" dis-je simplement.

"- Votre condition ?" reprit-il en soulevant un sourcil.

"- Oui, ma condition."

Il prit un air sombre comme si il était encore secoué par ses démons :

"- Puisque je vous ai promis la vérité, je vous dirais que vous n'avez pas tort, vous m'amusez."

Il dut me retenir par l'épaule pour m'empêcher de partir.

"- Vous me distrayiez plus justement. Et vous n'avez pas en avoir honte, bien au contraire."

Il prit un ton extrênement doux pour ajouter :

"- Aucune femme n'ose me parler comme vous le faite à cause de l'étiquette. Vous avez une pointe étrange dans votre accent qu'il laisse à penser que vous n'êtes pas d'ici... Aucune femme n'aurait agi comme vous l'avez fait, je vous remercie pour cela. Restez vous même quoiqu'il arrive."

J'étais surprise que pouvait-il donc arrivé ?

"- Il est temps de gagner Thornfield, Mademoiselle." murmura-t'il soudain comme avec une pointe de regret teinté de gravité.

Mais où était-le drame ?  Que cachait cette phrase mystérieuse ?

J'essayais de me ressaisir mais je n'y arrivais pas. Tout commençait à s'embrouiller dans ma tête, il devait avoir une explication logique à toute cette affaire, une coïncidence extraordinaire, quelque chose...

Monsieur Rochester dût me retenir car je vacillais prise soudain par une angoisse qui serra de nouveau la poitrine m'empêchant presque de respirer. 

"Vous n'avez pas l'air d'être bien." me dit-il d'une voix étrangement douce en m'attirant à lui.

Je m'accrochais à ses bras sans crainte secouant la tête positivement.

27-Les Sims™ 3 Île de Rêve

Avant même que je ne dise quoique ce soit il me saisit par la taille et me hissa sur son cheval, puis vint me rejoindre à mon côté.

30-Les Sims™ 3 Île de Rêve

Mon cœur se mit à battre bruyamment dans ma poitrine provoqué par cette étrange promiscuité. Dans d'autres cas, j'aurais tenté de m'écarter de lui pour tenir mes distances. Mais là, je ressentais une lassitude extrême qui me désinhiba. Je me laissais aller contre lui tandis qu'il tirait les rênes de son cheval et le lançait au pas, puis au galop.

"- Vous m'avez retardé" commença-t'il d'un ton reproche "Madame Fairfax va s'inquiéter." 

Il me sentit me raidir et dût me retenir à nouveau contre lui. Il parut amusé de mon soudain recul. 

"- Madame Fairfax ?" le questionnais-je malgré moi. 

"- Oui, Madame Fairfax." se contenta-t'il de dire.

31-Les Sims™ 3 Île de Rêve

Je pris un air renfrogné et je me tus tout le long du trajet préoccupée par une tonne de questions à son sujet. 

Je ne m'entendais même pas soupirer.

Madame Edward Fairfax Rochester ? pensais-je malgré moi. Etait-il marié ?

Cette question m'occupa l'esprit tout le long de notre trajet jusqu'à Thornfield.

Je ne me rendis même pas compte que Monsieur Rochester sembla aucunement vouloir briser mon silence malgré notre pacte de vérité, bien au contraire. Le cinquantenaire sembla rester lui-même la mâchoire serrée, tiraillé dans ses propres pensées.

28-Les Sims™ 3 Île de Rêve

La nuit était tombée maintenant et elle donnait au paysage une intensité étrange.

Chaque contour avait pris une forme pleine et palpable : les arbres s'élançaient en hauteur et s'amusaient à couvrir le ciel de leurs masses sombres et immenses.

Les nuages eux-mêmes avaient pris la couleur de la nuit et glissaient dans les cieux dans un ballet extraordinaire qui tentait de masquer les reflets de la lune.

Les buissons larges et épais captaient à la fois la lumière blanche de l'astre et l'ombre du soir dans une évanescence brumeuse qui octroyait au lieu une étrangeté mystique entre inquiétude et recueillement.

 37-Les Sims™ 3 Île de Rêve

Je restais bouche bée devant le manoir qui se dressait devant moi.

Thornfield-Hall, magnifique demeure médiévale, se levait tel un vestige du passé flanqué de ses hautes tours carrées en pierres, toutes crénelées au sommet.

36-Les Sims™ 3 Île de Rêve

La bâtisse épaisse s'étendait sur une distance impressionnante cerclée par un tour de garde en pierres où Monsieur Rochester laissa aller son cheval au pas. 

37-Les Sims™ 3 Île de Rêve

Deux grosses torches suspendues éclairaient l'allée menant dans la cour du château.

Le maître des lieux entra vers les communs et se planta devant une immense porte cochère.

35-Les Sims™ 3 Île de Rêve

Sans mot, il me déposa au sol, me maintenant par le bras pour que je trouve immédiatement mon équilibre. 

  39-Les Sims™ 3 Île de Rêve

"- Restez là." me somma t'il fermement. "Madame Fairfax n'ouvrira plus à cette heure et je vais devoir emmener Éclair à l'écurie car mes gens sont couchés à cette heure."

De nouveau, je ressentais dans sa voix de la sécheresse, et un ton de reproche ou il me faisait bien comprendre que je l'avais "retardé".

Je ne répondais pas préférant lui retourner seulement un regard entendu mais manifestement cela ne lui suffisait pas.

"- Vous m'avez bien compris ?" répéta-t'il froidement en reprenant ses distances.

40-Les Sims™ 3 Île de Rêve

"- Je ne bougerais pas, Monsieur. Je vais rester sagement là." dis-je entre l'insolence et le respect que je lui devais.

"- J'espère bien." répliqua-t'il rapidement. "Je ne souhaite pas vous courir après à cette heure aussi tardive."

Je croisais son regard gris acier et je m'aperçus que la lumière qui y brillait tout à l'heure dans le sous-bois avait complètement disparu. Il ne plaisantait pas.

"- Mais...." ajoutais-je soudain tout en cherchant à m'assoeir. "Je ne vous promet rien si vous vous faites trop attendre..."

43-Les Sims™ 3 Île de Rêve

Il y eut un silence pesant pendant lequel il me défia du regard comme si il était prêt à m'étrangler sur place mais aussi soudainement que sa mauvaise humeur était apparue, ses yeux brillèrent d'un feu dansant et il éclata de rire.

"- Je n'en attendais pas moins de vous" dit-il enfin  d'une voix grave et profonde avant de tirer sur les rênes pour faire demi-tour à son cheval et le faire s'avancer vers l'écurie.

Tout en s'éloignant, Edward Fairfax Rochester crut bon ajouter d'une voix teintée d'une pointe d'ironie :

"- Je ne serais pas long. Vous n'aurez même pas le temps de vous inquièter..."

Je restais silencieuse calée sur mon banc presque surprise par sa clairvoyance. Bien sûr que seule la crainte de ne pas le voir revenir m'aurait fait rompre ma promesse. J'étais surprise qu'il avait pu le deviner aussi rapidement... C'était bien la première fois qu'un homme ait réussi en si peu de temps à me percer à jour.

Brave, je regroupais les plis de mon manteau sur moi ignorant l'obscurité qui plongeait la cour et je priais mentalement pour que Monsieur Rochester revienne vite.

Tandis que j'entendais les claquements lourds des pas du cheval sur les pavés accentués des pas du Maître des lieux, je suivais le plus longtemps possible sa haute silhouette rassurante jusqu'à ce qu'elle s'efface en entrant dans l'écurie.

 44-Les Sims™ 3 Île de Rêve

La cour était immense et semblait couvrir l'ensemble du domaine. Malgré une certaine angoisse, je m'émerveillais  de cet élégant manoir en grosses pierres impressionnantes qui s'étendait tout autour de moi.

Je suivais des yeux les lignes rigides des hautes tours carrées qui s'élançaient toutes droites et qui semblaient défier le ciel par leurs crénelages imposants tout en appréciant la forme des hautes fenêtres quadrillées de pierre dont les vitres noires brillaient à la clarté de la lune.

Le silence régnait encore en souverain ici comme tout à l'heure dans le sous-bois et il n'y avait décidément aucun bruit familier que j'eusse pu reconnaitre.

Je m'étonnais de ne pas entendre le bourdonnement de l'autoroute qui devait se situer à à peine un kilomètre d'ici ni le ronronnement d'un groupe électrogène car je n'avais repéré aucun pylône électrique à proximité du domaine. Aucun lampadaire n'éclairait la cour non plus, comme si le choix du maître des lieux avait été de bannir totalement toutes marques de modernisme chez lui. Un dépaysement total comme l'avait finalement souhaité Joanna... Je soupirais. Etait-elle à l'origine de toute cette mascarade ? Si c'était le cas, je comptais bien lui dire ma façon de penser...

Mon regard fut soudain attiré par une lumière vacillante et passante qui éclairait progressivement la plus haute des fenêtres.

Quelqu'un semblait se déplacer là-haut !

47-Les Sims™ 3 Île de Rêve

Je fus sûre de reconnaître la silhouette d'une femme vêtue de blanc qui étrangement stationna quelques secondes près de la vitre comme si elle avait pris le temps de me regarder.

Un frisson étrange me parcourut tout entière entre curiosité et peur me laissant un sentiment bizarre. Tandis que je distinguais les bruits des bottes de Monsieur Rochester et que malgré moi, mon regard fut attiré en direction de l'écurie, je m'aperçus que la lumière et la silhouette avaient déjà disparu et que de nouveau, la fenêtre de la plus haute tour était plongée dans une obscurité totale. Avais-je rêvé ?

"- Voilà." dit-il d'un ton ferme.

Il avait déjà traversé la cour et m'avait rejoint en trois grand pas.

"- Il est temps d'avertir Madame Fairfax de notre présence. Suivez moi je vous prie."

J'appréciais encore sa haute silhouette saisissante dans sa redingote noire bien coupée et son visage couvert du haut de forme qui prenait les éclats de la lune.

"Le mystère" de ce lieu étrange et hors du temps s'intensifiait.

Etait-ce Monsieur Rochester lui-même ou bien cette silhouette étrange que j'avais cru apercevoir et dont je n'osais encore parler à mon hôte ?

La grandeur théatrale de ce manoir d'époque dressé au milieu de "je ne savais quel endroit" en Angleterre ?

Tout prenait une ampleur exagéré. Le choc sans doute...

Je préférais laisser la nuit passer, demain à la lumière du jour, tout prendrait un tour normal. Monsieur Rochester m'expliquerait qu'il avait un goût prononcé pour l'époque victorienne et que lui et sa femme "séduisait" les touristes de passage en créant une atmosphère réelle pour dépayser leurs visiteurs. C'était l'unique et seule solution. Si je continuais à émettre une seule supposition sur cette aventure ma tête allait exploser !

 49-Les Sims™ 3 Île de Rêve

Sans un mot, je suivais la haute stature de Monsieur Rochester qui me menait vers l'entrée du manoir cernée de deux grosses colonnes en granit. 

Il me regardait toujours d'une façon étrange et appuyée comme si il cherchait à sonder mon esprit et savoir ce que je pensais mais je n'ajoutais rien.

Je percevais seulement que son regard avait pris un air sévère et inquiet et qu'il avait pris une teinte sombre et plus déterminé.

"- Il est temps de rentrer" dit-il après un long moment comme si il avait du regret. "Madame Fairfax va s'inquiéter, et je n'aime pas la savoir anxieuse à son âge."

52-Les Sims™ 3 Île de Rêve

A son âge, me répétais-je en moi-même tout en restant en retrait derrière lui.

Voulait-il dire que sa femme était plus âgée que lui ? 

Monsieur Rochester en paraissait cinquante, bien une vingtaine d'année de plus que moi déjà. 

J'eus à peine le temps d'imaginer l'âge de Madame Rochester qu'elle se présenta devant moi et son mari, à peine la porte poussée.

 51-Les Sims™ 3 Île de Rêve

C'était une vieille femme distinguée, d'au moins une soixantaine d'années, habillée d'une robe longue et sobre rehaussée d'un magnifique bustier ouvragé. 

50-Les Sims™ 3 Île de Rêve

Elle portait solennellement un chignon gris épais aux mèches un peu rebelle, preuve sans doute de son agitation. Les mains étaient tremblantes et serrées dans deux manches de velours noir étroites :

"- Monsieur Rochester !" commença-t'elle "Pourquoi rentrez-vous si tard !"

J'étais abasourdie de constater que Madame Rochester portait elle aussi une robe d'époque qui flottait sur le plancher mais je n'eus même pas le temps de m'en préoccuper car déjà Monsieur Rochester répliquait.

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"- Ne soyez pas inquiète pour moi" commença Monsieur Rochester d'un ton plus doux "Mais plutôt pour cette jeune dame que je vous amène, Madame Fairfax. Elle s'est perdue non de loin de là, surprise comme une jeune écervelée par la nuit."

Je me raidissais sous l'allusion guère flatteuse de mon hôte mais cela eut un effet positif sur la vieille dame car soudain, elle m'entoura de toute son attention.

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"- Comment est-ce possible, Monsieur Rochester" commença-t'elle en s'approchant de moi telle une mère voletant près de son oisillon.

"- Comme je vous l'ai dit, Madame Fairfax. Juste une jeune étourdie." 

Je sentis son regard ardent sur moi et son timbre volontairement moqueur car il savait que seule la gentillesse de Madame Fairfax m'avait fait me taire, et il en jouait avec délectation, rajoutant à loisir un sermon de plus à mon aventure.

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Comme il me voyait prête à répondre incapable de me laisser ainsi brocarder deux fois de suite, il s'empressa de prendre de nouveau la parole avec un agaçant sourire me coupant l'herbe sous le pied.

"- A sa décharge" parada-t'il lentement "Je suis un peu fautif, Madame Fairfax..."

57-Les Sims™ 3 Île de Rêve

Le "un peu fautif" me fit lever les yeux au ciel déclenchant chez lui cet agréable feu de joie qui illumina ses yeux gris. 

Une nouvelle tentative de répliquer mourut encore sur mes lèvres car Monsieur Rochester prenait un malin plaisir à me chasser de la conversation qu'il entretenait avec sa femme et, ce dès qu'il le voulait.

"- Cette tête de linotte marchait au milieu du chemin coursier, Madame Fairfax. Comment aurais-je pu le savoir !" continuait-il d'une voix pétillante.

 

Madame Fairfax, toujours courant autour de moi, leva les mains sur sa bouche pour cacher une moue horrifiée.

"- Oh mon Dieu, Monsieur Rochester, vous auriez pu la tuer !" commença sa femme d'un ton de reproche. 

Monsieur Rochester me regardait toujours avec amusement. Il devait se divertir à supposer toutes les réflexions qui fusaient dans ma tête depuis que nous étions arrivés ici, et il avait raison, elles étaient nombreuses.

"Grâce à Dieu, Eclair a su l'éviter..." continuait-il posément comme pour chercher à m'agacer. 

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"- Sa cheville est foulée, Madame Rochester et je crois qu'il faudrait l'aider à gagner une des chambres au rez-de-chaussée afin qu'elle puisse reposer son pied jusqu'à son rétablissement. Je compte sur vous pour vous occuper d'elle. Demain nous ferons venir le médecin." reprit-il avec sérieux.

"- Cela va de soit, Monsieur Rochester. Il ne serait plus convenable que vous soyiez une minute de plus avec cette demoiselle sans que sa réputation soit compromise... Je m'occuperais de tout."

Etrangement Monsieur Rochester fit un pas sur le côté tout en claquant des talons pendant que Madame Fairfax me poussait gentillement vers l'entrée.

"- J'en suis bien conscient, Madame Fairfax. C'est pour cela que je compte sur votre discrétion..."

 59-Les Sims™ 3 Île de Rêve

J'étais abasourdie par le tour qu'avait pris la conversation ! Etaient-ils vraiment sérieux ?

Je les regardais tour à tour, eux, puis l'intérieur de la maison où j'avais fait un pas. L'élégante salle à manger s'étirait dans une unique pièce large et cossue à peine éclairée par un feu de cheminée et quelques lampes à huiles. Il n'y avait dans ce lieu encore aucun trace de modernité.

Madame Fairfax me dévisageait maintenant plus intensément et me fit rougir en arrêtant son regard sur mes vêtements. 

"- Quelle drôle de tenue, Monsieur Rochester. C'est un bizarre accoutrement que je n'ai jamais vu nul part..."

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Je sentais le regard de Monsieur Rochester qui c'était de nouveau retourner vers moi pour me détailler subitement comme si il n'avait pas fait attention jusque là à ma tenue.

61-Les Sims™ 3 Île de Rêve

Mon manteau noir couvrait ma robe du soir bien trop courte mais rien ne cachait mes jambes pourvues de ses deux étonnantes chaussures.

Leurs surprises communes me paralysa.

"Il ne serait plus convenable que vous soyiez une minute de plus avec cette demoiselle sans que sa réputation soit compromise..."  martelait encore la voix de Madame Fairfax.

Une migraine soudaine vrilla ma tête. C'était une histoire de fou ! J'avais juste pris la route pour Haddon-hall... et je m'étais perdue...

Mon cœur battait à se rompre. C'était impossible.... Nous étions le 7 juillet 2014. Qui étaient ces gens ? Ou étais-je ? Quelle mauvaise farce me jouaient-ils ? 

J'étais glacée d'effroi.

63-Les Sims™ 3 Île de Rêve 

Une fatique soudaine me submergea comme un tsunami.

Mon cœur se mit à battre dans ma poitrine, submergée par l'angoisse que créait en moi cette situation rocambolesque et même si Monsieur Rochester était le plus charmant des hommes et que Madame Fairfax semblait plus que sympathique, mon esprit n'avait qu'une envie : en finir avec la torture dans laquelle il était enfermé.

Mon cerveau malmené par l'incompréhension de cette situation semblait vouloir en finir radicalement avec ces élucubrations.

Je me sentis défaillir et perdre connaissance.

 

A SUIVRE...

9 juillet 2014

Coming Soon !

A mes chères lectrices,

Je vous annonce la prochaine arrivée de ma nouvelle histoire dont voici en quelques lignes le résumé :

Elsie Prince est une jeune journaliste new-yorkaise chargée de faire un reportage sur la vision du "Romantisme aujourd'hui". C'est au coeur de l'Angleterre, dans le magnifique manoir médiéval d'Haddon Hall, là même où a été tourné le célèbre film romantique "Jane Eyre" qu'elle est attendue pour une interview.

Seulement la voiture de la jeune femme tombe en panne à quelques dizaines de minutes du manoir et elle décide de continuer à pied sur le chemin sans pouvoir faire autrement.

Au moment où la panique l'envahit de se retrouver seule et perdue en plein coeur du Derbyshire, quelqu'un surgit devant elle et la renverse.

A sa grande surprise, l'homme est juché sur un cheval, en habit victorien et se présente comme être Monsieur Rochester... le séduisant héro byronien du roman "Jane Eyre".

 

téléchargement (5)

 

 

14 février 2014

Journal de Jane Steward - Partie 27 - Pour la Saint-Valentin, éternellement.

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Après avoir cherché des informations sur la ville de Mo'alla sur mon portable et avoir découvert que le tombeau d'un grand Prince, chef des Prophètes et grand chef des nomes d'Edfou et d'Hierakonpolis nommé Ânkhtyfy s'y trouvait bel et bien, j'avais rejoint l'avion.

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J'avais hâte de monter à bord et de m'envoler pour l'Egypte : Luxor, la ville qui scellerait mon destin. 

Mon coeur se serra : Aydann. Accepterait-il de renoncer à sa folie ? Me laisserait-il le temps de lui expliquer mon projet ? J'avais tellement hâte de lui faire part de ma découverte, tellement hâte que ma vie change et que ce soit à ses côtés. Je pensais à lui, à notre fils et j'imaginais le meilleur.

La fatigue me saisit soudain et je m'endormis lourdement, bercée par les ronronnements des moteurs de l'avion jusqu'à ce que je me réveille en susaut.

Je sondais mon entourage comme si le surnaturel pouvait y avoir sa place mais j'étais désespérément seule, entourée par des touristes tranquilles qui étaient bien loin de s'imaginer ce qui se passait dans ma tête.

Un jour, si j'arrivais à les convaincre, les vampires ne se cacheraient plus. Ils seraient assis tranquillement dans ce même avion, et pourraient aller n'importe où en ville sans craindre d'y être chassés. Un jour, demain, si j'arrivais à les persuader.

Je fermais les yeux tout en imaginant Aydann, c'était le premier à qui je devais parler : je soupirais. Inconsciemment, je savais que la tâche ne serait pas aisée.

En entendant le commandant de bord nous annoncer notre atterissage imminent, je rassemblais mes affaires presque machinalement, toujours inquiéte.

Qui pouvait savoir de quoi demain serait fait ?

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De la lucarne de l'avion, j'apercevais la ville resplendissante de Luxor parée d'ocre et de rose dans son écrin de verdure et de désert intimement mélés. Le nil luisait sous un chaud soleil et quelques falouques aux voiles gonflées glissaient paresseusement sur son onde. La magie me gagna immédiatement, j'avais hâte de me mêler à la foule, de descendre parmi les soucs, de goûter des dattes gonflées de sucre et de visiter les merveilles de ce lieu.

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Mais avant, j'avais une importante mission à effectuer : trouver Aydann. Je frisonnais malgré la douce chaleur du milieu de journée. 

Je descendais de l'avion, anxieuse, serrant mon sac à dos, recherchant fébrilement la dernière lettre que je m'étais écrite, la carte où figurait le nom de la ville où se trouvait le tombeau d'Ânkhtyfy.

Je sursautais quelqu'un venait de me parler.

"Mademoiselle Jane Steward ?" répétait la voix teintée d'un accent oriental.

Oui. j'étais bien Jane Steward.

Un jeune homme en livrée d'hôtel se tenait devant moi avec un grand sourire commercial.

"Bienvenue, Mademoiselle."commençait-il. Il s'empara avec dextérité de mon unique valise.

"Je me charge de prendre vos affaires, Mademoiselle, comme vous nous l'avez spécifié dans votre mail de réservation."

Béate, je me laissais faire. 

"Et si vous êtes prête, je vous conduis immédiatement à votre voiture. Elle est juste garée là-bas, si vous voulez bien me suivre..."

Je reconnaissais bien là mon sens extrême de l'organisation, j'avais tout prévu. Peut-être pour m'éviter un stress supplémentaire afin de me concentrer exclusivement sur mon objectif : retrouver rapidement Aydann Crosswood et gagner du temps.

Je gardais mon sac à dos tandis que le groom emmenait le reste de mes affaires. J'étais heureuse d'avoir déjà choisie une tenue "tout terrain". Je ne perdrais pas de temps. Les clefs étaient sur la voiture, une carte plus précise de la région était sur le siège avant. 

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J'avais une trentaine de kilomètres à faire avant d'arriver à la tombe, il me fallait suivre scrupuleusement les directives pour ne pas me perdre dans cette région désertique. Rien de plus simple pour la scientifique rigoureuse que j'étais.

La nuit commençait à tomber maintenant sur les collines, un panneau simple m'indiquait que je me trouvais à quelques mètres à peine du tombeau d'Ânkhtyfy. Je laissais ma voiture au bord de la route, et je me décidais à continuer à pied à travers le désert brûlant.

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Tandis que je gravissais la dune ardente mon coeur se serra d'angoisse, et si j'arrivais trop tard !

Je pressais le pas ignorant la fatigue de cette marche forcée sur le sable lourd trop anxieuse. J'arrivais enfin devant la porte du tombeau.

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La porte était inscrutée dans un immense bloc de pierre ornée de hiéroglyphes. J'eus à peine pousser la porte que le mur s'ébranla bruyamment, s'enfonçant verticalement dans le sable pour me céder le passage.

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Un couloir étroit se dessinait devant moi. J'avançais avec prudence à cause du sable qui semblait recouvrir le sol un peu partout. Les tombeaux étaient connus pour recéler des stratagèmes pour éloigner les visiteurs inopportuns, peut-être que ces amas de sable cachaient des pièges ? Je devais être sur mes gardes.

Je ne tardais pas à trouver, collée au mur, une porte grandiose entourée de deux hautes colonnes en pierre surplombée d'un fronton gigantesque, munie de deux larges battants en bois barrés d'une lourde chaîne qui m'empêchait de l'ouvrir.

Sur le côté, j'observais un mécanisme ou il semblait manquer quelque chose comme une clef.

N'ayant pas d'autres recours, je décidais de fouiller la pièce à la recherche d'indices. 

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 Peut-être ce sarcophage contenait-il quelque chose ?

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A part de vieux parchemins, je ne trouvais rien de particulier. 

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Un amas de pierres sur le coté de la pièce attira mon attention, je décidais de déblayer tout cela espérant trouver quelque chose. Par chance, des vieux outils avaient été abandonnés sur place.

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Je dégageais un coffre au lourd couvercle de marbre que je décidais de soulever avec précaution. Le coeur battant, j'espérais y trouver la clef manquante qui me permettrait de continuer l'exploration du tombeau.

Bien que je me fis la remarque que tout cela était bien trop facile, je trouvais au fond du coffre une lourde clef en pierre qui correspondait à l'empreinte creusée située près de la porte fermée par une lourde chaîne. Une aubaine !

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Je décidais de l'appliquer à la porte et de voir ce qui se passait.

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La lourde chaîne qui barrait la porte céda au mécanisme me laissant la voie libre.

J'entrais dans une autre salle.

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Je fus surprise de trouver une pièce fermée dans laquelle se trouvait un unique bassin d'eau chaude. N'ayant aucun autre choix, j'y plongeais sans hésiter. Mes pieds touchèrent le fond rapidement et mes doigts touchèrent deux leviers que j'actionnais sans trop savoir à quoi cela servirait.

En remontant à la surface, je pris conscience qu'une porte s'était ouverte prolongeant mon excursion du tombeau.

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J'aperçus au sol des dizaines de pièges circulaires que le deuxième mécanisme situé dans le bassin avait certainement neutralisé. 

Je remerciais ma bonne étoile car je n'aurais pour rien au monde souhaité savoir à quoi j'avais pu échapper.

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En continuant dans le couloir, je me sentis infiniment fragile aux côtés d'immenses colosses de pierres qui trônait dans la pièce. C'était comme si un chemin s'ouvrait devant moi, comme si quelqu'un était déjà passé par là et avait ouvert un passage car je remarquais au sol que les pièges avaient été désactivés.

Je continuais malgré tout avec une extrême prudence.

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Je fus surprise d'arriver devant un cul de sac où deux immmenses statues à tête de loup et aux corps d'hommes trônaient, me barrant la route ;  leurs bras d'ébéne soutenaient deux immenses vasques embrasées qui dispensaient une lumière chaude et diffuse.

Je distinguais quatre murs mais aucune autre issue, juste un énorme réservoir d'eau au centre.

Décidément ! J'étais à peine remise de ma première baignade que le sort m'en désignait une autre d'office.

Sans hésitation, grimpée sur le rebord du bassin, je plongeais la tête en avant. Si c'était le seul moyen de poursuivre l'exploration de ce tombeau, j'en aurais au moins le coeur net.

Sans aucun repaire, je m'enfonçais vers le bas cherchant en aveugle. Mes mains ne trouvèrent pas de fond cette fois, mais au contraire un boyau étroit que j'empruntais avec appréhension.

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A bout de souffle, j'émergeais dans un autre bassin situé dans une autre salle. La chaleur ardente qui régnait ici me saisit la poitrine. 

Je jetais un coup d'oeil rapide pour chercher par où je pourrais bien passer. Je dicernais au fond de la salle comme la silhouette d'une haute porte qui me pourrait permettre de poursuivre mon périple. 

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Les flammes semblaient sortir du sol et cerner les drôles de statues que j'avais déjà aperçues dans les salles précédentes. Et si...

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Je m'armais de patience pour pousser les colosses un à un pour désactiver les pièges et me frayer un passage. Etrangement, les statues étaient suffisamment légères pour être poussées.

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Ma joie d'avoir franchi un à un les multiples pièges de feu qui se trouvaient cachés au sol tomba rapidement : la porte que j'avais réussi à atteindre était malheureusement fermée.

Je baissais la tête : j'étais mouillée, fatiguée et vidée. Il n'y avait ici aucun mécanisme semblable à la première porte, ni de tas de gravas à dégager, ni de coffre à ouvrir : comment allais-je donc m'y prendre ?

Les yeux fixés au plancher, je me disais que mon exploration s'arrêtait bel et bien là. J'en étais désespérée.

Soudain mon attention fut attirée par une différence de hauteur entre les carreaux du sol comme si quelque chose était caché là sous mes pieds. Anxieuse, je décidais de me tenir dessus pour voir ce qui allait se passer. 

Judicieusement, une plaque de pression cachée s'activa. Mon poid placé dessus en fit apparaître une autre qui disparaissait aussitôt si je décidais de bouger. 

Je m'attelais à déplacer les colosses sur leur emplacement. De nouveau gagnée par un sentiment de victoire.

Ma patience et mes efforts furent récompensés car une troisième plaque de pression apparue dans le sol comme par magie. 

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J'espérais que mon poid suffirait à actionner le mécanisme qui libérerait la porte de la lourde chaîne qui entravait son passage.  

Et j'eus raison. Dans un craquement significatif, la chaîne tomba au sol, et la porte s'ouvrit sur une immense salle.

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Mon coeur se mit à battre très fort. J'apercevais la silhouette d'un homme grand et mince aux cheveux courts noirs, vétu d'habits traditonnels. 

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Il resta immobile pendant que je faisais quelques pas de plus. Des buissons étranges aux baies ardentes agrémentaient une salle grandiose parée de couleurs chaudes et ardentes où trônait un cercueil antique, des sphynx ailés et de hautes colonnes et de grands murs couverts de hiéroglyphes.

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"Jane Steward..." entendis-je prononcer une voix rauque et vibrante que j'aurai reconnue entre mille. "Qui à part vous, oserait troubler mon repos..."

La voix était menaçante. Je frisonnais des pieds à la tête. Je n'étais manifestement pas la bienvenue.

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Mais je m'en moquais. Rien ne m'importait plus que de savoir qu'il était là, vivant, et plus élégant que jamais.

Il avait retrouvé l'allure que je lui avais toujours connu : jeune, grand, charismatique, la silhouette amincie dans une longue djellaba blanche, les cheveux noirs coupés courts.

Il avait sans nul doute trouvé à se nourir car seul le sang humain aurait pu terminer sa transformation jusqu'à le guérir entièrement de la mésaventure qui avait été la sienne. 

Je repensais à cette fois où, envers et contre tout, il s'était précipité malgré le danger qu'il encourait en pleine journée pour aller chercher un docteur afin que j'accouche en sécurité sur notre île. Mon coeur débordait d'amour pour lui et j'avais envie de lui hurler. Au lieu de cela, je tremblais comme une feuille incapable de dire un mot.

Mon coeur battait jusqu'à vouloir se rompre rien qu'à le savoir là, à quelques pas de moi. Comment allais-je lui dire tout ce que je ressentais pour lui ? 

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"Aydann" murmurais-je gémissante "Aydann..."

Je savais qu'il avait entendu ma plainte mais il avait choisi de ne pas y répondre. Il me tournait résolument le dos :

"Nous n'avons plus rien à nous dire, Jane. Allez-vous en."

Je restais immobile, tétanisée par son attitude glacée.

"Aydann" osais-je répéter.

Il parut agacé par mon obstination mais ne bougea pas. 

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"J'ai besoin de vous parler, Aydann. Je vous en prie, regardez-moi." insistais-je 

Le temps fut long avant qu'il ne décide de se retourner et qu'il accepte de venir vers moi. 

Je le trouvais amaigri, les traits tirés, le visage blanc marqué d'une barbe de plusieurs jours, un laisser-aller qui ne lui correspondait pas. Pensait-il vraiment au suicide ? 

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Si il fallait en croire mon message posté par moi-même du futur : oui, irrémédiablement et irréverciblement.

Cette constation sonnait bien avec le ton froid et déterminé qu'il employait et la froideur qu'il avait à mon égard. Je frisonnais : comment pourrais-je le faire changer d'avis ? 

Il planta enfin son regard dans le mien, je reculais : ces yeux étaient deux puits profonds insondables d'où je ne percevais aucun sentiment. La voix était séche et coupante : 

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"Il me semble que vous avez eu votre chance, Jane." commença t'il d'une voix dure. "Vous avez préféré la prendre et voler de vos propres ailes : vous êtes parti, il me semble.  Je dois maintenant faire ce que j'ai à faire ici et c'est sans vous que cela se passe."

Déjà, il pivotait sur ses talons me tournant le dos délibérément.

Mon coeur se serra. Sa dureté me touchait violemment, m'enlevant toute volonté. Je dus me concentrer sur mon objectif pour ne pas céder à la peine qu'il venait de me faire et au renoncement que sa froideur m'obligeait à avoir.

"De quelle chance parlez-vous ?" lui demandais-je presque naïvement.

"Vous avez la mémoire courte en plus, Jane" se moqua t'il sans bouger "Il me semble vous avoir libérée de moi, c'est ce que vous vouliez non ?"

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Je n'arrivais pas à répondre. Ma gorge était nouée. J'avais l'impression que lui et moi, n'avions eu aucun passé commun. En tout cas, c'était ce qu'il me faisait ressentir violemment à travers son impassibilité.

"Non." bégayais-je. "Ce n'est pas ce que je voulais. Enfin. Si, bien sûr... Mais je ne voulais pas que cela finisse comme cela..."

Il ricana.

"Toujours la même chose avec vous Jane. Je, je et je."

Il claqua ses sandales comme pour manifester sa mauvaise humeur puis partit à grand pas vers le cercueil qui lui servait de couche.

Sa dernière phrase sonna comme un coup de glaive :

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"Soyez une bonne fille, Jane. Eteignez la lumière avant de partir..." morda-t'il tout en s'installant lentement sur le cercueil de marbre noir.

Je restais la bouche ouverte, médusée par son attitude froide et cruelle. Nul doute, il mettait un terme à notre conversation et d'une manière impitoyable.

Je restais un instant sans rien dire : hésitante, meurtrie dans ma chair et au plus profond de mon coeur. 

Je n'avais pas fait tous ses kilomètres pour me faire rejeter ainsi !

Je m'avançais vers lui, les yeux fronçés et déterminés.

"Vous n'avez pas le droit de me traiter ainsi" fis-je soudain. "Même si vous semblez vouloir le nier, nous avons eu un fils vous et moi. Que comptez-vous faire pour lui ?"

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Il resta allongé impassible, les yeux résolument fermés. 

"Je compte sur vous, Jane. Vous êtes une femme pleine de ressources. Je suis sûr que vous arriverez à l'élever seule. Je crois d'ailleurs que vous n'avez jamais su vivre avec quelqu'un n'est-ce-pas ? Enfin, pour autant que ma mémoire s'en souvienne, ce n'est pas votre fort."

Je tempestais tandis qu'il restait impassible :

"Ce n'est pas vrai !" tentais-je en m'agaçant mais ma colère retomba vite, je n'avais aucun souvenir de vie à deux à partager.

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Je restais un moment silencieuse tandis qu'il restait immobile.

"Mais nous avons eu des bons moments vous et moi" commençais-je soudain en repensant au temps passé sur l'île. "Nous pourrions réessayer..."

Il éclata de rire tout se redressant d'un bond.

Puis il me pointait du doigt comme pour appuyer sa phrase.

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"Vous avez eu des bons moments avec votre créature, Jane. Comme j'en ai eu quand vous êtiez la mienne. Je ne sais pas pourquoi vous vous obstinez, tout cela est bel et bien fini. Je vous ai déjà fait des propositions quant aux possibilités que nous pouvions avoir vous et moi pour le futur, vous les avez refusez, il me semble."

Je m'agaçais faisant les quatre cent pas à ses côtés. 

"J'ai l'impression de vivre une histoire de fou." marmonnais-je.

Je lui fis de nouveau face :

"Je n'ai rien refusé du tout, je vous ai laissé choisir pour moi." dis-je agacée par sa mauvaise foi.

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Je bafouillais et il me laissait me démener avec moi-même, le regard fixe sans broncher. Je n'arrivais plus à mettre de l'ordre dans mes idées. Pourtant j'avais tout prévu, visualisé notre rencontre, imaginé nos retrouvailles, mais rien ne se passait comme je l'avais conjecturé. Je perdais mon sang-froid, gagné par la frustration de cette situation.

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"Et vous !" éclatais-je soudain "Je peux vous en dire autant ! Vous vous êtes vite débarrassé de moi avec votre "Vous êtes libre, Jane". C'était bien facile, çà !"

Il se releva d'un bond, vexé que je ne lui reconnaisse pas une conduite magnanime. Il fronça les sourcils avant d'ajouter :

"Toujours la même Jane, incapable d'éprouver de la reconnaissance pour ce que les autres font pour vous. Je vous ai épargnée ! Est-ce si difficile à comprendre ?"

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Il paraissait las, ses épaules étaient basses et sa tête lourde. Les mots semblaient être difficile à prononcer, il continua d'une voix éteinte :

"J'ai également choisi ce que vous vouliez le plus Emma-Jane car au contraire de vous, je sais me montrer attentif à vos désirs."

Il  soupira avec lassitude avant de continuer :

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"Ne me reprochez pas maintenant d'avoir réalisé votre vœu le plus cher : vous avoir débarrassé de moi !"

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Le silence envahit la salle. Nous étions l'un face à l'autre et nos yeux lançaient des éclairs.

"Ce n'était pas mon vœu le plus cher" soupirais-je à mon tour lasse souhaitant mettre fin à la bataille mais manifestement il n'avait pas envie de me croire.

Je respirais bruyamment, le souffle coupé par l'intensité de la conversation. J'essayais de retrouver mon calme, ne pas me laisser aller à une médisance inutile.

"Et pourquoi serais-je là maintenant à votre avis ?" tentais-je d'un ton plus doux. 

Il ne sembla pas céder à mon ton mielleux et préféra rester sur ses gardes. Il glissa sur le sol pour se rapprocher de moi comme pour m'intimider :

"Je ne sais pas, dîtes-le moi. Sans doute pour venir finir votre travail. Pour prendre du bon temps."

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Il me regardait avec un mélange de provocation et d'arrogance. Je rougissais sous son regard ardent et évocateur. Mais je n'arrivais pas à lui répondre blessée par ses insinuations injustes.

"J'ai traversé la moitié du monde pour vous retrouver. N'est-ce pas la preuve que vous vouliez ?" 

Mais il resta impassible.  

"Désolé, Jane. J'en doute."

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Il me tourna le dos pour la énième fois me laissant complètement frustrée par sa remarque. 

"Je suis là pour..." commençais-je maladroitement tentant de captiver une nouvelle fois son attention.

"Pour ?" répétait-il seulement en se décalant un peu vers moi.

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Il était si froid qu'aucun son ne sortit de ma bouche. 

"Petite joueuse." persifla-t'il avec dédain en me faisant de nouveau face. "Vous me décevez, Jane."

Sa proximité enflammait mes sens et j'avais l'impression qu'il en jouait. Je me sentais comme mise sur le grill, constamment sur le qui-vive.

Bien qu'il ne me rendait pas la tâche facile, je prenais mon courage à deux mains pour lui dire d'un trait :

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"Je suis là pour vous." 

Il resta un instant à me dévisager tel un lion observant sa proie puis il bondit sur moi m'attrapant par la taille tout en se collant contre moi :

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"Pour moi ?" commença-t'il d'un ton badin "Tiens quelle surprise."

Il marqua une pause agaçante me tenant toujours serrée contre lui. 

"Vous parlez d'Aydann Crosswood ou du vampire Ânkhtyfy, Jane ? Car vous avez bien compris que votre Aydann Crosswood n'existe plus... bien sûr."

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Je le regardais le visage assombri, les yeux noirs de colère, son étreinte m'empêchait de m'échapper et il s'en réjouissait. 

"Et bien je pense que vous avez tort." laissais-je échapper entre mes dents "Pour moi, Ânkhtyfy et Aydann Crosswood ne font qu'un."

Il eut un instant de silence puis il se plaqua tout conte moi avec indécence.

"Et qu'est-ce qui peut bien vous mettre cette idée-là dans la tête, Jane ?" 

Je tentais encore de m'échapper sans résultat :

"Le fait que vous jouez avec moi comme un chat avec une souris, que vous cherchez toujours à me séduire, à m'embrasser plutôt qu'à penser à vous nourrir. Car là vous avez faim, n'est-ce-pas ?"

Il eut un petit sourire en coin.

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"Mais je suis un vampire, très chère. C'est ma nature que de séduire les femmes, de les faire me céder d'un seul regard, d'une seule caresse, d'un seul baiser, de jouer avec elle, cela aiguise mon appétit. Et vous me donnez très faim, Jane" minaudait-il.

Je maintenais l'intensité de son regard. Et cette fois, je décidais de ne pas me laisser intimider par ses sous-entendus.

"Est-ce de la nature d'un vampire que de vouloir provoquer l'amour ? Parce que c'est ce que vous avez fait avec moi... et il ne me semble que cela n'avait rien à voir avec la nourriture..." continuais-je d'une voix basse presque dans un souffle.

Il ne disait plus rien. Il soutenait à son tour mon regard, silencieusement. 

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"En êtes-vous sûr" me dit-il seulement. 

Je ne voulais pas en rester là. Mon cœur savait que je devais aller au-delà de moi-même pour prétendre à lui faire comprendre ce que je ressentais pour lui et qu'il niait éprouver pour moi.

"Je le sens dans vos yeux quand vous me regardez et je sais que c'est différent..."

Il me contempla avec amusement :

"Vous êtes bien présomptueuse, Jane. Mais c'est ce qui vous caractérise."

Étrangement, il me repoussa et prit de la distance comme si il semblait incapable de se laisser aller à une intimité qu'il ne contrôlait pas.

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Je le regardais avec insistance :

"Pourquoi refusez-vous de l'admettre." le bravais-je pour tenter de le retenir.

Mais je l'avais perdu, il se redressait pour prendre un air taciturne, déterminé et revanchard :

"Je ne veux pas admettre quoi ? Que vous cherchez  à tout prix à avoir raison ? Car Forcément en disant cela vous servez votre cause comme d'habitude. A quoi jouez-vous encore, Jane ? Voulez-vous avoir mon aval pour que vous me redonniez encore cette potion miraculeuse qui vous rendrait votre Aydann Crosswood ? C'est çà ?"

Il était dédaigneux et menaçant.

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"C'est bien tout ce que vous voulez n'est-ce pas Jane. Retrouvez votre bellâtre ?"

Je fronçais les sourcils :

"Vous êtes dur avec vous-même." dis-je soudain "Je n'ai pas besoin de vous donner quoique ce soit pour voir Aydann Crosswood. Je sais qu'il est là en vous. Il a toujours été présent. Vous êtes le seul à ne pas le voir. Pourquoi ? "

Il eut un rire tonitruant et moqueur tout en éludant ma question :

"Cela vous arrangerait bien que je vous dise : vous avez raison, Jane. Vous pourrez ainsi vous pardonner pour vos mauvaises actions, bien sûr ! Un vampire humanisé et une sorcière justicière et tout cela grâce à vous."

Il se rua sur moi plein de colère.

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"Mais ce n'est pas comme cela que je le vois, moi. Désolée, Jane. Vous n'êtes qu'une revancharde petite sorcière qui a passé le plus clair de son temps, 60 ans de sa vie exactement, à ressasser sa haine à mon encontre, à me chasser, à me harceler sans rien vouloir écouter jusqu'à exercer, sans pitié, sa vengeance selon son propre jugement et ses propres règles."

J'étais de nouveau saisi par sa rage et son ressentiment. Il ne semblait pas en avoir fini. 

"Quand vous êtes devenu immortelle, vous avez passé 600 ans à mon service en feignant être mon amie pour finir par me monter l'arnaque la plus inexcusable ! Et vous voulez que moi Ânkhtyfy, je vous fasse confiance ? Non merci, Jane. Autant faire confiance à un serpent, j'aurais plus de chance de m'en sortir indemne !"

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Je le regardais surprise mais il ne me laissa pas le temps de réagir.

"Je sais lire en vous, Jane. Car contrairement à vous, je vous ai..." il se racla la gorge comme pour éviter de prononcer un mot qu'il aurait pu regretter.

"Je vous ai... observé pendant 600 ans. Et la seule chose qu'il ressort de cela, c'est que vous êtes une menteuse rancunière et acharnée.... Alors, excusez-moi mais j'ai dû mal à croire que vous ne mijotiez pas encore quelque chose."

Il fonça sur moi terrifiant.

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"Je vous aime" lançais-je soudain m'étonnant moi-même me moquant de ce qu'il pensait de moi.

Il ouvrit les yeux après une longue minute d'un silence pesant.

"Ah bon. Étonnant, cela. J'aurai pensé que vous n'aimiez que vous, Jane Steward."

"Ce n'est pas juste. Vous ne pouvez pas me dire cela."

"Et pourquoi pas, Jane. C'est une constatation. C'est tout."

Il eut un geste abattu.

Je baissais la tête sous la nouvelle pique qu'il venait de me lancer incapable de dire quoique ce soit.

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"Soit vous m'aimez." commença-t'il avec lassitude "Si vous voulez." Il semblait las et peu convaincu.

Puis il ajouta d'un ton morne :

"Mais pour ma part, je n'ai plus rien d'humain, Jane, même si j'ai su faire un enfant avec vous ou si j'ai cru vous montré avoir du plaisir en votre compagnie. Je suis un vampire. Je serais et resterais un vampire et pour l'éternité ! Rien ne me fera redevenir l'homme que j'étais. Il est mort depuis longtemps. Quant à ma nature, elle me pousse à vivre d'une manière différente de la vôtre. J'ai l'impression que vous me demandez d'être ce que je ne peux être : un homme comme tous les autres. Si il est une chose qui n'est pas morte en moi c'est mon désir d'intégrité. Je suis désolée, Jane mais vous devez le comprendre. Il ne me reste que cela. Je souhaite continuer à être l'égal de moi-même, avec tous mes défauts puisque j'en ai comme le commun des mortels, et je regrette si cela vous déplaît mais je ne souhaite pas changer même pour vous, Jane. Restez aussi telle que vous êtes : libre, obstinée et fidèle à vos passions."

J'étais lasse de sa résignation, lasse de devoir lui dire ce que j'éprouvais pour lui et voir que rien ne pouvait le contenter.  

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"Mais je ne veux pas vous changer..." bégayais-je. "Cela m'importe que vous restiez le même, tel que vous êtes, c'est cela que je suis venu vous dire."

Il regardait le sol, le regard sombre.

"Je pense que vous n'êtes pas encore vous-même, Jane." soupira-t'il d'une voix basse. "Vous n'êtes encore que l'ombre de vous-même, et je ne sais pas pourquoi. Qu'est-ce qui vous manque à chaque fois. Il faut toujours que vous oubliez quelque chose dans vos potions. Ce n'est pas comme cela que j'arriverais à vous faire comprendre ce que je veux vous dire..."

Il me regarda étrangement :

"600 ans, Jane... Et à chaque fois, vous vous arrangez pour tout oublier." 

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Il soupira :

"Laissez-moi de nouveau être votre mémoire, Jane, puisque définitivement, je ne vous sers qu'à cela."

Il prit une profonde respiration avant de commencer :

"La potion de dédoublement de personnalité qu'Emma a utilisé sur elle vous a scindée en deux personnes, elle-même et une copie d'elle, vous."

Je fronçais les sourcils prête à réagir mais il m'en dissuada d'un geste :

"Pour l'instant, pour une raison que j'ignore, il ne me semble pas que vous ayez retrouvé l'intégralité de votre mémoire, Jane. C'est ce qui vous permet d'être encore si conciliante à mon égard. Mais je vous l'assure votre passé vous a toujours rongé et je suis coupable de cela, je le sais. Cela fait 660 ans que c'est ainsi. Jamais je me le pardonnerai. Je me sens si coupable de vous avoir causé ce tort. Mais je ne peux revenir en arrière, ce qui est fait, est fait."

Je secouais la tête me tordant les mains, soudain nerveuse.

"De toutes les façons, même si j'avais la possibilité de changer le cours du temps, de revenir en arrière et de ne pas faire ce que j'ai fait, décimer toute votre famille et votre village, Jane, je ne le ferais pas. Rien que pour conserver l'image de ce que vous êtes pour moi. Même si la haine a rongé votre cœur à mon égard et même si jamais je n'aurai votre amour, je crois que je préfère vous savoir telle que vous êtes, égale à vous-même plutôt que l'ersatz que vous êtes devenu. Et je dois vous l'avouer, j'en suis coupable. J'ai aimé vous savoir mienne à chaque instant ou vous avez été Jane Steward, je me suis délecté de pouvoir vous serrer dans mes bras, de vous tenir contre moi, de vous embrasser, de pouvoir vous faire l'amour. Si Dieu existe, je le remercie de tout cela. Car j'ai été le plus heureux des hommes. Mais je sais que cela ne peut plus durer : mon égoïsme finirait par faire de moi quelqu'un que je ne veux être à aucun prix. Jane Steward n'aura existé que dans mes rêves les plus fous et les manigances d'une vieille femme revancharde..."   

Je restais incapable de dire un mot de plus. Il avait réussi à me clouer le bec.

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Moi ! Une copie d'Emma ! Un ersatz ! Le coup violent qui me porta au cœur sembla soudain mettre la révolution dans ma tête dont les souvenirs semblaient pourtant si bien rangés. 

Je revendiquais mon existence ! J'étais Jane Steward, un être tout différent, crée d'un sort peut-être, mais est-ce que cela devait m'enlever toute légitimité ? C'était impossible ! J'étais la meilleure partie d'Emma, celle qu'elle avait envoyée en sacrifice. Je me sentais différente de la vieille femme aigrie qu'elle avait été et bien loin du combat de sorcière qu'elle avait mené. Oui, elle m'avait cachée qui j'étais mais n'avais-je pas eu alors ma propre identité ? 

J'aimais à penser que mes parents m'attendaient encore dans cette bonne vieille ville de Twinbrook lorsque j'avais cru m'installer sous leurs conseils à Riverview. J'avais été si fière t'intégrer le service scientifique de cette petite ville pour y commencer ma carrière. Si intéressée de suivre leurs habitants et d'y rencontrer Aydann Crosswood, le vampire. Je me souvenais avec quelle passion, j'avais souhaité le combattre pour mettre un terme à ses agissements démoniaques. Et rien n'avait changé dans mon cœur, si ce n'est l'amour que j'avais maintenant pour lui.

J'avais l'impression qu'il s'était écoulé des centaines d'années car tant de choses s'étaient passées depuis mon arrivée à Riverview. Je n'imaginais pas que ma vie puisse être autrement que celle là : moi, Aydann et notre fils.

Je le regardais en silence.

Il s'était couché de nouveau.

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J'aimais voir sa silhouette léviter au-dessus du cercueil. Toute appréhension avait disparu. Était-ce parce que j'avais le secret pour contrôler sa nature ? Était-ce cela qui avait supprimé toute la rage que j'avais en moi de le voir détruit ? Parce que je savais que si il acceptait de se nourrir de mes "plasmas fruits", il serait un individu à part entière, et pourrait s'intégrer parfaitement dans la société sans plus lui nuire.

Sa voix tonna comme un coup de tonnerre qui me fit sursauter.

"Ainsi, c'est cela qui vous amène ici." gronda t-il.

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"Je me disais bien que vous ne pouviez pas venir sans avoir mijoté quelque chose. Vous avez encore trouvé  une solution pour faire de moi ce que vous voulez, Jane. Et dire que j'ai perdu mon temps à vous écouter et à vous parler. Décidément, l'histoire se répète."

J'étais saisie par la surprise. Comment avait-il pu m'entendre ! 

Je voyais bien, vu sa réaction, qu'il se sentait trahie par mes pensées. Et je me sentais impuissante.

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Il se tenait debout devant moi. Cette fois, il avait retrouvé sa superbe et me regardait avec dédain et véhémence.

"Je crois que je devrais vous tuer Jane Steward pour retrouver enfin la paix." dit-il soudain d'une voix extrêmement grave. "Regardez ce que vous êtes devenu ! Un fantôme de vous-même. Au moins quand vous me détestiez, j'avais l'impression d'exister dans votre rage ! Regardez quel ignoble monstre vous êtes ! Je vous avoue mon amour pour vous et vous n'entendez rien, ne voyez rien, ne comprenez rien. C'est inacceptable !"

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Je sursautais. Il venait de me rejoindre en une fraction de seconde et avait saisit ma gorge d'une seule main, comme dans ce rêve que j'avais fait, et où j'étais enfant.

Il me souleva de son seul bras tendu me laissant me balancer au-dessus du sol, la gorge cuisante sous la pression de ses doigts :

"Voilà la solution au problème" répéta-t'il. "Y mettre fin."

"Aydann !" hoquetais-je avec difficulté "Je vous en prie... Lâchez-moi..."

Il desserra un peu ces doigts me permettant de reprendre mon souffle mais il ne me lâcha pas.

"Pourquoi, Jane. Vous ne répétez sans cesse que les mêmes erreurs..." 

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Je gigotais le forçant à me lâcher mais il ne semblait éprouver aucune douleur.

"Qu'avez-vous encore inventé cette fois ? Qu'est-ce que c'est que cette histoire de plasma fruit ? Une de vos idées géniales pour faire de moi encore votre gentil toutou ?"

Je ne réagissais pas, exclusivement tournée vers ce que je pourrais lui expliquer et au destin que j'entrevoyais pour lui.

"Posez-moi à terre, Aydann. Je vais tout vous expliquer... S'il vous plait."

Il me regardait implacable.

"Pas cette fois, Jane. Je suis désolé. Donnez-moi au moins une seule bonne raison pour le faire."

Ses yeux avaient pris une couleur ardente et ses narines se soulevaient bruyamment comme si l'odeur de mon sang ou l'expectative de pouvoir le boire, enflait sa résistance et sa détermination. 

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"Vous n'auriez pas dû revenir, Jane. Je vous l'ai déjà dit, Ânkhtifi n'a rien à voir avec Aydann Crosswood. Il est comme Emma, méfiant et aigri."

La voix était pénétrante et ferme, c'était la différence que j'avais remarqué en le retrouvant. Il était le sauvage et millénaire vampire qu'Emma avait pourchassé depuis des années. Tandis qu'il resserrait de nouveau ses doigts sur ma gorge, je comprenais à qui j'avais à faire. Comment avais-je pu croire que je pourrais le ramener à la raison par le seul fait de lui dire que je l'aimais. 

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Ma colère enfla et des sentiments que je croyais disparus resurgirent du plus profond de moi, une réminiscence de mon passé qui me frappait en plein visage. 

J'étais bel et bien encore la chasseresse, Emma Jane, la petite fille qu'il avait laissé pour morte dans la neige après avoir massacré froidement toute sa famille.

Mes pieds se démenèrent contre lui, frappant son corps, mes mains se mirent à se lever pour griffer et le meurtrir. Des larmes coulaient de mes yeux et malgré ma gorge tuméfiée, je laissais souffler ma rage. Assassin ! hurlais-je dans ma tête sans répit. Assassin !

Les doigts d'Ânkhtifi se refermaient petit à petit me privant de plus en plus d'air. 

"C'est la seule solution..." l'entendis-je murmurer tandis que ces doigts serraient avec force ma gorge sans la lâcher. "J'aurais dû le faire la première fois, et n'éprouver aucune pitié"

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La terreur commença me gagner, j'osais un dernier effort pour le ruer de coups de poings mais il restait imperturbable.

Mon sang gonflait dans mes tempes et le manque d'air commençait cruellement à annihiler mon énergie. 

La mort était au bout de ses doigts qui ne semblaient pas vouloir relâcher leur étreinte. Le vampire avait choisi une drôle de façon de me faire mourir. Une façon humaine, comme si il cherchait à se débarrasser d'un mauvais rêve. 

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Le passé resurgit dans ma tête à la vitesse lumière, mais je le chassais. Non. Ce qui m'importait le plus c'était lui. Aydann. Si il fallait mourir maintenant, voilà ce que j'avais envie de me rappeler. Lui, ses baisers, ses caresses, sa gentillesse, ses attentions, son sacrifice. Je t'aime, Aydann. Je t'ai toujours aimé. J'ai été si maladroite. Mon projet était si simple, pourtant. Si simple. Et tu n'aurais même pas eu besoin de le suivre puisque je t'aurai offert mon sang. "Aydann. Aydann." égrenait mon souffle sans cesse. Mais je devais divaguer. 

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"Aydann." répétais-je encore inlassablement les yeux noyés dans le vide.

Je ne sais pas combien de temps, je restais là, entre la vie et la mort. Pourquoi ne m'avait-il pas tuée pour mettre un terme définitif à notre combat ? 

Puis ce fut un silence total dans ma tête et je me réveillais en sursaut.

Quelqu'un était là, assis par terre, à quelques mètres de moi adossé contre un haut mur couverts de dessins étranges. Le visage dans les mains. Je ne reconnaissais pas cette silhouette longue masculine presque juvénile ni ses cheveux noirs coupés courts bien que l'allure me semblait étrangement familière. 

Puis tout à coup ma rage enfla envahissant ma tête lorsque je reconnus son visage car maintenant il me dévisageait sans me quitter des yeux.

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Mon passé défila soudain avec rage dans mon cerveau comme si le simple fait de le reconnaître le fit rejaillir d'outre-tombe. Comment avais-je cru être débarrassée d'un si lourd tribu ? Je me réveillais une nouvelle fois comme si cela avait été d'un long sommeil.

Je sentais encore l'odeur de la neige et l'âcreté du sang, j'entendais les râles de ceux qu'ils avaient laissés en vie, la puanteur des cadavres et celle de sa tunique en cuir. Je revoyais ses yeux ardents d'animal qui venaient de tuer et de prendre la vie à chacun des êtres que j'avais si chèrement aimés. 

Mon visage se serra d'un rictus de haine, et mon passé défila encore consciencieusement devant mes yeux, lutte après lutte, sans relâche, sans répit. Mes luttes, mon acharnement, mon combat contre lui, année après année.

Nos yeux s'accrochaient l'un à l'autre. Les siens avaient pris une couleur froide et résolu. Il savait que je venais de retrouver mon identité et, étrangement il en paraissait soulagé.

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Il se leva comme si il portait tout le poids du monde sur ses épaules, et je l'imitais me rapprochant de lui tel un fauve prêt à bondir sur sa proie, épiant et suivant chacun de ses mouvements.

"Ce sera non, Jane." me dit-il soudain alors que nous nous dévisagions comme deux chiens de meute. 

Je ne connaissais pas ce prénom qu'il employait. Est-ce encore une ruse du monstre qu'il était ? La haine noyait mon cœur. Pourquoi ce prénom me mettait-il mal à  l'aise. Inconsciemment, je m'accrochais à mes luttes d'enfant pour survivre à la maladie et à la famine, à ma rage de vaincre contre les autres, tous ceux qui m'avaient rossées pour obtenir de moi ce qu'il voulait jusqu'à ce soit moi qui les frappent à mon tour.

J'avais du accepter les coups pour survivre et pour apprendre à me battre, à lutter jusqu'à ce qu'à mon tour, je puisse être respectée. Mon adolescence défilait cruelle et intransigeante bien loin de la chambre dorée que j'aurai voulu m'imaginer. Le moyen âge n'était pas réellement, la meilleure époque pour vivre que l'on soit un homme ou une femme. Je ressentais chacun des coups sur ma peau, et mes os me faisaient souffrir des nombreuses cassures que j'avais dû endurer. Je ressentais les engelures qui brûlaient mes doigts de mes nombreuses nuits à dormir dehors dans la neige, n'ayant pas de foyer où dormir. La seule volonté qui m'avait poussé à survivre contre le froid, la famine, la maladie, les sévices était là devant moi comme autrefois. 

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Il avait juste changer d'allure, pris une forme avenante, séduisante. Une forme à laquelle je ne devais en aucun cas me laisser fasciner. Peut-être était-ce cette Jane qu'il avait réussi à séduire ?

Je restais assise. Je ne comprenais pas où j'étais. Pourquoi étais-je venu ici sans armes. Où était ma fidèle arbalète et mes rassurants carreaux en fer ? Je ne reconnaissais même pas l'endroit où je me trouvais : c'était bien loin des douves froides et humides où ils m'avaient enfermées. Quel était ce ridicule sac à dos qui ne contenait rien qu'une carte et une vieille lettre geignarde et cette tenue étrange ?

Il eut un petit rire. Bien sûr, il entendait la moindre de mes pensées, le fourbe.

Je restais sur mes gardes, le vampire cherchait maintenant quelque chose dans les plis de sa drôle de robe.

Je fis un bond en arrière, il exhibait une longue épée qu'il tenait abaissée le long de sa jambe.

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"Tiens. Si tu cherches un arme, en voilà une."

Il fit glisser l'épée au sol d'un seul geste avant de continuer d'une voix neutre :

"Si tu l'as plante bien droit dans le cœur, tu me tueras d'un seul coup. Tu n'auras plus qu'à me trancher la tête ensuite et tu seras débarrassé de moi, comme tu le souhaites."

Je tremblais de tout mon corps, l'invite était tentante. Je me penchais avec précaution pour me saisir de cette arme providentielle incapable de résister. Mais où était le piège ?

"Il n'y en a pas, Jane. C'est tout simple. Et je ne lutterais même pas. Prends cette arme et tue-moi, mets un terme à cette vie dont je ne veux plus."

Je le regardais avec une extrême froideur. Qu'est-ce qui avait donc changé ? Pourquoi son discours n'était plus le même ? Jamais le vampire que je connaissais n'aurait baissé les bras contre moi. Et pourtant, il venait de le dire clairement. Pourquoi cessait-il la lutte ? Pourquoi insistait-il à m'appeler Jane ?

"Mets un terme définitif à mon existence ou à ma conduite inhumaine, Sorcière" haranguait-il dédaigneux. "C'est ta mission. Fais-le !"

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Mes yeux croisèrent les siens et y restaient malgré moi, attachés. Il avait un air résolu et déterminé.

"Va-y, Jane." continuait-il tout en se rapprochant inexorablement de moi. "Fais-le. Tue-moi."

Étrangement, une douce chaleur m'envahit toute entière, un bien-être m'enveloppa de la tête jusqu'aux pieds, un doux feu agréable et ardent auquel les battements de mon cœur répondait. Je secouais la tête pour ne pas y céder. Qu'est-ce qui m'arrivait ?

Je regardais l'épée dont la lame brillait dans mes mains et ses yeux tour à tour.

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"Ne sois pas timide, Jane. Un seul coup dans le cœur suffira."

Sa voix s'était faite étrangement plaintive et douce, comme ses yeux qui semblaient aussi me supplier.

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Mon corps était à proximité du sien et je pouvais sentir son souffle dans mes cheveux. 

"Mon nom n'est pas Jane, Vampire ! Qu'est-ce qui t'arrive, donc ? Un soupçon de regret pour une de tes nombreuses victimes ?"

Je le trouvais le visage extraordinairement paisible, calme et tranquille. Lui dont j'avais vu la haine aussi farouche que la mienne.

"Non, pas une victime, Emma. Une femme que j'ai aimé par dessus tout et dont j'emporte le souvenir avec moi. Fais-ton office, Chasseuse. Abrège mes souffrances."

Je fronçais les sourcils, étonnée par ses propos.

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"Loin de moi, l'idée de te plaire, Vampire." soufflais-je soudain en relevant l'épée contre lui. 

Il éclata de rire mais au moment où j'essayais de me reculer, il referma fermement sa main sur le tranchant de mon épée, et avança la lame sur lui.

Un seul geste maintenant de ma part aurait suffit à plonger la lame dans son cœur. 

Je ne le quittais pas des yeux mais il ne semblait pas vouloir bouger malgré le sang qui coulait de sa main et malgré la souffrance qui se lisait sur ses traits. 

Soudain, je fus assailli par un flux d'images. Sans que je ne puisse faire quoique ce soit l'esprit du vampire prit possession du mien pour m'offrir en accéléré les points essentiels de ma vie.

Il eut un petit air satisfait.

"Je me demandais enfin quand tu allais t'en souvenir. Je vois que comme à ton habitude ta mémoire est sélective. Tu ne gardes ce qui t'intéresse, Jane. Je suis toujours là pour t'aider à recoller les morceaux de ta mémoire défaillante afin que tout soit bien clair dans ton esprit à présent..."

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"Est-ce fini ?" dis-je soudain.

"Oui. C'est fini, Jane. Enfin presque."

La haine avait fait place à une lassitude extrême, j'étais presque sûre que c'était exactement ce que ressentait Ânkhtyfy en ce moment au vue du regard qu'il déposait sur moi.

Il maintenait toujours l'épée contre son coeur et curieusement nous nous étions rapprochés.

"Ce sera non" répéta-t'il encore d'une voix extrêmement douce. 

Je levais les yeux vers lui.

"Pourquoi ?" dis-je

"Tu sais bien pourquoi."

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Mes yeux sondaient les siens.

"Non, je ne sais pas pourquoi" le bravais-je. "Serait-ce seulement une histoire d'orgueil ?"

Il éclata de rire encore.

J'aimais les traits de son visage et le velours de ses yeux, la finesse de ses lèvres, l'aile droite son nez, et ses cheveux noirs.

"Non, ce n'est pas une histoire d'orgueil, Jane. C'est simplement ne pas perdre qui j'ai été, et faire en sorte aussi que toi non plus tu n'oublies pas qui tu as été."

Je ne comprenais pas.

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"Je sais, Jane. Je sais."

Puis soudain, alors que je ne m'attendais pas, il se rapprocha de moi et posa ses lèvres froides sur les miennes pour un baiser doux et léger. 

"Je t'aime, Jane" me dit-il tout contre ma bouche. "Je t'ai aimé dès le premier jour".

Je restais bouche-bée incapable de parler. J'avais vu toute ma vie défiler devant mes yeux, repassant un film étrange où j'avais pris une part active. Je ressentais encore la haine en moi celle qui avait conduit à tous ces rebondissements. 660 ans de vengeance terrée dans mon cœur pour lui et, il se trouvait maintenant devant moi, prêt à mourir et m'avouait qu'il m'aimait.

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Nos yeux se croisèrent longuement. Pourquoi tant de temps ? J'avais même l'impression que mon cœur se mettait à battre plus fort et que le temps se suspendait comme par magie. Quelle magie ? Mon souffle devenait plus court, ma respiration presque haletante. Je ressentais encore son baiser brûlant sur mes lèvres et sa douceur me faisait penser aux promesses alanguissantes que pouvaient être ses mains sur mon corps.

Je sursautais.

Il resserra mon corps fermement contre le sien me ramenant à la réalité. Son regard s'assombrit tout à coup devenant d'un rouge foncé profond et froid. Je frissonnais sous sa détermination.

"C'est fini, Jane" me souffla-t'il encore en avançant sa joue vers la mienne.

Puis soudain, ses doigts glissèrent jusqu'aux miens et d'un coup sec il enfonça  la lame de l'épée dans son cœur. 

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"Aydann !!" hurlais-je "Pourquoi !"

Il avait un sourire sur les lèvres.

"Je vois que tu n'as rien oublié, Jane. Ton cœur sait combien je t'ai aimé. Qu'il en soit ainsi. Prends soin de notre fils."

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Et lentement, il glissa au sol.

"Non." répétais-je abattue. "Je n'ai jamais voulu que cela finisse comme cela. Non."

Des larmes coulaient sur mon visage et mon corps étaient secoués par des soubresauts violents.

"Tu ne peux pas me laisser seule, Aydann, pas après tout cela."

Il souriait paisiblement malgré la douleur qui lui défigurait le visage.

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"Maintenant tu dois terminer ton travail, Jane. Tranches-moi la tête pour mettre un terme définitif à ta vengeance. Les vampires meurent ainsi. Ainsi tu seras libérée de moi et je serais enfin pardonné pour tout le mal que je t'ai fait."

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Je n'arrivais plus à parler tant j'avais de sanglots. Mon cœur était déchiré par son geste. 

"Pourquoi" répétais-je. "Pourquoi"

Il soupira :

"Je viens de te le dire, Jane. Tu seras libre comme cela. Et je serai pardonné."

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Ma vie défila de nouveau devant mes yeux : encore et encore cette vengeance brûlante dans le cœur quoique je fasse, intarissable haine qui enflammait mon corps. 

Étrangement, je me projetais dans le futur, et si, encore, et encore, Emma souhaitait sa vengeance. Trouverait-elle encore dans son passé, une faille pour revenir assouvir sa vindicte envers et contre tout ? 

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"Jane" supplia-t'il. 

Je secouais la tête incapable de le voir souffrir plus, et je lui fit un signe léger couvrant mes lèvres de mon doigt.

Puis avant qu'il ne comprenne mon intention, je brandis l'épée au-dessus de ma tête et je la retournais contre moi. 

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"Jane !" l'entendis-je hurler. "Quelle folie"

Il s'était redressé pour me prendre dans ses bras.

"Pourquoi ?"

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Je le regardais alors que je sentais ma vie s'écouler dans ses doigts.

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"Je t'aime, Aydann. Sauve-moi de ma haine contre toi."

"Quelle folie, Jane !"

"Tu n'as pas le choix" souriais-je."Je ne veux pas te perdre."

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Avant qu'il ne soit trop tard, il entailla mon poignet et y planta ses dents.

L'effet fut presque immédiat. 

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Au moment où la mort venait me saisir à bras le corps, et où je sentis chacun de mes membres se raidir, en même temps, bloquant ma poitrine dans un dernier souffle mortel, une force m'enveloppa toute entière et me souleva du sol.

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Une volée de chauve-souris venues de nulle-part m'environnèrent des pieds à la tête.

J'avais conscience de leurs ailes qui me battaient et me frappaient le corps comme si elles voulaient me débarrasser de tout mon sang.

Implacables, elles me mordaient sans arrêter propulsant tout autour de moi un nuage de mon fluide vital dont mon amant semblaient se repaître et tirer une nouvelle force.

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Puis étonnamment, au moment même où mon cœur cessa de battre, son esprit se souda au mien et tel un joyau de lumière qu'il m'avait dérobé, il le déposa de nouveau dans mon corps pour m'offrir mon deuxième souffle de vie d'immortelle. 

La panique me gagna comme un nouveau-né car ma conscience ne m'avait quitté à aucun moment.

Ma bouche s'ouvrait happant le vide mais je n'avais pas besoin d'air pour respirer. Ma poitrine était dure et elle se bloquait mais aucun rythme régulier ne faisait battre mon cœur, mon corps n'en avait plus besoin.

Un silence profond envahissait tout mon être m'indiquant que plus un seul de mes membres ne me feraient souffrir.

Je m'accrochais à mon amant comme à une bouée ne sachant comme faire. 

Sa voix douce me commanda tendrement d'ouvrir les yeux et de ne pas avoir peur.

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Il contemplait mon visage avec amour.

"Aydann."murmurais-je. 

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"Jane" me répliquait-il avec tendresse avant de plaquer délicatement sa bouche sur la mienne pour un long baiser.

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"Te voilà, Immortelle, mon Amour." me dit-il en me gardant serrée contre lui. "J’espère que tu ne le regretteras pas..."

Je percevais de l'inquiétude sur son visage

"Je ne regretterais rien de ce qui me permettra d'être avec toi, Aydann." murmurais-je restant serrée contre lui.

Il souriait et j'adorais ce sourire, et la tendresse que je lisais dans son regard.

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"Me pardonneras-tu, Ma Chérie. Pour tout le mal que je t'ai fait ?" 

Je serrais ses mains qu'il venait de me tendre avec force plantant mon regard dans le sien.

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"Je comprend ta nature, Aydann. C'est mon pardon." dis-je doucement en caressant sa joue.

Je baissais soudain la tête, à mon tour, inquiète.

"Qu'y-a-t'il ?" me demanda -t'il en effleurant mes lèvres d'un baiser.

"M'aideras-tu à contrôler la mienne, Aydann ? Je ne suis pas devenue Vampire pour..."

Il posa un doigt sur mes lèvres stoppant mes paroles :

"Je sais, Jane. Ne t'inquiète pas. Parle-moi maintenant de ton idée. Ces plasmas fruits..."

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Je le regardais avec surprise. Mais oui ! J'avais déjà oublié ! 

"Oh, Aydann. C'est une révolution ! Ce fruit permettra aux nôtres de vivre comme tout le monde sans plus jamais avoir à se cacher."

Il me regardait avec un sourire affectueux :

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"Les Nôtres, Jane. Je suis fier de toi. Si jeune vampire, et déjà si impliquée pour nous, tous."

Je me collais contre lui :

"Oui. j'ai tellement hâte... mais par quoi commencer ?"

Il eut un petit rire affectueux.

"Il faut prévenir les nôtres, déjà. J'ai plusieurs amis qui se chargeront de répandre la nouvelle."

Je m'écartais légèrement sans me rendre compte que j'avais fait plus de deux mètres en arrière. 

J'avais déjà rassemblé mes affaires sans me rendre compte prise par la vitesse de mes pensées associées à ma nouvelle capacité de déplacement.

"Allons-y Aydann, nous avons tant de choses à faire."

J'étais déjà prés de la porte quand il me rejoint avec amusement.

"Jane... Jane." tenta t'il.

J'étais surprise qu'il me retienne. 

"Le soleil se lève, ma Chérie. Tu es un vampire, maintenant, tu dois restée bien tranquille ici en attendant que le soir tombe."

Il se mit à rire de ma mine déconfite.

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"Attendre! Attendre !" commençais-je à dire en haussant le ton. "Mais ce n'est pas possible..."

Il me saisit le bras avec plus de force, et m'attira à lui :

"Jane, il va falloir apprendre la tempérance, ma chérie. Car l'une des qualités essentielles d"un vampire est de savoir attendre, sans quoi, tu ne vivras pas longtemps..."

Il se pencha sur moi et toucha ma joue avec ses lèvres.

"Nous pouvons rattraper le temps perdu, Jane. J'ai tellement hâte de..." commença-t'il en plongeant sa tête dans mes cheveux.

Le désir me submergea comme une vague ardente. 

"Oui. Voilà notre nuit à nous." 

"Oui, Jane. Demain. Nous irons prendre contact avec mes amis et nous rassemblerons tout ceux qui voudront bien t'écouter."

Je l'embrassais avec passion répondant à son propre baiser.

"Oui, Aydann. Nous avons une semaine pour le faire, ensuite j'informerais le monde entier de cette nouvelle découverte. D'ici six mois, un an peut-être moins, nous pourrons être acceptés parmi les hommes et vivre normalement !"

Il dégrafa mon bustier tandis que je faisais glisser sa djellaba à terre. 

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"Je suis sûre que je pourrais créer quelque chose qui nous permettent à tous de pouvoir sortir le jour !" commençais-je tandis que mon esprit commençait déjà à associer des formules de plantes entre elles.

Je me fondis contre son torse nu tandis qu'il saisissait ma taille me plaquant contre lui.

"Il y a tant de choses à faire ! J'ai tant d'idées. Cela fusionne dans ma tête comme des feux d'artifice..."

Il posa ses lèvres sur les miennes, me souleva dans ses bras, et nous fit glisser vers le cercueil de marbre.

"Tu auras toute l'éternité, Mon Amour..." me dit-il. "Et je ne doute pas que tu vas réussir..."

Il déposa un baiser sur ma bouche tandis qu'il me souleva pour me déposer sur le lit de marbre.

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"Mais avant..."

Il planta son regard ardent dans le mien tandis que je sentais son corps se presser contre le mien et sa main se refermer sur la mienne en guise d'union.

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"Je veux savourer toutes les heures de cette nuit avec toi... et ne pas manquer une seule seconde..."

Je rougis jusqu'aux oreilles mais je blotissais contre lui cherchant son contact. Nos sens en éveil ravivèrent notre passion mutuelle.

Je sentais le bonheur comme une tempête tumultueuse m'envahir mais je n'avais pas envie de retenir cette vague de satisfaction qui bouillonnait en moi. Il était la raison pour laquelle j'étais heureuse et je comptais bien lui prouver. Et moi aussi maintenant, j'avais toute l'éternité.

 

FIN

10 janvier 2014

Comment faire pour que mes Sims aient l'air morts sur ma photo ?

Les Sims™ 3 -141

Vous avez envie de savoir comment j'ai réalisé le trucage de cette photo ? 

Rendez-vous sur ce lien, je vous dévoile mon secret.

Comment faire pour que mes Sims aient l'air morts sur ma photo ?

 

 

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